Intervention de Jean-Louis Bourlanges

Séance en hémicycle du jeudi 20 juillet 2017 à 9h35
Débat d'orientation des finances publiques pour 2018

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bourlanges :

Le réformateur, le modernisateur, c'est l'inverse : c'est quelqu'un qui croit que la réforme est mère des dépenses et non la dépense mère de la réforme. C'est quelqu'un qui sait que, si nous voulons aller très loin dans le progrès, dans la réduction des dépenses, il faut tout changer, revoir les missions, les cibles, les modus operandi, pour que l'essentiel, les valeurs fondamentales que nous défendons, puissent demeurer.

La faiblesse du réformateur est le temps, dont il a besoin : le temps est le lieu de tous les pièges, la tentation permanente du « demain, on rase gratis ». En tant qu'homme du centre, je partage avec les hommes de gouvernement l'idée qu'il faut un peu de contrainte et un peu d'ambition, un peu d'esprit budgétaire et beaucoup d'esprit modernisateur. Je crois que la bonne politique ressemble à une sculpture vue par Paul Valéry, c'est-à-dire à un compromis entre la volonté de l'artiste et la résistance du matériau.

Quand je regarde ce qui nous est proposé, je constate, monsieur le ministre des comptes publics, que vous êtes arrivé devant nous revêtu de l'uniforme du budgétaire. Vous avez frappé fort, vous avez frappé vite, et je vous en félicite. Vous n'aviez pas le choix : à partir du moment où vous étiez confronté à des sous-évaluations budgétaires massives, à des engagements internationaux et européens impératifs et intenables, et à l'exigence politique, morale et économique de ne pas accroître la pression fiscale, vous n'aviez pas d'autre choix que de faire des coupes douloureuses dans des domaines qui, parfois, n'étaient pas les plus adaptés à court terme. J'espère que vous pensez que ce qui a été fait cette année sera, d'une manière ou d'une autre, et notamment dans la défense, compensé dans les années ultérieures.

Mais, autant vous avez eu raison aujourd'hui, autant vous devrez agir autrement demain, et vos propos témoignent que vous pensez de la sorte. Vous devez vous engager sur la voie d'une réforme en profondeur. Vous avez donné sur ce plan des assurances ; bien sûr, tout est dans les détails et dans la façon dont les engagements seront tenus, et nos collègues vous ont posé mille questions opportunes à ce sujet.

Il me semble que vous êtes porté par une dynamique et exposé à un risque. La dynamique, je la connais bien en tant qu'ancien parlementaire européen, est celle de l'engrenage des réformes. Vous y êtes : ce que vous faites en matière fiscale, dans les domaines local et social, vous obligera à faire davantage. Vous êtes déjà allé trop loin pour ne pas aller plus loin. Je m'en réjouis, car nous avons besoin d'une refonte en profondeur du système. Vous êtes en marche, ce qui veut dire que vous n'êtes pas au bout du chemin. Nous attendons de vous que vous progressiez et nourrissiez la réforme ; ce que vous faites aujourd'hui légitime ce que vous ferez demain, j'espère, de plus ambitieux encore.

Le risque serait de commettre une erreur de périmètre. S'il faut tout réformer, le régalien ne doit pas être sanctuarisé, mot conservateur abominable, mais dynamisé et protégé. C'est ailleurs, dans les politiques d'intervention, dans un système social mal fagoté, dans un État providence de moins en moins providentiel et de plus en plus coûteux, que vous devez tout changer pour que tout soit mieux. Ne vous trompez pas d'aiguillage : vous êtes arrivé avec Emmanuel Macron, porté au pouvoir par l'audace, et vous devez maintenant passer de l'audace au courage, ce qui n'est pas la même chose. Nous vous attendons sur cette transition et nous vous aiderons de tout notre coeur.

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