Intervention de Odile Renaud-Basso

Réunion du jeudi 25 janvier 2018 à 14h40
Mission d'information sur le suivi des négociations liées au brexit et l'avenir des relations de l'union européenne et de la france avec le royaume-uni

Odile Renaud-Basso, directrice générale du Trésor :

Les marchés, dans les domaines tels que le financement des entreprises, l'émission de dettes, l'émission d'actions nouvelles, existent dans l'Union à vingt-sept et ne sont pas dépendants du Royaume-Uni. Nous disposons d'une industrie financière sur la continent qui est très développée et est en mesure de répondre à la demande de nos acteurs économiques. Il existe cependant quelques activités – notamment la compensation de certains produits financiers - qui sont très concentrées à Londres. L'absence d'accord pourrait dans ce cas déboucher sur une incertitude juridique problématique sur les stocks de contrats en cours, qu'il faudrait régler. Il existe toutefois des solutions à la main de l'Union européenne, qui pourrait reconnaître de façon unilatérale l'équivalence de la régulation britannique dans ce domaine. Cela permettrait de ne pas suspendre le cadre actuel et de donner aux acteurs financiers le temps de se réorganiser.

La stabilité financière constitue un point important dans l'organisation des relations futures, car il s'agit de ne pas se retrouver dans une situation où notre coeur financier resterait à Londres, sous réglementation et supervision britanniques. En cas de difficulté, et la crise des dettes souveraines survenue en 2011-2012 l'a montré, seul l'intérêt national prévaut. Il n'est pas sûr que si une telle situation venait à se reproduire, le Royaume-Uni prendrait garde à nos intérêts. De telles activités, essentielles pour le fonctionnement de notre économie, ne peuvent dépendre de Londres.

En 2012, lorsque la zone euro était en très grande difficulté, la Banque d'Angleterre a augmenté les exigences de collatéral, sans prévenir les superviseurs européens et sans tenir compte des effets sur la dette des pays de la zone euro. On voit bien que ce système n'est pas tenable et trop dangereux pour l'Union.

Il est tout de même paradoxal que les Britanniques, qui souhaitent sortir de l'Union, appellent à ne pas fragmenter les marchés dans l'accord futur au motif qu'ils sont unifiés, alors que c'est précisément grâce à la construction européenne qu'ils le sont ! L'argument est difficilement recevable, aussi bien sur le plan politique que sur le plan économique : le Brexit est par nature une décision de « fragmentation » de l'Union européenne et ce ne sont pas les Vingt-sept qui en sont responsables. Certes, la relocalisation des activités réduira une partie des économies d'échelle que permettait leur concentration dans la City, et il y pourrait y voir ponctuellement des coûts additionnels. La concentration des chambres de compensation permet ainsi, dans une certaine mesure, de réduire les besoins de collatéraux, puisque les transactions se neutralisent les unes les autres. Séparer les activités peut avoir ainsi un effet sur les exigences de collatéral, mais je pense que cela restera mineur.

Il est possible que des activités se relocalisent ailleurs qu'en Europe. La City était attractive parce qu'elle desservait l'ensemble du marché européen. Avec le Brexit, les banques internationales relocaliseront leurs activités pour l'Europe en Europe, mais elles pourront installer les activités internationales à Singapour ou à New York. En tout état de cause, c'est surtout la City qui en subira les conséquences.

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