Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Séance en hémicycle du jeudi 7 juin 2018 à 15h00
Lutte contre la manipulation de l'information — Motion de renvoi en commission (proposition de loi ordinaire)

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Mélenchon :

alors on se battrait pour faire en sorte que les journalistes puissent faire correctement leur travail c'est-à-dire, plus précisément, pour qu'un journaliste n'ait pas peur et qu'à cette fin son contrat de travail soit stable, pour qu'il ne soit pas écrasé de tâches de sorte que l'on ne voie plus ces gens courir avec une caméra sur les bras après avoir conduit leur voiture, poser une question, remonter puis repartir faire le montage. Ce sont les conditions matérielles de travail des journalistes qui sont la première garantie, pour nous, d'une information de qualité qui puisse être ensuite diffusée !

L'influence des annonceurs serait réduite car il n'est pas juste que les aides à la presse, distribuées pour lui permettre d'exister, le soient indifféremment entre la presse d'opinion, qui mérite d'être soutenue, qui mérite d'être subventionnée, et la presse qui prétend ne pas avoir d'opinion mais qui en a quand même une et qui formate l'esprit du public.

Précarisation des journalistes, influence des annonceurs, concentration de la propriété : voilà les vraies racines des problèmes de la qualité de l'information ! Celle-ci, en démocratie, est un sujet central. La République repose sur deux piliers si l'on veut que le citoyen soit libre : premièrement, l'éducation, qui permet à chacun de développer son esprit critique ; deuxièmement, l'information, qui lui permet de confier à d'autres le soin de se renseigner pour donner les instruments dont on a besoin afin de prendre la bonne décision en tant que citoyen préoccupé par l'intérêt général. Ce sont les deux colonnes du temple républicain : l'information et l'éducation ! Ni l'une ni l'autre ne doivent être confiées à des secteurs qui ont des intérêts privés et qui les poursuivent dans l'exercice des missions d'information et d'éducation.

Le CSA ne peut pas remplir ce rôle ; Google, Facebook ne le doivent pas. C'est à nous de mettre au point les outils nécessaires ! J'en conviens, et je peux en parler – je ne suis pas le seul dans cet hémicycle – : il est exaspérant de voir comment on peut être traîné dans la boue, une fois, deux fois, trois fois, quatre fois par semaine à partir d'allégations jamais démontrées qui ulcèrent, dégoûtent, abattent et sont faites pour salir. Le seul recours : la plainte en diffamation, plaidée devant un tribunal, puis l'attente, pendant des mois, qu'une réponse arrive ; ou bien le référé, avec tous les dangers d'une décision prise soudain et qu'il faut présenter dans des termes tels qu'elle puisse être immédiate.

Combien de jours vais-je encore devoir supporter les allégations de ce Logerot, président de la prétendue commission de contrôle des comptes qui, chaque jour, invente un nouveau thème, sans être jamais contrôlé, sans jamais offrir de contrepartie, sans que je puisse jamais défendre mon honneur, où que ce soit ! Il y en a assez de ces façons de faire ! De combien de questions dois-je encore faire état, pour lesquelles nous n'avons pas de recours ? Que fait le CSA dans ces circonstances, quand de fausses nouvelles sont lancées ?

Je me souviens d'un montage sur l'un de mes discours où l'on m'entend dire que je suis déprimé sur fond d'applaudissements. Plus de deux mois après, le CSA a reconnu que c'était un montage, que c'était bidon : il n'a pas dit cela, et cela peut laisser penser qu'il voulait dire autre chose. Où cette décision du CSA a-t-elle été publiée ? Nulle part ! Voilà ce qu'il en est du régime de la vérité aujourd'hui !

Et l'on va parler entre nous, Français, de Russia Today et de Sputnik ? Croit-on qu'un seul Français se laisse prendre par des informations qu'il n'a pas envie d'entendre ? Ceux qui les croient les croient parce qu'ils ont envie de les croire ! Et s'ils ont envie de les croire, on ferait bien de se demander pourquoi ! Parce que le doute s'est répandu partout

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