Intervention de Gilles Le Gendre

Réunion du jeudi 7 juin 2018 à 16h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Le Gendre, rapporteur spécial pour le travail et l'emploi :

Comme Marie-Christine Verdier-Jouclas l'a précisé en introduction, la spécificité de l'exercice qui nous réunit consiste à évaluer une mission en pleine transformation, du fait des orientations nouvelles que le Gouvernement et la majorité ont souhaité lui donner depuis un an. Il n'est pas question de détailler ici ces transformations, nous voulons simplement braquer le projecteur sur trois sujets pour lesquels le croisement de l'analyse de l'exécution budgétaire de 2017 et des transformations évoquées avec vos explications se révélera pertinent.

Premier sujet : les contrats aidés et leur articulation avec les crédits d'IAE. À la suite du rapport de Jean-Marc Borello, vous avez fait le choix de déployer des contrats aidés sous forme de parcours emploi compétences (PEC) dont la logique est celle d'un recentrage sur les bénéficiaires. Le fin ciblage des publics a ainsi permis une hausse de la part des travailleurs handicapés. La part des demandeurs d'emploi de très longue durée a également augmenté de 1,3 point entre 2016 et 2017. Dans cette perspective, pensez-vous, madame la ministre, que l'exécution budgétaire à venir, concernant les contrats aidés, sera mieux maîtrisée par rapport à ces dernières années, alors qu'il est prévu de les recentrer sur les publics les plus en difficulté ? Quelle sera en outre la valeur ajoutée de la création d'un fonds d'inclusion qui intégrera les crédits destinés à l'IAE et aux contrats aidés ? Enfin, comment continuer à assurer une exigence en matière de formation de la part des organismes d'accueil comme le préconise le rapport de Jean-Marc Borello ?

Deuxième sujet : le plan « 500 000 formations » des chômeurs. En effet, compte tenu d'une certaine précipitation dans sa mise en oeuvre, les acteurs se sont focalisés sur le lancement des nouveaux marchés avec des formations courtes, ce qui a conduit à une saturation des marchés existants au détriment d'un ciblage sur telle ou telle branche ou telle ou telle modalité de formation. Le montant de la subvention versée par l'État, environ 3 000 euros par formation, a conduit à privilégier les formations courtes soutenues à 80 % par Pôle emploi. Cela n'a pas permis d'obtenir les résultats escomptés en matière d'insertion durable dans l'emploi, dont le taux demeure relativement faible : 27,6 %. Ce constat démontre toute l'importance, dans le déploiement du prochain PIC, d'investir dans des formations à long terme réellement qualifiantes et davantage ciblées sur les publics en difficulté. D'un point de vue budgétaire, il représentera un investissement majeur de 14,6 milliards d'euros sur cinq ans dont 13,8 milliards au titre des programmes 102 et 103.

À cet égard, madame la ministre, pouvez-vous nous donner des précisions sur la manière dont sera déployé ce PIC pour éviter les écueils identifiés dans les précédents grands plans de formation et garantir des formations de longue durée bien ciblées ? Comment bien articuler le PIC avec le futur compte personnel de formation et quels sont les critères déterminants désormais mis en avant dans les conventions d'amorçage qui seront signées avec les régions ?

Troisième sujet que je voulais aborder : l'apprentissage. L'effort financier total des institutions publiques en faveur de l'apprentissage s'élève à un peu plus de 6 milliards d'euros en 2017, dont 1,5 milliard au titre de la mission Travail et emploi et autant au titre du compte d'affectation spéciale Financement du développement et de la modernisation de l'apprentissage. Malgré cet effort financier important, l'apprentissage demeure marqué par des lourdeurs et des complexités qui appellent la réforme d'ampleur que notre assemblée s'apprête à discuter et à voter à partir de la semaine prochaine. Il est clair que la France accuse un retard en la matière par rapport à ses partenaires européens : elle compte 400 000 apprentis, soit seulement 7 % des jeunes de seize à vingt-cinq ans, deux fois moins qu'en Allemagne. Du point de vue du pilotage budgétaire et stratégique et de son efficacité, nous relevons les effets négatifs d'un système fragmenté et éclaté : 995 centres de formation d'apprentis répartis sur 3 057 sites de formation. Le manque de réactivité à proposer des formations répondant aux besoins exprimés par les entreprises doit être impérativement corrigé – c'est précisément ce que nous allons faire. Il en est de même des incitations proposées aux entreprises pour développer l'apprentissage.

Le système est lui aussi très complexe : exonérations de cotisations patronales et salariales, crédit d'impôt en faveur de l'apprentissage, primes directes, aides de l'État. En fonction des conditions d'éligibilité, les entreprises peuvent cumuler plusieurs ou l'ensemble de ces aides qui sont par ailleurs mises en oeuvre par trop d'acteurs, ce qui induit un manque de cohérence.

Face à l'ensemble de ces constats, madame la ministre, pouvez-vous nous rappeler les implications budgétaires et financières de la fusion des aides et de la rationalisation des structures au regard de la situation héritée des années passées ?

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