Intervention de Claire Hédon

Réunion du mercredi 15 juillet 2020 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Claire Hédon :

Vous m'interrogez sur mes priorités et mes sujets de prédilection : je le répète, je crois à l'accès de tous aux droits de tous. Je ne me limiterai donc pas aux personnes en situation de précarité, car pour avoir une meilleure cohésion sociale, il faut travailler pour tous. Déjà, à la tête d'ATD Quart monde, j'en étais convaincue.

La notoriété du Défenseur des droits a bien progressé – plus de 50 % des Français le connaissent, et 87 % d'entre eux reconnaissent son utilité. Mais elle n'est pas encore suffisante. J'espère que ma formation de journaliste me permettra de la faire progresser. C'est capital.

Les délégués territoriaux assurent déjà des permanences dans certaines MSAP, où leur visibilité est importante, pour que les personnes souhaitant faire valoir leurs droits auprès de l'administration pensent à saisir le Défenseur des droits. Plus nous serons présents dans de tels lieux, plus les gens acquerront ce réflexe.

Contre les discriminations, le Défenseur des droits peut déjà intervenir dans les juridictions, à condition d'être saisi ou de s'autosaisir, et sa présence est importante. Concernant les discriminations systémiques, je suis sur la même ligne que M. Toubon : nous devons réfléchir à ce qui, dans le fonctionnement de notre société ou dans notre inconscient, induit de tels comportements. Ce qu'il faut dénoncer, ce sont non pas les personnes, mais le système. J'insiste à nouveau sur l'intersectionnalité : le cumul des handicaps et des difficultés d'accès aux droits est bien réel.

J'ai dit que l'institution était un observatoire, mais je suis également convaincue de la nécessité d'agir, à la fois pour permettre l'accès aux droits et lutter contre les discriminations, et c'est bien ce que fait le Défenseur des droits. Il importe donc d'assurer un suivi des avis : il faut savoir ce qui n'a pas été appliqué et pourquoi.

L'accès à internet et l'accès à l'ordinateur sont tout à fait liés, en effet, de même que le fait de savoir utiliser ces outils. Pour les personnes illettrées, se servir d'un ordinateur est très compliqué. Si le numérique est indispensable et nous facilite la vie au quotidien, il ne doit pas être source d'exclusion, et le Défenseur des droits a fait de nombreuses propositions très intéressantes sur le sujet. L'administration doit veiller à ce que l'absence d'accès à internet ne creuse pas les inégalités. Durant le confinement, avec le télétravail et l'école à la maison, la présence d'un seul ordinateur s'est révélée insuffisante. Certains ont eu de bonnes idées. Un enseignant d'un établissement d'éducation prioritaire a, par exemple, envoyé à ses élèves des devoirs lisibles sur smartphone pour pallier l'absence de matériel informatique au domicile des familles. En retour, les devoirs manuscrits étaient photographiés et envoyés par téléphone.

Les moyens financiers et humains du Défenseur des droits, qui sont aussi le gage de son indépendance, apparaissent insuffisants pour faire face à l'augmentation de son activité. Alors que le nombre de saisines s'élevait à 42 000 en 2011 pour les quatre autorités devenues une unique institution, le Défenseur des droits en reçoit aujourd'hui 102 000, soit plus du double, sans que ses ressources aient connu la même progression.

Le respect des droits de l'enfant est, à mes yeux, capital, et il faut bien reconnaître la réalité de la violence institutionnelle à cet égard. Une façon d'y remédier serait d'agir auprès des enfants de façon préventive pour mieux leur faire connaître leurs droits, à commencer par le droit au logement. Qui serait capable d'élever quatre enfants dans une chambre de bonne ? Pour défendre ces droits, il faut travailler sur l'ensemble des droits.

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