Intervention de Fabrice Pierre

Réunion du jeudi 31 mai 2018 à 9h15
Commission d'enquête sur l'alimentation industrielle : qualité nutritionnelle, rôle dans l'émergence de pathologies chroniques, impact social et environnemental de sa provenance

Fabrice Pierre, directeur de recherche et directeur d'unité adjoint de l'unité de recherche en toxicologie alimentaire (TOXALIM) :

Je suis physiologiste, directeur de recherche au centre Occitanie-Toulouse de l'INRA, spécialiste de la relation entre alimentation, additifs, et risques de cancer.

Notre alimentation est tout d'abord la source d'énergie, de nutriments et de micro-nutriments qui sont indispensables à notre métabolisme de base, à notre croissance et à notre développement cognitif. Ces effets constituent l'ensemble de ce que nous appelons « bénéfice nutritionnel ».

C'est également une question sociétale, que l'on peut analyser grâce à des données scientifiques qui sont maintenant solides.

Enfin, l'alimentation constitue un risque. La toxicité de notre alimentation peut avoir différentes origines. Premièrement, dans le cas des aliments transformés, elle peut provenir de produits qui sont intentionnellement rajoutés, les additifs. Nous pourrons ainsi revenir, si vous le souhaitez, sur la démonstration récente des effets du dioxyde de titane, cette fraction nanoparticulaire présente dans le piment blanc de notre alimentation. Deuxièmement, la toxicité peut également provenir de différents produits non intentionnellement rajoutés, comme des produits néo-formés, qui vont apparaître pendant la transformation, mais aussi pendant la préparation à la maison de ces aliments. Ainsi, les cuissons à haute température génèrent des amines hétérocycliques ; l'ajout de nitrites provoque l'apparition de composés N-nitrosés, considérés comme mutagènes. Troisièmement, la toxicité peut provenir des composants chimiques tels que les résidus de pesticides. Quatrièmement, elle peut provenir des nutriments eux-mêmes, en cas de consommation excessive ou de déséquilibre nutritionnel. Un tel déséquilibre peut contribuer à l'émergence de pathologies chroniques.

Afin de prendre en compte cette diversité, l'INRA promeut l'étude des cocktails, c'est-à-dire l'exposition multiple à de faibles doses, étude qui est indispensable pour analyser correctement les risques que présente notre alimentation. Nous travaillons d'abord à identifier de nouveaux dangers en étudiant les molécules au niveau individuel, comme pour le dioxyde de titane, mais aussi en analysant des « effets cocktail » ; nous fournissons ainsi des éléments académiques aux agences d'évaluation. Ensuite, lorsque des risques sont établis, nous nous efforçons d'en comprendre les mécanismes de façon à proposer des stratégies de prévention. Enfin, comme l'a souligné Monique Axelos, nous agissons en interaction avec des partenaires industriels de façon à les inciter et à les aider à modifier les produits mis en marché sur la base de d'éléments scientifiques.

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