Intervention de Philippe Chassaing

Réunion du jeudi 7 juin 2018 à 9h05
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Chassaing, rapporteur spécial :

Mon intervention va porter essentiellement sur le programme 305 qui concerne les moyens de la direction générale du Trésor et la direction de la législation fiscale. Il regroupe essentiellement deux types de dépenses : la rémunération des prestations réalisées par la Banque de France pour le compte de l'État, et les crédits de personnel de la DGT et de la DLF.

La Banque de France réalise certaines prestations pour le compte de l'État, en particulier le secrétariat des commissions de surendettement, qui représentent une grande partie du coût de ces prestations. Afin d'en compenser le coût, la Banque de France reçoit une rémunération de la part de l'État qui s'établit à 249 millions en 2017. Or, l'exécution 2017 prolonge une tendance de baisse de la compensation accordée par l'État à la Banque de France, observée depuis 2013, et qui a abouti à une sous-compensation du coût supporté par la Banque de France. Cette sous-compensation a conduit en retour la Banque de France à appliquer depuis 2014 une retenue sur les dividendes versés à l'État l'année suivante. L'État a lui-même accepté cette minoration par un courrier daté d'octobre 2016. Or cet accord, contrevenant aux principes budgétaires d'universalité et de non-contraction des recettes et des dépenses, constitue un contournement de la norme de dépense.

Avez-vous prévu de mettre fin à une telle situation afin d'assurer le respect des principes essentiels du droit budgétaire ?

L'activité des commissions de surendettement est importante, avec près de 180 000 dossiers traités en 2017. Ce nombre connaît néanmoins une baisse tendancielle depuis 2014. L'importance des coûts représentés par le secrétariat des commissions de surendettement se traduit dans les indicateurs de performance du programme 305, puisque l'objectif numéro quatre, décliné en trois indicateurs, vise à assurer un traitement efficace du surendettement. Les trois indicateurs prévus sont la capacité de la Banque de France à traiter dans les meilleurs délais un dossier de surendettement ; la proportion des mesures permettant un apurement total et définitif de la situation de surendettement ; et l'efficience du traitement des dossiers de surendettement.

Or, la performance du traitement des dossiers de surendettement par la Banque de France est contrastée. Si le nombre de dossiers traités par agent augmente, le délai de traitement et le coût par dossier augmente également. L'administration explique ces écarts par le stockage de 20 000 dossiers pour tenir compte des lois « Sapin 2 » et « modernisation de la justice » de fin 2016. Néanmoins, madame la ministre, au regard de l'évolution du coût du traitement d'un dossier de surendettement, qui progresse de près de 20 % en trois ans, possédez-vous des éléments permettant d'expliquer une telle évolution ?

Par ailleurs, afin de mieux appréhender la nécessaire évolution du réseau de la Banque de France, nous avions proposé de développer de nouveaux indicateurs de performance à l'occasion du PLF 2018. En particulier, un indicateur mesurant le nombre de dossiers traités par site apporterait une meilleure visibilité de la productivité de chaque centre. De même l'indicateur relatif au coût complet du traitement de dossier de surendettement gagnerait à être décomposé selon la nature et les coûts, distinguant par exemple les charges de personnel, le coût informatique et le coût immobilier.

Vous avez mené une réflexion en ce sens, madame la ministre, afin d'améliorer le pilotage des dépenses du programme pour la performance. Par ailleurs, il convient de noter que le traitement du surendettement induit des coûts autres que ceux couverts par les commissions de surendettement, en particulier quand les décisions des commissions aboutissent à l'effacement de créances publiques. Ces coûts complets pour les comptes publics ne font pas l'objet d'une évaluation d'ensemble. La Cour des comptes a seulement pu relever que le montant total des dettes fiscales dans les dossiers définitivement traités atteignait 232 millions en 2016, sans préciser la part des montants annulés. Disposez-vous d'une évaluation du coût que représentent les effacements de créances publiques dans le cadre des commissions de surendettement ?

La Banque de France a par ailleurs annoncé un plan ambitieux d'évolution de son réseau afin d'en réduire le coût. La fermeture de l'ensemble des succursales infradépartementales autorise ainsi une cible d'effectifs d'environ 3 700 ETP en 2020 pour l'ensemble du réseau de la Banque de France, contre 6 000 en 2013. Les effectifs mobilisés par le secrétariat des commissions de surendettement en 2017 sont ainsi en baisse de 14 % par rapport à 2016, et atteignent 1 073 ETP. De plus, l'ouverture de centres de traitement partagé conduit à une cible de 900 ETP d'ici 2020. Les effectifs devraient donc continuer à diminuer et s'établir autour de 750 en 2020, soit une économie de l'ordre de 25 millions d'euros sur le coût de la prestation.

Quels éléments, pouvez-vous nous fournir sur l'état d'avancement de la modernisation du réseau des implantations de la Banque de France ? Des actions ont-elles été menées afin d'améliorer l'efficience de gestion du secrétariat des commissions de surendettement ?

Plus largement cette question nous a amenés à nous intéresser à la politique de prévention du surendettement. À cet égard, la proposition de créer un fichier positif recensant tous les crédits à la consommation accordés aux particuliers revient régulièrement. Au regard du droit à la protection de la vie privée, le Conseil constitutionnel avait censuré le dispositif de registre national des crédits aux particuliers prévu dans la loi de 2014 relative à la consommation, dite « loi Hamon ».

Néanmoins, d'autres propositions existent. En particulier, la Cour des comptes propose la constitution d'un fichier d'alerte sur la détention de multiples crédits à la consommation, afin de mieux prévenir le surendettement lié au crédit à la consommation. Ce fichier serait centré sur les seuls crédits à la consommation, il serait interrogé à l'occasion de toute souscription d'un crédit à la consommation. Il permettrait d'alerter le créancier au-delà du quatrième crédit à la consommation, afin d'éviter que les emprunteurs fragiles ne souscrivent le crédit de trop.

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