Intervention de Jean Arthuis

Réunion du jeudi 15 mars 2018 à 14h30
Mission d'information sur le suivi des négociations liées au brexit et l'avenir des relations de l'union européenne et de la france avec le royaume-uni

Jean Arthuis, président de la commission des budgets au Parlement européen :

M. Presa a évoqué la conditionnalité. L'Europe ne se résume pas à un budget et à des directives, c'est aussi une charte de valeurs fondamentales. Tout État entrant dans l'Union européenne y souscrit. Ceux qui s'en écartent peuvent-ils prétendre aux mêmes avantages financiers que les autres ? En sept ans, la Pologne a dû percevoir environ 75 milliards d'euros nets, et la Hongrie une vingtaine ou une trentaine. Il faudra clarifier la situation à un moment donné. On dit qu'il faut punir les gouvernements, mais pas les peuples, ce qui est une façon de ne rien faire, en réalité. Il va falloir que l'on trouve le moyen de faire respecter les valeurs fondamentales.

Le risque est qu'un fossé se creuse entre l'Europe de l'Ouest et celle de l'Est. C'est une vraie question : les salaires ne progressent pas dans les pays de l'Europe de l'Est, alors qu'ils connaissent le plein-emploi et qu'ils acceptent bien souvent des travailleurs venant d'au-delà des frontières extérieures de l'Europe – de Biélorussie ou d'Ukraine, par exemple. Il va falloir que l'Europe clarifie sa vision et sa politique.

On est un peu confronté à la quadrature du cercle : comment faire progresser le budget sans augmenter la contribution des États, comment demander plus à l'impôt et moins aux contribuables ? Ce n'est pas facile tous les jours… (Sourires.)

Il est important d'avoir plus fréquemment des échanges entre les parlementaires nationaux et européens. Je ne suis pas sûr que l'on ait toujours une vision claire de ces questions : il y a tous les satellites budgétaires dont j'ai parlé et l'on va mettre dans le budget des éléments concernant la zone euro – je ne sais pas à quoi ça va ressembler ni comment ce sera financé.

À titre d'exemple, il existe un mécanisme européen de stabilisation financière pour mutualiser le surendettement de la Grèce et de quelques autres États, qui va peut-être se transformer en fonds monétaire européen : ses fonds propres, auxquels la France a participé, comme l'Allemagne et tous les autres pays de la zone euro, s'élèvent à 80 milliards d'euros, et l'on a donné des garanties allant jusqu'à 600 ou 700 milliards. Ce mécanisme est bien géré, car un Allemand est à sa tête (Sourires.), mais il n'est contrôlé ni par le Parlement européen ni par les Parlements nationaux.

Tous ces satellites budgétaires échappent au contrôle parlementaire et bafouent un principal fondamental qui est celui de l'unité budgétaire. Quand vous examinez le budget européen, je ne sais pas si vous avez clairement à l'esprit quels montants vont au Trust Fund pour la Syrie, à celui pour l'Afrique ou à la facilité budgétaire pour la Turquie : tout cela devient extrêmement compliqué. Je pense que l'on doit saisir l'occasion qui se présente à nous de revenir à l'unité budgétaire et d'assurer la lisibilité du budget européen.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.