Intervention de Danièle Obono

Réunion du mardi 8 septembre 2020 à 17h05
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

Avec ce projet de loi organique, le Gouvernent entend faire du Conseil économique, social et environnemental un « carrefour des consultations publiques » pour mieux « éclairer les pouvoirs publics sur les enjeux économiques, sociaux et environnementaux » et accueillir la parole citoyenne.

Les mécanismes prévus à l'appui de ces affirmations sont en réalité bien décevants. Ils se réduisent entre autres à un tirage au sort de conseillers non permanents et de conseillères non permanentes, rendant des avis purement consultatifs, et à la transmission numérique de pétitions non contraignantes ou à la modification de la procédure d'adoption des avis rendus.

Le projet de loi organique prévoit en outre la réduction d'un quart des membres du CESE, ce qui est loin de constituer une avancée démocratique. Il propose que la consultation du CESE sur un projet de loi traitant de questions économiques, sociales et environnementales dispense le Gouvernement de procéder à d'autres consultations, évitant de ce fait celles qui pourraient lui être défavorables.

Le projet de loi organique témoigne de l'hypocrisie avec laquelle le Président de la République a fait mine d'écouter non seulement les citoyens et citoyennes, mobilisés pour la défense du climat et des retraites, mais aussi, et surtout, les « gilets jaunes » ainsi que la Convention citoyenne pour le climat. Organisées par l'exécutif pour gagner du temps, de prétendues consultations n'ont été qu'une parodie de démocratie directe. Alors que le peuple alertait sur l'urgence démocratique, sociale et écologique, le pouvoir a tout bonnement ignoré ses demandes.

Aux oubliettes la promesse d'Emmanuel Macron de faciliter le déclenchement du référendum partagé ! Au placard les principales propositions de la Convention citoyenne pour le climat, la renégociation du CETA, la taxe de 4 % sur les dividendes pour financer la transition écologique, la consultation systématique du CESE avant la rédaction de chaque projet ou proposition de loi, le renforcement de la valeur de ses avis, le tirage au sort des conseillers permanents et conseillères permanentes, la renomination du CESE en chambre de la participation citoyenne, sans omettre les propositions du groupe La France insoumise, de la mise en place d'un référendum d'initiative citoyenne à la convocation d'une assemblée constituante !

Tout cela a été balayé d'un revers de main, avec mépris, confirmant l'isolement institutionnel d'un pouvoir muré dans les oripeaux de la monarchie présidentielle. Ce maigre projet de loi organique en est malheureusement une nouvelle illustration, loin des aspirations démocratiques du peuple et des réponses que l'urgence écologique commande.

Nous avions certes déposé une série d'amendements sur ce texte. Ils ont été balayés, révoqués. Nous demandions par exemple un rapport sur la création du référendum d'initiative citoyenne, sur la simplification de la procédure pour enclencher un référendum d'initiative partagée, ou sur l'opportunité d'organiser un référendum sur les retraites et l'organisation d'une constituante.

Nous avions également proposé que soit précisé le nombre minimal de parlementaires pour saisir le CESE et qu'il permette aux parlementaires d'opposition d'engager une telle procédure. Tout cela a été considéré comme inutile, inintéressant, à côté du sujet. C'est pourtant bien le sujet !

Dans son programme et dans toutes les contributions qu'il a présentées depuis trois ans, le groupe La France insoumise soutient des propositions bien plus ambitieuses que la réforme a minima qui nous est soumise aujourd'hui, notamment l'abolition de la monarchie présidentielle avec la convocation d'une assemblée constituante ou la planification démocratique d'une bifurcation écologique et solidaire de l'ensemble de la société. Cet enjeu, qui est une des justifications de cette réforme et de la communication présidentielle, est peu pris en compte. Il ne fait pas l'objet d'une prise de conscience suffisante dans ce texte.

Or la question est éminemment démocratique. Nous ne pourrons transformer fondamentalement le fonctionnement de cette société pour faire face au changement climatique que si l'ensemble de la société s'approprie et soutient cette perspective, si une majorité de la population prend les décisions de réorganisation de nos manières de produire, d'échanger ou de nous déplacer, et si tous et toutes sont actifs et actives dans ce projet.

Les mobilisations de ces dernières années l'ont revendiqué, il faut une cohérence entre justice sociale, justice environnementale et démocratie. Pour toutes ces raisons, le texte n'est malheureusement pas à la hauteur de la situation. Comme l'a affirmé un de nos collègues, le projet de loi organique n'est pas une révolution démocratique – c'est le moins que l'on puisse dire. Cette révolution viendra : nous y travaillons ardemment.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.