Intervention de Agnès Thill

Réunion du lundi 29 juin 2020 à 20h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAgnès Thill :

L'article 1er élargit l'accès à l'AMP aux couples de femmes et aux femmes non mariées. Associé à l'article 4, qui procède à une réforme du droit de la filiation dont la portée n'est pas maîtrisée, il rompt en profondeur avec le droit jusqu'alors applicable à la procréation médicalement assistée.

Depuis l'adoption des premières lois de bioéthique, en 1994, le droit français se caractérise par une constante recherche d'équilibre entre les nécessités du progrès scientifique et technique et la préservation des valeurs humaines et sociales fondamentales ; cet article s'en éloigne. Cette recherche d'équilibre repose sur l'idée que tout ce qui est techniquement possible n'est pas toujours socialement ou éthiquement souhaitable. C'est une véritable question, que je vous invite à vous poser. Ainsi, s'agissant de l'AMP, les législateurs successifs ont fait le choix d'encadrer strictement les conditions d'accès, fondées sur l'intérêt supérieur de l'enfant, au sens de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989, que vous semblez nier, et d'interdire rigoureusement les techniques susceptibles de porter atteinte aux valeurs sociales fondamentales. Par ailleurs, l'article L. 2141-2 du code de la santé publique réserve le recours à l'AMP à un couple formé d'un homme et d'une femme, vivants et en âge de procréer.

En ouvrant l'AMP aux couples de femmes et aux femmes seules, l'article 1er rompt l'équilibre fragile qui avait été trouvé. S'il convient de reconnaître que la notion d'égalité se trouve au fondement de cette disposition, car elle donne la possibilité à tous les couples, hétérosexuels et homosexuels, de satisfaire un désir d'enfant, celle-ci ne s'en heurte pas moins à plusieurs limites. Si, en effet, on permet aux femmes homosexuelles de recourir à la médecine pour procréer en se fondant sur l'égalité, il paraît nécessaire d'en faire autant pour les hommes, et nous voilà arrivés à la GPA, interdite en France au nom du principe d'indisponibilité du corps humain. En outre, l'ouverture de l'AMP aux couples de femmes remet en question tout notre droit de la filiation en la détachant de toute référence à l'engendrement.

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