Intervention de Muriel Pénicaud

Réunion du mercredi 23 mai 2018 à 16h15
Commission des affaires sociales

Muriel Pénicaud, ministre du travail :

Monsieur Hammouche, vous craignez que l'agence France compétences ne soit « hors sol » ? Mais c'est aujourd'hui qu'on est « hors sol », avec quatre organismes nationaux, dans lesquels partenaires sociaux, État, régions, etc., se croisent, et pas tous ensemble, sur les mêmes sujets, sur la formation et l'apprentissage, mais dans des endroits différents, sans jamais être en mesure d'appréhender l'ensemble… ensemble. Franchement, je considère comme un progrès d'être passé de quatre organismes à un seul organisme, où l'on peut tout se dire et discuter de tout. Maintenant, comme je l'ai déjà dit, il s'agit de faire de la régulation, non de l'opérationnel.

Bien entendu, le savoir-faire, le savoir-être et le savoir-vivre ensemble font à mes yeux partie des compétences à acquérir. De fait, on s'aperçoit que dans les formations des jeunes et des demandeurs d'emploi longue durée, le manque de compétences dites transversales, dites sociales, est souvent le premier obstacle à la recherche d'emploi. C'est un sujet très important. Nous en avons fait un des volets du plan d'investissement dans les compétences, à côté des qualifications. C'est aussi pour cela que nous avons mis en place les prépas apprentissage dans les CFA.

Pour ce qui est du temps de travail, vous n'avez pratiquement pas évoqué, dans vos questions, les plans de formation ; or toutes les obligations des entreprises en la matière mais aussi en ce qui concerne l'accompagnement et l'anticipation de l'évolution de leurs salariés, continueront de s'appliquer. Les droits que nous créons au bénéfice des individus, assortis de garanties collectives, s'ajoutent à toutes les opportunités prévues dans le cadre du plan de formation et qui portent très majoritairement sur le temps de travail.

Le vieillissement de la population, vous l'avez dit, en termes de compétences, est tout à la fois générateur de nouveaux risques mais créateur de nouveaux emplois – en matière d'accompagnement notamment. Pour pourvoir aux compétences nouvelles, il va falloir travailler avec les acteurs car ce n'est pas seulement une branche qui sera concernée, et falloir définir ce que seront les emplois de demain, en quantité et en qualité. Pour l'heure, nous n'en avons qu'une idée un peu grossière : le niveau de granularité n'est pas suffisant… La direction générale de la fonction publique (DGAFP) va multiplier les plans d'accompagnement de définition des compétences de l'avenir par secteur et filière. Il faudra donc creuser la question en nous appuyant sur les opérateurs de compétences du secteur.

Je n'ai pas de réponse pour le moment à la question qui m'a été posée sur les aidants. La question de la reprise après un congé parental ou un congé de proche aidant – en fait, tous les congés longs – n'en est pas moins importante à mes yeux. Dans les deux cas, ce sont surtout les femmes qui sont touchées alors qu'elles ont déjà des difficultés de carrière. Par définition, tous ces gens ont travaillé auparavant : leur CPF est donc activable. Mais le conseil en évolution professionnelle pourrait être également une piste ; nous pourrons examiner ensemble le fait de savoir si nous pouvons aller plus loin sur ce point.

Le contrat d'apprentissage est d'un système hybride : c'est tout à la fois une formation initiale et un contrat de travail. Il relève donc bien et du code de l'éducation et du code du travail ; mais c'est un hybride assumé depuis toujours dans la législation. Du reste, nous avons travaillé très étroitement avec le ministre de l'éducation nationale et avec la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation pour élaborer ce projet de loi. Le Conseil d'État a vérifié que les dispositions en la matière respectaient bien la Constitution ; nous sommes sécurisés sur ce plan. Les renvois entre les deux codes sont permanents et cela ne devrait pas changer…

Pour ce qui est de l'assurance chômage, le congé maladie est, si je puis dire, neutre dans le système de bonus-malus. Seuls sont visés ceux qui ont recours excessivement, sans que cela soit nécessaire, à des contrats courts, sans se préoccuper du fait de savoir si les employés s'inscrivent ensuite au chômage ou non. Qu'il y ait un congé maladie ou pas n'a aucun effet sur le dispositif.

J'ai déjà répondu rapidement à la question sur l'inclusion et en particulier sur les ESAT. Le sujet étant très technique, je ne m'y étendrai pas. Le dispositif prévu, effectivement assez compliqué, qui permet aux entreprises de s'acquitter de leur obligation légale d'emploi de travailleurs handicapés –, ne devrait pas les dissuader de recourir aux ESAT. L'obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH), comme tout ce qui touche aux handicapés, mérite effectivement une simplification. La déclaration n'obéit pas du tout aux mêmes critères administratifs que la déclaration des autres salariés ; on peut parler de symbole, mais cela ne facilite pas l'inclusion. Le seul fait d'accueillir un handicapé représente une grosse charge administrative supplémentaire pour une petite ou moyenne entreprise. C'est la raison pour laquelle nous allons intégrer cette procédure dans la déclaration sociale nominative (DSN) où il suffira de préciser que la personne employée est handicapée. En fait, plutôt que de multiplier les systèmes à part qui découragent les entreprises, les intéressés eux-mêmes et ceux qui les accompagnent, car il leur faut connaître ces dispositifs compliqués, l'idée est d'intégrer les travailleurs handicapés dans le droit commun « avec un plus », si j'ose dire. C'est ce à quoi nous travaillons avec Sophie Cluzel : faire du droit commun.

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