Intervention de Sabine Rubin

Réunion du mardi 15 mai 2018 à 16h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSabine Rubin :

Nous abordons aujourd'hui un problème majeur dans la vie des Français. Commençons par rappeler que le logement n'est pas un bien marchand comme un autre. Se loger est un droit fondamental : il est bafoué pour les dizaines de milliers de sans-domiciles fixes et mis en péril pour les près de 4 millions de mal-logés et les plus de 12 millions de personnes en situation de fragilité vis-à-vis du logement. La priorité doit donc être de garantir un logement décent à ces personnes.

Ensuite, de nombreux Français ont des difficultés à se loger, notamment dans les métropoles, du fait d'un manque de logements à un prix abordable.

À cette grave crise, quelles ont été vos premières réponses ? La baisse des APL ; la demande du président Macron aux propriétaires de baisser leur loyer de cinq euros, restée sans effets ; la purge du mouvement HLM qui va perdre 1,7 milliard d'euros de revenus ; la promesse non tenue du Président qu'il n'y ait « plus d'ici la fin de l'année des femmes et des hommes dans les rues, dans les bois » ; les déclarations choquantes de membres de la majorité sur les SDF à Paris.

Seule initiative positive après cette liste très inquiétante : le lancement du plan « logement d'abord » qui nous semble aller dans le bon sens et dont nous attendons les résultats.

Venons-en au projet de loi ELAN.

Premièrement, vous souhaitez provoquer un choc de l'offre en réduisant les normes, en accélérant les procédures, en prévoyant de nouvelles dérogations. Cela se traduit, par exemple, par un recul très important concernant l'accès pour les personnes à mobilité réduite, qui alerte fortement les associations et constitue un non-sens alors que la population française vieillit. On retrouve la même logique libérale que dans les ordonnances modifiant le code du travail : les rigidités réglementaires empêcheraient la construction de logements, il faut donc déréguler pour augmenter l'offre et faire baisser les prix. Nous ne partageons absolument pas cette idéologie et prônons une politique ambitieuse de rénovation énergétique et de construction de qualité.

Rappelons que la France est le pays d'Europe où l'on construit le plus : c'est donc que l'entrave réglementaire ne doit pas être un problème majeur. De plus, la production de logements ne pourra représenter qu'une très faible part de l'ensemble des logements, et aura donc un faible effet sur les prix.

Nous pensons qu'il faut construire des logements répondant à la demande sociale, et prendre des mesures sur le logement existant sans laisser la main invisible du marché décider de l'avenir du logement en France. C'est pourquoi nous proposons de construire un million de logements sociaux en cinq ans, et d'encadrer les loyers à la baisse.

Au contraire, vous avez imposé un plan d'austérité sans précédent au mouvement HLM, qui ampute ses capacités de construction et de rénovation du parc social. Vous imposez maintenant des fusions entre organismes ; nous ne pensons pas que ce soit le coeur du problème, d'autant plus que les coûts de gestion des grands organismes sont souvent les plus élevés. Après avoir affaibli les organismes HLM et déséquilibré leur modèle économique, vous voulez les renflouer en vendant les bijoux de famille : 20 000, voire 40 000 HLM par an. Il est absurde de vendre ce patrimoine alors que près de 2 millions de ménages sont en attente d'un logement social. Vous suivez l'exemple de la politique de Margaret Thatcher, dont on a vu les conséquences désastreuses. À terme, vous voulez marchandiser le logement social alors qu'il est plus que jamais nécessaire de le préserver et le développer au service de l'intérêt général.

Enfin, vous proposez la création d'un « bail mobilité » non reconductible d'une durée d'un à dix mois pour les étudiants, les personnes en formation et les stagiaires. Disons-le clairement, le bail mobilité est un bail précarité. Cela revient à créer un sous-bail pour les précaires. Il ne faut pas réduire les droits de locataires, mais au contraire mettre en place une garantie universelle des loyers par l'État et encadrer les exigences des propriétaires comme nous le proposons dans « l'Avenir en commun ».

Au cours de ce débat, les députés de la France Insoumise opposeront à la logique libérale qui vous anime et à la marchandisation du logement social que vous préparez une vision humaniste qui considère le logement social comme un modèle et le logement comme un droit fondamental.

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