Intervention de Christophe Castaner

Réunion du jeudi 31 mai 2018 à 15h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement :

Je commencerai par répondre à Mme Osson sur les conséquences à tirer pour l'évolution des ressources de la CNDA de l'afflux des demandeurs d'asile. Le délai moyen de traitement constaté a poursuivi son amélioration en 2017 et s'élève ainsi à cinq mois et six jours fin 2017. Il a diminué de près de 60 % sur cette période. Pour autant, le délai cible retenu dans le PLF 2017 pour les procédures accélérées n'a pas été atteint. La CNDA a en effet connu en 2017 une hausse spectaculaire de ces entrées, avec 53 581 recours enregistrés, soit une hausse déjà évoquée de 34 %. Le renforcement des effectifs, avec la création de 40 postes en 2017, a permis de faire face à cette augmentation des recours, inattendue à un tel niveau. En 2018, la CNDA bénéficiera de 102 emplois supplémentaires. La moitié, soit 51, étaient inscrits en loi de finances initiale, 51 seront créés en gestion, dont quatre magistrats et 46 rapporteurs. L'extension des locaux de la Cour en 2017 visait également à adapter les conditions d'accueil des requérants et de travail des agents à la hausse continue de l'activité. Le renforcement de la capacité du jugement de la Cour sera poursuivi en 2019, afin de lui permettre l'atteinte des objectifs qui lui sont fixés en termes de délai de jugement – cinq mois pour les procédures collégiales et cinq semaines pour les procédures accélérées. Et cela, malgré l'augmentation exceptionnellement élevée du nombre de contentieux de l'asile. Je voudrais, en évoquant les évolutions d'emplois qui sont créés en gestion 2018, rappeler que c'est un échange que nous avions déjà eu, avec les parlementaires. J'avais alors indiqué que le Gouvernement ferait face aux besoins. C'est le cas parce que c'est nécessaire en plus d'être juste.

Pour répondre à la question de Sarah El Haïry, je voudrais préciser que la justice administrative fait partie intégrante de la mission de contrôle de l'État quand son objet consiste à contrôler la régularité de l'action administrative. Les activités juridictionnelles du Conseil d'État et des tribunaux administratifs ont donc toute leur place dans ce programme 165. Je rappelle par ailleurs, même si on l'oublie, que c'est le Premier ministre qui préside le Conseil d'État. Celui qui fait fonction de président n'est que son premier vice-président.

Pour répondre à Mme Magnier sur l'allègement des normes et la lutte contre la sur-transposition, je commencerai par dire que l'ensemble de vos questions soulèvent de vraies ambitions et de vraies difficultés. L'allègement des normes et la lutte contre la sur-transposition doivent être un objectif permanent. Le Gouvernement, évidemment, le partage. Je voudrais préciser que la circulaire du 1er juillet 2017 du Premier ministre relative à la maîtrise du flux des textes réglementaires et de leur impact prévoit ainsi que toute nouvelle norme réglementaire doit être compensée par la suppression ou, quand c'est impossible, l'aménagement de deux normes existantes. Et toute présentation d'une mesure réglementaire nouvelle est désormais accompagnée d'une fiche relative à la maîtrise du flux de réglementation. Le secrétaire général du Gouvernement (SGG) – nous ne le lui répéterons pas – a apprécié cette circulaire et a veillé avec ses services à en faire le meilleur usage. Il n'a donc pas hésité à bloquer un certain nombre de textes qui n'affichaient pas cet objectif. Les résultats que nous pourrons vous communiquer sur ces sujets sont assez démonstratifs sur le « verrou du SGG » – nous allons inventer un nouveau verrou – qui a permis d'avancer sur ce sujet. Je pense que cela va dans le bon sens.

Il faudrait que nous soyons aussi performants – c'est un autre message pour le SGG – sur les clauses sociales et environnementales dans les marchés publics. Pour l'aspect social, l'objectif national défini par la direction des achats de l'État pour l'année 2017 n'est que de 10 %. Les résultats pour le périmètre que vous avez évalué sont de 4,7 %. Cela fait moins de la moitié de l'objectif national. Il y a donc une forte progression d'une année sur l'autre lorsque l'on regarde l'antépénultième année, parce que ce taux était à 2,9 %. Souhaitons que nous poursuivions sur le même rythme, ce qui nous permettrait d'atteindre presque 10 % cette année. Pour l'axe environnemental, l'objectif national fixé par la direction des achats était de 15 %. Il a été atteint sur l'ensemble du périmètre.

Sur l'obligation d'emploi des personnes handicapées, 107 agents étaient bénéficiaires de l'obligation d'emploi en 2017, soit une hausse de 0,47 % par rapport à 2016 – soit un taux légèrement supérieur de 3,55 % que nous connaissions, en l'occurrence de 3,82 %. Vous avez rappelé que l'objectif initial était de 6 %. Il convient donc – votre question nous y invite et nos objectifs nous y contraignent – que le Gouvernement redouble d'efforts. Vous avez tout à fait raison de le souligner.

Sur la maturité globale en sécurité des systèmes d'information, l'indicateur est de 2,7 sur 5. Cela fait partie des efforts que le Gouvernement veut maintenir à un haut niveau pour garantir la sécurité informatique. 45,7 millions d'euros ont ainsi financé l'ANSSI en 2017. Celle-ci connaît depuis sa création une montée en puissance continue. Les schémas d'emploi successifs ont permis à l'Agence de passer de 122 ETP en 2016 à 540 ETP fin 2017, avec un plafond autorisé de 545 ETP. La progression de ses effectifs se poursuivra sur le quinquennat, avec un renforcement de 25 ETP par année prévu jusqu'en 2022, ce qui permettra d'avoir un plafond d'emploi de 685 personnes, car c'est un enjeu prioritaire – vous avez bien fait de l'évoquer.

En réponse à Mmes Pires Beaune et Hai, je rappelle que, comme l'essentiel des AAI, la CNIL voit son activité augmenter notamment du fait de la numérisation croissante de la société et de l'attention portée par les citoyens au respect de leurs droits. Ces derniers mois ont également été marqués, vous l'avez rappelé l'une et l'autre, par la préparation de l'entrée en vigueur du RGPD. Je l'avais évoqué dans mon propos liminaire, celui-ci est entré en vigueur il y a quelques jours seulement. L'année 2017 a aussi connu une forte augmentation de l'activité concernant le contrôle des mesures de blocage administratif de sites en lien avec le terrorisme et la pédopornographie prises par le ministère de l'Intérieur. Pour permettre à la CNIL d'absorber ces missions nouvelles, les effectifs sont déjà passés de 153 à 198 ETP entre 2011 et 2017. L'effort est poursuivi en 2018, mais à un rythme moindre compte tenu de l'effort général de maîtrise des dépenses publiques. La CNIL bénéficie ainsi d'un schéma d'emploi de 2 ETP supplémentaires pour porter ses effectifs à 199 ETP en 2018, ce qui représente quand même globalement, sur la période, une augmentation de 30 %. Pour 2019, et vous avez raison de souligner les tensions que la CNIL connaît, ses moyens devront être revus, compte tenu notamment de l'entrée en vigueur du RGPD, pour lui permettre de remplir ses missions tout en veillant à une égale répartition de l'effort de maîtrise des finances publiques au sein du programme de la mission.

Monsieur Coquerel, vous m'avez posé trois questions auxquelles je vais tenter de répondre. Sur la première, les frais de réception, nous pourrons peut-être vous communiquer plus d'éléments mais je veux préciser qu'ils s'élèvent globalement à moins de 3 % du budget de l'Élysée et que les 100 000 euros de frais de réceptions évoqués sont liés à des activités diplomatiques alors que 2,2 millions d'euros sont hors activités diplomatiques et portent sur les voeux, sur les Journées européennes du patrimoine et sur toute une série d'événements qui rythment la vie de la Présidence de la République – le tout, évidemment, dans la transparence et sous le contrôle de la Cour des comptes. Les frais de pure administration, d'ailleurs, demeurent à 12 millions d'euros – ils concernent l'informatique, l'action sociale, la gestion immobilière et les moyens généraux. Vous avez raison d'appeler à l'exemplarité, et surtout à la transparence dans le contrôle. Comme je l'ai rappelé dans mon propos liminaire, cette maison – chacun a pu le saluer, et le rapporteur général en particulier – doit faire oeuvre de transparence sur ce sujet. Les fonds spéciaux ont augmenté. J'ai évoqué tout à l'heure le contexte de lutte contre le terrorisme. J'ajouterai que cette répartition est classifiée. Cela ne veut pas dire que nous ne rendons pas compte devant le Parlement. Il existe une commission parlementaire des fonds spéciaux, qui a vocation à en vérifier le bon emploi et qui dispose davantage d'informations que celles que je pourrais avoir et que je pourrais vous communiquer.

Pour la question relative à Ségur, la baisse du budget n'est qu'apparente – je l'avais déjà dit lors de la présentation du budget 2018. Les sommes correspondent en fait aux fonctions mutualisées et elles sont transférées sur un autre programme de la même mission. Je voudrais globalement rappeler que de toute façon, qu'il s'agisse des crédits des AAI ou de l'État, ce sont dans les deux cas des crédits de l'État, donc du contribuable. L'objectif vise à adapter l'engagement financier aux besoins exprimés. Des discussions sont engagées chaque année avec les différents responsables des AAI, et il nous faut trouver ce point d'équilibre entre les objectifs de baisse des dépenses publiques et la prise en compte de l'évolution des fonctions, des besoins et des activités. C'est par exemple le cas pour le Défenseur des droits – c'était la question de M. Dufrègne. Il faut avoir en tête que si les transferts liés à Ségur peuvent apparaître comme des budgets en baisse, c'est parce qu'il a moins de dépenses. À l'inverse, je l'ai dit dans mon propos liminaire pour le Défenseur des droits, le nombre de délégués territoriaux a augmenté de 20 %. Ce qui n'est pas rien. La mutualisation des moyens généraux sur Ségur a directement permis un gain de 5 ETP sous l'autorité du Défenseur des droits.

Cendra Motin m'a interrogé sur les pouvoirs publics constitutionnels. Je rappellerai que le Gouvernement n'a pas à s'exprimer sur ce sujet. Toutefois, l'on peut noter que, comme je l'ai dit précédemment pour la Présidence de la République, le contrat annuel avec la Cour des comptes depuis 2016 permet d'apporter cet éclairage. Le Conseil constitutionnel se soumet lui aussi volontairement à la certification de ses comptes par un conseiller financier, président de la chambre honoraire de la Cour.

Pour terminer, j'apporterai une réponse à votre question, Madame la présidente, sur les conduites addictives en milieu rural. Les études récentes relatives à l'accessibilité des substances psychoactives indiquent une très large diffusion, vous l'avez dit, non seulement du tabac et de l'alcool, mais aussi d'une vaste gamme de produits stupéfiants sur l'ensemble du territoire français. La ruralité n'est pas protégée à cet égard, et je crois que l'on peut mettre en avant des spécificités de la consommation en milieu rural. La consommation régulière de tabac et d'alcool y est plus importante qu'en milieu urbain. Si l'accessibilité au cannabis est plus grande en zone urbaine, et si son expérimentation au cours de la vie plus importante, le développement récent de la cannabiculture tend à faire évoluer ce phénomène. Le cannabis est peut-être plus « bio », mais il se produit aussi plus facilement. La consommation d'autres drogues illicites, hors cannabis, au cours de l'année concernée porte pour 2,5 % des 15-64 ans pour les habitants de milieux urbains, et 1,2 % pour ceux résidant en milieu rural. Dans ce contexte, les actions portées par la MILDECA concernent l'ensemble du territoire. Ses représentants en région, que sont les préfets, en lien avec les partenaires de l'action interministérielle – les agences régionales de santé (ARS), les recteurs, les procureurs – sont ainsi chargés de la mise en oeuvre de la politique de lutte contre les drogues et conduites addictives en fonction des priorités locales. C'est dans ce cadre qu'ils les définissent. Disposant de fonds de 11 millions d'euros en loi de finances initiale, la MILDECA met chaque année à disposition de son réseau territorial près de 8,5 millions d'euros pour conduire des actions précises au plus près des territoires, dont près de 5,8 millions d'euros sont attribués aux territoires ruraux. Si l'on compte les crédits additionnels d'autres partenaires institutionnels, ce sont plus de 13,5 millions d'euros qui sont ainsi mobilisés. Par ailleurs, la MILDECA a lancé en 2018 un appel à projets destiné à soutenir les collectivités locales, quelle que soit leur taille, dans la mise en oeuvre d'une politique locale globale et intégrée de lutte contre les drogues et les conduites addictives. Enfin, les actions pilotées au niveau national concourent à la lutte contre les drogues y compris dans les territoires ruraux.

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