Intervention de Anthony Ikni

Réunion du jeudi 17 septembre 2020 à 9h00
Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Anthony Ikni, délégué général du Forum Français de la Jeunesse :

Je représente le Forum français de la Jeunesse qui est le principal porte-parole en France des organisations gérées et animées par les jeunes de moins de trente ans. Certaines sont autour de la table ce matin.

En introduction, je parlerai surtout de l'insertion économique des jeunes, des difficultés sur le marché du travail. Je partage ce qu'a dit Yann Renault sur la vie sociale, la vie éducative et l'engagement.

Les associations membres du Forum français de la jeunesse ont été actives durant le confinement pour organiser la solidarité, connecter les jeunes, analyser les difficultés que pouvaient rencontrer les jeunes étudiants, les jeunes actifs, les jeunes au chômage, les jeunes apprentis, les jeunes engagés dans des associations et qui étaient privés de lien social.

Nous avons connu un paradoxe pendant cette période de confinement. En effet, si les jeunes étaient sanitairement peu touchés par cette crise, ils ont été économiquement et psychologiquement, psychiquement même, très atteints par cette crise. Ce sont les notions que je souhaite développer.

Plusieurs enquêtes, diligentées par les pouvoirs publics ou par des associations, ont montré que, alors que les jeunes souffrent déjà plus de la pauvreté que leurs aînés, cette réalité a été accentuée par le confinement. La fracture numérique a frappé les jeunes, par exemple faute de connexion Internet. Ils ont également souffert des espaces trop petits, des logements insalubres parfois ou de la nécessité de garder leurs frères et sœurs, de veiller sur leurs parents ou leurs grands-parents.

Les chiffres suivants proviennent notamment de notre rapport « Plan jeunesse », sorti en juillet 2020 pour analyser, poser des constats et faire des propositions. 38 % des jeunes travaillent dans le cadre d'un contrat précaire, en CDD ou auto-entrepreneuriat et parfois sans contrat de travail. Plus de 50 % des jeunes sont inquiets pour leur santé mentale. Notamment, une enquête réalisée auprès de 11 000 étudiants par l'une de nos composantes, le Bureau national des élèves ingénieurs (BNEI), montrait que 52 % des étudiants estimaient qu'eux-mêmes ou leurs camarades avaient besoin d'un suivi psychologique par un professionnel.

Parmi les données plus connues, 700 000 jeunes arrivent sur le marché du travail en ce moment même, sachant que 600 000 jeunes sont déjà au chômage. Le chiffre le plus récent sur le sujet provient d'Eurostat : 21,2 % des jeunes de 18 à 25 ans sont au chômage en France, ce qui représente à peu près 600 000 personnes, soit le contingent le plus important d'Europe. Nous sommes largement devant l'Allemagne. Nous avons donc déjà le problème de cette « maladie » du chômage chez les jeunes qu'il faut documenter, analyser et à laquelle il faut répondre. D'après une étude de l'Organisation internationale du travail, au niveau mondial, un jeune sur six a arrêté de travailler depuis le début de la crise.

Illustrons ces chiffres par quelques situations vécues par les jeunes durant le confinement. Les jeunes ayant des contrats d'insertion ont souffert d'absences de gratification, d'arrêts de la garantie jeunes. Les intérimaires ont vu leurs entreprises fermer, ont subi des fins de contrat. Les apprentis ont connu des retards de gratifications de fins de contrat. La situation a été assez problématique pour les étudiants également puisqu'ils n'avaient ni accès au chômage partiel ni possibilité de travailler. Nous avons constaté une explosion du nombre d'étudiants qui, d'habitude, allaient manger au Centre régional des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) et se sont retrouvés à faire la queue dans les banques alimentaires. Les stagiaires n'ont pas bénéficié du chômage partiel, ont vu leurs stages reportés. Enfin, les saisonniers n'ont pas trouvé de travail cet été, ou peu, puisque toutes les fonctions habituelles – travail sur les plages, dans les cinémas ou les restaurants – étaient en forte diminution. Tout cela a entraîné de graves répercussions économiques sur la rentrée.

Le Forum français pour la jeunesse, en lien avec d'autres organisations comme le CNAJEP, la Confédération française démocratique du travail (CFDT), l'Union nationale pour l'habitat des jeunes (UNHAJ), a très vite porté des propositions. Nous avons voulu traiter très rapidement l'urgence de soutenir ces jeunes, pas uniquement sur le plan économique, mais aussi sur le plan de l'engagement, sur le plan du logement. Nous avons proposé de verser une aide exceptionnelle pour les jeunes entre 18 et 25 ans qui ne touchaient pas le revenu de solidarité active (RSA). Cette proposition a fini par être entendue par les pouvoirs publics puisqu'une aide de 200 euros a été annoncée par le Premier ministre en mai.

Nous avons soumis d'autres propositions plus techniques. Nous avons par exemple demandé aux caisses d'allocations familiales (CAF) de débloquer des fonds d'urgence dans les départements pour abonder le parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (PACEA). Nous avons également demandé d'accélérer sur la garantie jeunes. Nous avons proposé, avec d'autres associations, de proroger les missions de service civique d'une durée égale à la durée du confinement pour assurer à ces jeunes une source de revenus et leur permettre de terminer leur engagement. Cette demande n'a pas été entendue par les pouvoirs publics. Nous avons aussi proposé de renforcer les effectifs dans les structures d'accueil, notamment pour les mineurs non accompagnés, les jeunes de l'aide sociale à l'enfance (ASE) et les jeunes relevant de la protection judiciaire de la jeunesse.

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