Intervention de Mathilde Panot

Séance en hémicycle du samedi 10 avril 2021 à 21h00
Lutte contre le dérèglement climatique — Article 36

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMathilde Panot :

Je conteste vos arguments.

En l'espèce, nous ne parlons pas de l'enclavement des territoires. Si l'on interdisait l'exploitation de services aériens sur des liaisons intérieures dès lors qu'existe une offre ferroviaire de moins de quatre heures, les trajets concernés seraient Paris-Marseille – qui dure trois heures deux, ce qui ne me paraît pas extraordinairement long – , Paris-Montpellier, qui prend trois heures quatre, ou Paris-Brest, qui se fait en trois heures vingt-cinq. Je rappelle qu'en 2019, Paris-Marseille a été la troisième ligne de vols intérieurs la plus utilisée et qu'elle a produit 127 000 tonnes de CO2 par an. J'ajoute que la durée du trajet en avion fait l'objet d'une publicité mensongère, qui méconnaît le temps nécessaire pour arriver jusqu'à l'aéroport, la demi-heure d'attente qui précède l'embarquement, puis, à l'arrivée, la jonction de l'aéroport au centre-ville. Ces délais, ajoutés au temps de transport, ne justifient pas qu'on continue à privilégier l'avion, alors que la mesure que nous proposons – j'y insiste – n'enclaverait en rien les territoires.

Quant à savoir si l'avion est réservé aux plus aisés, je vais à mon tour citer un chiffre qui doit nous interpeller, monsieur le ministre délégué : en France, 50 % des vols sont effectués par 2 % de la population.

Je suis heureuse de vous entendre parler d'emploi. En France, les géants du e-commerce ont détruit en solde net – avant l'épidémie de covid – 81 000 emplois, sans que personne s'en soit ému. Nul ne s'est demandé s'il fallait arrêter Amazon jusqu'à ce qu'on s'en inquiète tout à coup. Une tribune signée par 700 étudiants en aéronautique, un collectif du nom d'Icare et autre collectif réunissant des personnels de l'aéronautique plaident tous pour une bifurcation, en disant qu'ils pourraient investir leurs compétences dans d'autres domaines.

Enfin, il est absurde de prétendre que, parce qu'il y aurait une crise, il faudrait attendre que les émissions de gaz à effet de serre réaugmentent, avant d'entreprendre de les réduire. C'est maintenant qu'il faut intervenir. Dans sa rédaction actuelle, l'article est vide, purement symbolique : en s'attaquant aux trois lignes dont vous parlez, on réduira les émissions de CO2 des vols métropolitains de 2,2 %. Si l'on retenait en revanche la limite de quatre heures au lieu de deux et demie, on ferait baisser ces émissions de 33 %, ce qui aiderait la France à réaliser son ambition climatique et à respecter ses engagements internationaux, sans empêcher les gens de se déplacer.

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