Intervention de Bruno le Maire

Réunion du jeudi 7 juin 2018 à 9h05
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances :

Je souris en pensant à la remarque de Valérie Rabault : non, je ne peux imaginer que vous votiez n'importe quoi !

S'agissant des participations financières de l'État, il est difficile de prévoir à l'avance, soit les recettes, soit les besoins de recapitalisation. Si des propositions de réformes de procédure budgétaire permettent d'aller vers davantage de rigueur, je pense que vous me connaissez suffisamment pour savoir que j'y serai ouvert et favorable.

S'agissant des prix de cession, et des éléments que vous avez indiqués sur les cessions que nous avons effectuées, permettez-moi de rappeler que ce n'est pas nous qui avons engagé la cession de PSA, qui avait été décidée avant que je prenne mes fonctions de ministre de l'économie et des finances. Les deux cessions dont je suis directement comptable sont celles d'ENGIE et de Renault.

S'agissant de Renault, nous avions pris l'engagement de céder à nouveau les participations de l'État, qui avait été reprises précédemment, à partir du moment où l'opération était neutre pour l'État. Dès que le cours de Renault nous a permis de faire cette opération neutre pour les finances publiques, dénuée d'objectif de plus-value, nous l'avons effectuée.

Pour ENGIE, le résultat négatif que vous indiquez tient au fait que, en janvier 2017, alors que je n'étais pas encore ministre des finances, les cessions de participations de l'État dans ENGIE ont été effectuées à un cours de dix euros. En revanche, lorsque j'ai moi-même effectué des cessions en septembre 2017, quelques mois plus tard, je l'ai fait à un cours de 14 euros : si le résultat est négatif, cela ne résulte donc pas de la cession que j'ai effectuée moi-même.

S'agissant de la restructuration de la filière nucléaire, il y a effectivement une différence d'évaluation entre notre organisme de statistiques, l'INSEE, et l'organisme européen Eurostat, sur les 2,5 milliards en jeu. Cela me permet de répondre au passage à la remarque du rapporteur général.

Notre évaluation – c'est la jurisprudence de l'INSEE – est que ce montant ne peut pas être considéré comme une dépense budgétaire qui grèverait le déficit public. Nous l'avons notifiée telle quelle, en suivant l'avis officiel de l'INSEE. Eurostat a une évaluation différente. L'institut européen estime que l'ensemble de l'opération peut être considéré comme une dépense publique ayant un impact sur le déficit public à hauteur de 4,8 milliards. Cette évaluation intègre intègre l'ensemble de l'opération liée à la restructuration de la filière nucléaire française et non pas seulement les 2,5 milliards.

Nous avons ainsi une vraie divergence, que j'assume totalement. Je considère que l'analyse de l'INSEE est la bonne. Si jamais les discussions devaient aboutir dans un sens favorable à la position d'Eurostat, le déficit public devrait être relevé, non de l'intégralité des 4,8 milliards, mais bien des 2 5 milliards que vous avez indiqués, étant donné que le déficit est ressorti à 2,6 % du produit national brut. Le retour sous les 3 % ne serait en tout cas pas remis en cause. Il n'empêche que j'ai du mal à comprendre les arguments d'Eurostat. Nous continuerons donc à défendre la position qui nous a été donnée par l'INSEE sur le calcul de cette recapitalisation. Pour nous, elle ne doit pas toucher le déficit public et ne peut pas être considérée comme une dépense budgétaire.

Je vous confirme, madame Rabault, que le rapport sera bien remis le 30 juin et que vous aurez ainsi toutes les indications que vous souhaitez.

Le fonds pour l'innovation de rupture sera un investissement en obligations assimilables du Trésor (OAT), financé à hauteur de 10 milliards par le produit de cessions d'actifs. Aujourd'hui, il est financé par des participations d'EDF, mais elles ont un défaut : leur rendement n'est pas stable. Or, nous devons garantir aux Français que ce fonds produira un revenu annuel de 200, 250 ou 300 millions, permettant de financer des projets d'innovation. Sur dix ans, cela représente des montants importants de l'ordre de 2,5 à 3 milliards, qui nous permettront de garder notre place dans le financement de l'innovation de rupture. C'est un enjeu stratégique, et c'est la stabilité de la ressource qui fait son caractère stratégique à mes yeux. Nous aurons l'occasion d'en reparler dans les semaines et les mois à venir.

S'agissant de la Grèce, vous avez raison de souligner que la France et l'Allemagne sont les deux États qui ont pris l'engagement de reverser au Mécanisme européen de stabilité les excédents qu'ils pouvaient toucher, et de rétrocéder à la Grèce les intérêts excédentaires. Il faut bien distinguer cette décision prise par la France et par l'Allemagne des bénéfices que la Banque centrale européenne a pu toucher sur les intérêts de la dette grecque. Une discussion est en cours dans le cadre de la BCE et de l'Eurogroupe sur les titres du deuxième programme monétaire, portant sur la possibilité d'un remboursement à la Grèce des bénéfices de la BCE. Mais les remboursements se feront via la BCE, par la Grèce et pas par le MES.

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