Intervention de Daniel Labaronne

Séance en hémicycle du jeudi 8 mars 2018 à 21h30
Liste française des paradis fiscaux — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Labaronne :

Le « tout ou rien » ne permet pas d'envisager des sanctions modulables.

Deuxième point, les sanctions doivent être applicables.

L'article 2 de la proposition de loi présente comme unique sanction d'interdire aux établissements de crédit français d'exercer dans les États non coopératifs définis par l'article 1er. Dans ces conditions, qui nous semblent utopiques, les banques françaises devraient fermer la quasi-totalité de leurs filiales étrangères.

Imaginons un instant ce scénario. Quel en serait l'impact sur l'attractivité et la compétitivité de notre système financier ? Quel en serait le coût en termes d'emplois pour l'économie française ? Je ne doute pas, mes chers collègues, que vous soyez sensibles à ces arguments.

Troisième point : cette lutte doit s'inscrire dans un cadre européen. Comme vous le rappelez dans votre exposé des motifs, selon le Conseil économique, social et environnemental, la perte annuelle de recettes fiscales en France s'élèverait à 60 à 80 milliards d'euros, tandis que la Commission européenne estime à plus de 1 000 milliards d'euros la même perte pour les États de l'Union européenne. Les Européens réclament à juste titre plus de transparence. L'Union européenne se positionne sur la scène internationale comme un élément moteur de la lutte contre les paradis fiscaux et cherche à faire évoluer la liste actuelle de l'OCDE.

Vous pointez dans votre projet de loi le rôle des intermédiaires, en prenant l'exemple d'un cabinet fiscaliste des Côtes-d'Armor ayant aidé des centaines d'entreprises à ne pas payer leurs cotisations sociales. La Commission européenne a justement proposé d'appliquer aux intermédiaires des règles de transparence beaucoup plus strictes.

La liste européenne des paradis fiscaux, fondée sur trois critères, n'est peut-être pas encore parfaite, mais elle constitue une première étape légitime et intéressante. Il conviendra ensuite de travailler sur les sanctions associées, modulables en fonction des critères.

Quatrième et dernier point : ce combat doit s'inscrire dans une démarche plus globale. Les circuits d'optimisation fiscale sont planétaires. Il est dans l'intérêt collectif de lutter contre ce fléau. Une construction transfrontalière par l'intermédiaire de l'Europe est donc nécessaire et le débat transpartisan apparaît indispensable.

Tous les sujets devront être abordés, y compris celui, évoqué aujourd'hui à la suite des Panama papers, du lancement par l'Union européenne d'une procédure d'infraction fiscale à l'encontre de la Grèce, de Chypre et de Malte concernant la fraude massive à la TVA sur des yachts de luxe.

Au niveau de l'Assemblée nationale, le débat est également engagé, au travers des missions d'information sur le verrou de Bercy et sur l'optimisation et la fraude fiscales. Il va s'intensifier courant mars, quand le Gouvernement annoncera son plan anti-fraude fiscale. Ce véhicule nous permettra de développer des mesures applicables dans un cadre plus global.

Je me réjouis par conséquent de poursuivre avec vous très prochainement cette discussion nécessaire sur les paradis fiscaux.

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