Intervention de Delphine Batho

Séance en hémicycle du mardi 19 décembre 2017 à 15h00
Fin de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDelphine Batho :

Madame la présidente, monsieur le ministre d'État, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, il me faut le répéter : notre groupe votera l'interdiction de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures. Ce texte est très important et, pour tout dire, j'ai été étonnée que le Président de la République n'en dise pas un mot dimanche soir. Pour notre part, nous sommes très fiers de voter ce projet de loi, que nous avons amendé en grande partie, même s'il n'est pas parfait et même si vingt-deux ans, c'est long.

Je veux saluer mes collègues de la commission du développement durable, Christophe Bouillon et Hervé Saulignac. Nous considérons que certains enjeux méritent, plus que d'autres, que l'on constitue des majorités d'idées aussi larges que possible. Nous estimons que chacun de nous a une responsabilité face à l'enjeu du réchauffement climatique, qu'il soit dans la majorité ou dans l'opposition. Certains ont refusé cette responsabilité et les débats ont mis en évidence une réalité, que je regrette mais qui n'est pas surprenante : la droite a définitivement oublié qu'elle était à l'origine du Grenelle de l'environnement.

Tout n'est pas réglé, et le combat n'est pas achevé. Mais nous voyons cette loi sous l'aspect de sa dynamique, et pensons qu'elle obligera le Gouvernement à l'action, dans une plus grande cohérence.

Il s'agit d'abord d'agir pour sortir la mobilité des énergies fossiles de la mobilité, en commençant par l'industrie automobile. À cet égard, monsieur le ministre d'État, la proposition européenne sur les limites d'émissions applicables aux voitures particulières après 2020 nous inquiète et nous paraît totalement inacceptable.

L'action concerne aussi notre modèle énergétique. Nous vous mettons en garde contre la fausse opposition entre transition climatique et transition énergétique. La continuité qui a prévalu pendant des années, en France, en matière nucléaire nous a fait prendre du retard dans le domaine des économies d'énergie et du développement des énergies renouvelables ; c'est ce qui explique notre retard. J'espère, monsieur le ministre d'État, que le Parlement sera saisi du projet de programmation pluriannuelle de l'énergie.

Enfin, je forme le voeu que ce texte soit un point d'appui pour celles et ceux qui, partout dans le monde, se battent contre l'exploitation des énergies fossiles.

Au moment d'adopter ce texte, je souhaite que l'Assemblée nationale salue les citoyens qui, au Québec, se battent contre les nouveaux projets de règlement relatifs aux hydrocarbures, qui autorisent la fracturation hydraulique dans les lacs, les rivières, les réserves de faune sauvage.

Je souhaite que l'Assemblée nationale adresse un message d'encouragement aux citoyens algériens qui se battent contre le nouvel accord conclu avec le groupe Total, qui prévoit l'exploitation du gaz de schiste par fracturation hydraulique en Algérie. Cet accord a été conclu avec l'appui des gouvernements français d'hier et d'aujourd'hui, alors que le groupe Total avait attaqué l'Algérie devant un tribunal d'arbitrage, l'accusant d'avoir instauré une taxe sur les superprofits des compagnies pétrolières étrangères.

Je souhaite aussi que la France adresse un message de soutien aux voix qui s'élèvent en faveur de l'arrêt de toute activité pétrolière en Méditerranée. Il convient, là encore, d'en finir avec une certaine forme de cynisme. Au lendemain même du jour où le présent projet de loi était présenté en Conseil des ministres, le Président de la République emmenait avec lui les représentants du groupe Total pour un voyage officiel en Grèce, afin que la France, dans le cadre du soutien qu'elle apporte à la Grèce pour se sortir des difficultés économiques, soutienne la mise en valeur des ressources inexploitées de la Grèce, notamment les hydrocarbures au large de Corfou.

Nous espérons donc, monsieur le ministre d'État, que ce texte sera contagieux. Nous nous réjouissons du message universel adressé par la France en faveur du climat et des initiatives prises pour prolonger la COP21 et maintenir un leadership français en la matière, mais il subsiste dans le même temps une vieille tradition, avec laquelle il faut rompre, de realpolitik à la française. Chaque fois que vos décisions iront dans le sens du changement d'air que nous appelons de nos voeux, monsieur le ministre d'État, nous vous soutiendrons.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.