Intervention de Clémentine Autain

Séance en hémicycle du mardi 19 juin 2018 à 15h00
Autonomie fiscale des collectivités territoriales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClémentine Autain :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général du budget, mes chers collègues, dans le cadre des politiques de décentralisation territoriale, les transferts de compétences entre l'État et les collectivités territoriales se sont multipliés. La réforme constitutionnelle du 28 mars 2003 prévoit qu'aucun transfert de compétences entre l'État et les collectivités locales ne devrait avoir lieu sans un transfert des ressources correspondantes. En pratique, malheureusement, la situation est assez différente puisque l'État ne fournit pas aux collectivités locales les moyens nécessaires à la prise en charge ces compétences transférées. En réalité, l'État leur demande toujours plus tout en leur accordant toujours moins de moyens.

Je prendrai comme premier exemple le département de la Seine-Saint-Denis, où le transfert de la compétence en matière de revenu de solidarité active – RSA – s'est accompagné des moyens correspondants. Puis, les années suivantes, le nombre de demandes de RSA a explosé – comme celui d'autres allocations, d'ailleurs – , et le département de la Seine-Saint-Denis a dû couvrir le reste à charge. Très concrètement, dans notre département, le RSA est versé à 100 000 bénéficiaires. Si l'on ajoute l'allocation personnalisée d'autonomie et la prestation compensatoire du handicap, on atteint un manque à gagner de 238 millions d'euros pour 2017. Nous sommes là face à une véritable hypocrisie !

Je prendrai comme deuxième exemple la commune de Tremblay-en-France, où de nombreuses charges ne sont toujours pas compensées par l'État. Le maire de la ville, François Asensi, évalue les dépenses afférentes à près de 3,5 millions d'euros. C'est là un désengagement de l'État, dans des domaines pourtant fondamentaux et même régaliens, tels que la désertification médicale et la tranquillité publique.

Pour remédier à la difficulté d'obtenir un rendez-vous médical, la ville de Tremblay-en-France a développé une action volontariste en mettant en place un centre de santé qui délivre près de 30 000 rendez-vous par an et permet à 7 000 patients d'avoir accès à des soins de santé. Ces services, c'est l'État qui devrait les prendre en charge !

De même, depuis 2010, 700 postes de policier – il s'agit ici la police nationale – ont été supprimés dans notre département, avec des effets indéniables. J'entends régulièrement des témoignages de femmes qui appellent le commissariat pour des violences conjugales et s'entendent répondre qu'il n'y a ni véhicule ni agents disponibles. C'est un problème grave non seulement pour les femmes, mais aussi du point de vue de l'égalité territoriale. Malgré la baisse des dotations de l'État, on a tenté, à Tremblay-en-France, de répondre à la difficulté en doublant les effectifs de police municipale afin d'assurer la tranquillité des habitants. La municipalité a pallié la défaillance, voire la faillite de l'État, je le répète, sans transfert des ressources correspondantes.

J'évoque le département de Seine-Saint-Denis parce que j'y suis élue et parce que l'on y mesure particulièrement bien cette faillite, mais la question se pose à l'échelle nationale. Je vois très précisément les conséquences du désengagement de l'État.

Malheureusement, le quinquennat qui s'ouvre non seulement ne fait pas exception, mais a déjà commencé à aggraver la situation. En effet, le Gouvernement a décidé de faire peser l'essentiel de la réduction des déficits publics sur les collectivités territoriales, à hauteur de 13 milliards d'euros sur cinq ans. Un des outils privilégiés est la réduction drastique des dotations aux collectivités territoriales. Elle est en marche !

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