Intervention de Sophie Nerbonne

Réunion du jeudi 14 décembre 2017 à 9h40
Commission des affaires économiques

Sophie Nerbonne, directrice de la direction de la conformité, Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) :

Je vais revenir sur la question de savoir qui stocke les données, et comment. La collecte des données s'effectue par l'intermédiaire des gestionnaires de réseaux de distribution de gaz ou d'électricité. Certaines informations sont collectées par défaut : tout ce qui concerne les données de consommation journalières ne fait l'objet d'aucun consentement de la part de la personne. En revanche, les données relatives aux consommations fines, à l'heure ou à la demi-heure, donnent lieu, soit à un accord de l'usager, soit, de manière ponctuelle, lorsque ces informations sont nécessaires pour permettre l'accomplissement des missions de service public assignées aux gestionnaires de réseaux, par exemple pour la maintenance du réseau ou l'intégration des énergies renouvelables, à une collecte par les gestionnaires de réseau.

Concernant la question relative à la commercialisation des données par des fournisseurs d'énergie, il faut savoir qu'il est nécessaire de recueillir le consentement de la personne. L'accord de l'abonné est obligatoire. Le problème est alors de savoir comment l'abonné peut être informé de la façon de procéder, et de l'ensemble de ses droits. En effet, que les droits existent est une chose ; qu'ils puissent être exercés dans la vie réelle en est une autre. Il est important de considérer, dans ce contexte, que l'accès au compteur Linky pour les usagers s'effectue par le biais d'un espace sécurisé. Or, je doute fort que beaucoup de personnes disposant de compteurs Linky se rendent sur cet espace accessible sur Internet, alors que celui-ci constitue pourtant le moyen d'activer ou de suspendre la collecte et la transmission des données de consommation détaillées, de supprimer des informations enregistrées, de paramétrer, et de recevoir des alertes. Il est important, si l'on télécharge des applications sur son smartphone, de bien vérifier la façon de les paramétrer, pour décider des personnes qui pourront recevoir telle ou telle information. Ces précautions relèvent d'une éducation au numérique, qui est fondamentale, et participe pleinement de l'accompagnement indispensable des citoyens, et consommateurs.

Pour ce qui est des garanties en termes d'anonymat, il faut savoir que des travaux ont été menés sur les différents maillages possibles, selon que les données sont placées en Open Data, avec une nécessité absolue d'anonymisation, ou transmises aux seules collectivités territoriales, ce qui requiert un niveau de sécurité moindre. Ces questions ont été débattues très longuement auprès du ministère chargé de l'élaboration du décret d'application de la loi sur la transition énergétique, et avec l'ensemble des parties prenantes : associations de consommateurs, fournisseurs de services, distributeurs, ou CNIL.

La CNIL a, en vertu de la loi sur la République numérique, la possibilité de certifier des processus d'anonymisation. Elle a été saisie, dans ce cadre, de plusieurs demandes de conseil, de la part d'opérateurs souhaitant avoir l'assurance que le dispositif d'anonymisation était réel, c'est-à-dire caractérisé par une rupture totale de la possibilité de réidentifier la personne, sachant que la spécificité de ce monde d'objets connectés fait que, quand bien même on ne dispose pas de données nominatives, telles que le nom ou l'adresse, les algorithmes peuvent permettre de réidentifier les individus. Il faut avoir en tête que ce que l'on dit à un moment donné devra forcément tenir compte de l'évolution des technologies. Il s'agit d'un processus continu. La notion de conformité doit ainsi être perçue non seulement tout au long de la chaîne de la donnée, depuis sa collecte jusqu'à son anonymisation ou sa destruction, mais aussi dans le temps, en fonction de l'évolution des technologies.

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