Intervention de Marc Andéol

Réunion du mercredi 6 juin 2018 à 14h00
Commission d'enquête sur les maladies et pathologies professionnelles dans l'industrie risques chimiques, psychosociaux ou physiques et les moyens à déployer pour leur élimination

Marc Andéol, coordinateur de l'Association médicale pour la prise en charge des maladies éliminables (APCME) :

Nous avons de très bonnes relations avec l'inspection du travail. Par ailleurs, la direction régionale des entreprises, la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) et l'agence régionale de santé (ARS) ont soutenu notre programme. Les institutions sont donc des partenaires sans lesquels le développement de ce programme n'aurait pas pu se faire.

Les données sont-elles comparables ? Il s'agit là d'un terrain glissant, car ce sont en général des petits groupes de populations très exposés. Il convient donc d'être très prudents dans les comparaisons.

Par exemple, il existe d'importances différences techniques entre les hauts fourneaux de Fos-sur-Mer et ceux de Dunkerque ; l'exposition au risque est plus importante à Fos-sur-Mer qu'à Dunkerque. Lorsqu'on s'engage dans des comparaisons, il faut toujours tenir compte des spécificités locales.

Néanmoins, du point de vue des comparaisons que je qualifierai d'indiciaires, avec les statistiques nationales de l'assurance maladie, il est possible de dire que, dans notre clientèle, la maladie professionnelle la plus prégnante est la surdité, alors qu'elle ne représente que 2,3 % des cas indemnisés par l'assurance maladie. Ce qui veut dire qu'il existe un énorme problème de signalement et de déclaration des cas de surdité. Je pourrai reprendre les propos d'un médecin généraliste qui disait, avec humour : « Quand un patient est sourd, eh bien je hausse la voix »…

On observe un phénomène extrêmement préoccupant pour ce qui concerne les cancers : les statistiques nationales de l'assurance maladie nous disent que 80 % d'entre eux sont imputables à l'amiante, un facteur de risque qui serait aujourd'hui éradiqué des établissements. Cependant, l'indemnité que touchera un salarié pour un cancer de l'amiante est sans proportion avec l'indemnité versée pour un cancer aux HAP de la cokerie de Fos-sur-Mer. Les cancers de l'amiante étant imputés au compte spécial – c'est-à-dire que tout le monde paie –, un mécanisme pervers s'est mis en place, qui fait que la grande majorité des cancers est enregistrée sous la rubrique amiante, car il y a eu de l'amiante à la cokerie. Or, les 150 cas de cancer déclarés par l'APCME ont une cause très diverse. Cependant, quand un salarié a été exposé à l'amiante et aux HAP, par exemple, nous le déclarons dans la rubrique « amiante » pour ne pas réduire son indemnisation.

Lorsqu'un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), il y a quelques années, indiquait que les données de l'assurance maladie faisaient obstacle aux politiques de prévention, il ne s'agissait pas d'une simple formule de style.

Pour faire de la prévention, il est indispensable de connaître le risque effectif. Or nous avons une représentation fausse du risque effectif. Les accidentologues appellent cela des erreurs de représentation, et elles sont dramatiques. Car si la représentation que nous avons du problème est fausse, on aura beau déployer un comportement vertueux, on se retrouvera dans le mur.

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