Intervention de Éric Coquerel

Réunion du mercredi 9 septembre 2020 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Coquerel :

Merci à Marc Le Fur pour son travail. J'ai lu avec attention l'accord de coopération. Pour ma part, je considère que tout ce qui va dans le sens d'une véritable souveraineté monétaire des pays africains, afin d'enclencher un véritable développement, est positif. Or, et il importe de le noter, il y a dans cet accord des éléments qui ne sont pas seulement cosmétiques, à commencer par le changement de nom, qui n'est pas qu'un problème de mots : il marque une rupture avec le franc CFA, qui, comme chacun sait, est l'acronyme du franc de la communauté financière africaine, mais est souvent ressenti, avec raison, comme restant le franc « des colonies françaises d'Afrique » par les pays concernés. La fin de la centralisation des réserves de change de l'UEMOA à Paris va elle aussi dans le bon sens.

Cela dit, j'observe que la France va rester très présente : si elle n'est plus co-gestionnaire, elle conserve son rôle de garant financier de l'union ; elle pourra, à titre exceptionnel, pour la durée nécessaire à la gestion d'une crise, avoir de nouveau un représentant au comité de la politique monétaire de la Banque centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO).

Deux choses surtout m'inquiètent – ce sont mes réserves envers le texte.

Premièrement, je crains que l'accord n'enterre le projet de monnaie commune de la CEDEAO. J'observe en effet qu'il ne concerne que huit pays francophones et n'inclut évidemment ni le Nigeria ni le Ghana – pas davantage, d'ailleurs, que les pays d'Afrique centrale utilisant eux aussi le franc CFA.

Deuxièmement, la nouvelle monnaie restera indexée sur l'euro. De ce point de vue, je me demande si on ne risque pas, en définitive, de passer du franc CFA à une sorte d'euro CFA – avec la logique monétariste que cela suppose, qui n'est pas forcément ce qu'il faut pour relever les défis auxquels sont confrontés les pays subsahariens, qui décident de gros investissements. De la même manière, d'ailleurs, je considère que cette logique n'est pas non plus nécessaire pour l'Europe – mais c'est un autre débat.

Que penseriez-vous, Marc Le Fur, de détacher l'eco de l'euro et de le rattacher plutôt à un panier de devises ?

Ne pourrait-on pas envisager une fin programmée de la tutelle française sur une période longue, par exemple cinq à dix ans, en accord avec les pays concernés – ce qui permettrait cette fois de couper réellement le cordon ombilical ?

Comment la France peut-elle contribuer à une réflexion sur le statut de cette monnaie commune, afin d'éviter le syndrome de la monnaie forte, dont l'euro est l'illustration et qui n'est pas profitable aux pays en question ?

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