Intervention de Bruno le Maire

Réunion du jeudi 3 septembre 2020 à 15h30
Commission des affaires sociales

Bruno le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance :

Je partage la frustration exprimée par Sébastien Jumel sur le temps dont nous disposons, mais nous aurons d'autres occasions, en commission, de revenir sur la mise en œuvre de ce plan qui engage des montants considérables. On a perdu, depuis quelques mois, la notion des chiffres : le million d'euros s'est transformé en milliard. Là où on pouvait passer trois heures pour savoir où on affectait un million d'euros, on va passer cinq minutes sur l'attribution de 10 milliards d'euros. Je voudrais qu'on reprenne la mesure des choses : ce plan est d'une ampleur considérable. Cette première audition est très importante. Ma journée étant très chargée, je ne peux y consacrer autant de temps que je le désirerais mais je reviendrai, autant que nécessaire, devant les commissions qui le souhaiteront, pour évoquer l'exécution du plan – qui est, à mes yeux, l'aspect primordial.

Monsieur le président de la commission des finances, je veux vous remercier d'avoir annoncé que vous voteriez le plan de relance, qui sera inscrit dans une mission spécifique. Je comprends parfaitement que votre engagement ne porte que sur cette mission, mais cela me paraît un geste politique fort.

La vitesse d'exécution du plan est un enjeu majeur. Certains nous disent que nous aurions dû engager 200, 300 milliards d'euros. Nous nous fixons comme objectif – très ambitieux – de décaisser 30 % des 100 milliards d'euros en 2021. Les fonds de la mission Plan de relance seront votés pour 2021 puis pour 2022, mais il est évident que des décaissements interviendront aussi en 2023 et éventuellement en 2024 : tout ne sera pas versé en deux ans.

Je ne suis pas favorable à la conditionnalité mais je suis partisan des contreparties. La conditionnalité serait un frein à l'exécution du plan. Le temps qu'on vérifie que les conditions sont remplies pour apporter de l'argent à telle PME qui en a besoin ou à tel groupe qui veut investir, il est déjà trop tard : la crise a produit son effet.

En revanche, que nous demandions des contreparties me paraît légitime. J'en vois de trois types. Les premières sont environnementales. Ainsi, lorsque nous avons apporté notre soutien à Air France, nous avons notamment demandé la suppression des lignes intérieures pour lesquelles existait une liaison alternative par le train en moins de deux heures trente, ce qui n'allait pas de soi. Envisager la suppression de la ligne Paris-Bordeaux, par exemple, suppose de tenir compte de l'impact de cette suppression sur certaines activités économiques et de l'inquiétude des salariés concernés. Je suis prêt à discuter avec vous dans le cadre du débat parlementaire des contreparties environnementales.

Le deuxième type de contreparties correspond aux accords d'intéressement et de participation, ce qui rejoint les questions posées sur une meilleure rémunération des salariés. Si une entreprise retrouve des couleurs grâce au soutien de l'État, celui-ci est en droit d'exiger la signature de tels accords.

Enfin, je crois beaucoup aux contreparties concernant la gouvernance d'entreprise : profitons de cette crise, qui change la donne, pour poser un regard nouveau sur ce sujet. Nous l'avons fait évoluer au travers de la loi relative à la croissance et à la transformation des entreprises, dite PACTE ; nous pouvons aller plus loin, notamment sur l'égalité entre les femmes et les hommes.

S'agissant des réformes, je suis évidemment favorable à ce que nous les poursuivions – je pense notamment à Action Logement et aux retraites. Dans le cadre du décaissement des 40 milliards d'euros du plan de relance européen, l'Union veillera à ce que la France mène à terme un certain nombre de réformes structurelles.

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