Intervention de Sibyle Veil

Réunion du mercredi 13 juin 2018 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Sibyle Veil, présidente-directrice générale de Radio France :

Madame Dumas, un rapport d'expertise très important du chantier de la Maison de la radio a été réalisé en 2017. Il était d'autant plus important que le chantier de réhabilitation s'inscrit dans le cadre de marchés soumis aux règles de la commande publique. Comme pour beaucoup de chantiers publics en France, ces règles nous obligent à faire des montages contractuels ayant une incidence sur les conditions d'exécution des travaux. Le rapport d'expertise a examiné une première série de scénarios consistant à continuer de recourir à des marchés dont le contenu était de plus en plus éloigné de la réalité des travaux. Une deuxième série de scénarios consistait à résilier ces marchés. L'une des différences entre ces scénarios concernait les aspects juridiques que l'expert a travaillés pour déterminer leur impact sur le calendrier et le coût global du chantier. L'expert a recommandé d'opter pour un scénario de continuité des marchés en cours. C'est le choix qui a été validé par le conseil d'administration de Radio France en février dernier.

Sur le fondement de cette approbation par le conseil d'administration, le maître d'oeuvre, qui est l'architecte, a été missionné pour faire des études de déroulement jusqu'à la fin de l'opération, c'est-à-dire jusqu'à la dernière phase du chantier de réhabilitation. Cela devrait nous permettre de préciser à la fois le calendrier et les enveloppes financières. L'expert, dans son rapport, avait fait différentes estimations de manière à avoir des critères de distinction entre les scénarios mais le travail consistant à affiner des enveloppes financières, permettant à l'entreprise de s'engager sur ces enveloppes, est en cours. Nous devrions avoir à l'automne prochain des éléments robustes sur le montant global des travaux couvrant l'ensemble des phases de ceux-ci et notamment la dernière phase – la phase 3 – dont les conditions d'exécution ont fait l'objet du rapport de M. Jean-Pierre Weiss. Concernant la diffusion du rapport, je laisserai l'État se prononcer : puisque c'est lui qui a nommé un expert, le rapport lui appartient.

La confiance dans nos médias, la déontologie, l'honnêteté de l'information et le pluralisme sont des questions extrêmement importantes pour un média comme le nôtre. Quand il n'y a plus de confiance, nous perdons notre lien avec les auditeurs. C'est un élément structurant de notre identité et de la qualité de ce que l'on produit. Radio France a mis en place des références internes, une charte reconnue par la profession et un médiateur qui s'occupe chaque semaine de questions de traitement de l'information et de déontologie. Nous participons également à un observatoire de la déontologie et de l'information qui organise des discussions sur les pratiques déontologiques. L'ensemble de ces pratiques sont surveillées par le CSA, qui a la responsabilité de veiller à la déontologie et à la manière dont l'information est traitée. Le cadre dans lequel nous opérons fait l'objet d'une grande vigilance au sein de Radio France : c'est, pour nos auditeurs, une question de confiance, sur laquelle nous ne pouvons absolument pas transiger.

Je remercie Mme Liso d'avoir rappelé les excellents chiffres de France Bleu Nord. C'est en effet une station très dynamique dont l'audience est très forte. Les relations sur place avec les équipes de France 3 sont plutôt positives. Je l'ai vu très récemment quand je me suis rendue dans la station locale – j'en ai visité quatre depuis ma nomination. La réflexion avec les équipes de France 3 sur la manière de travailler ensemble est très constructive. Certains projets vont voir le jour pour donner plus de visibilité aux manifestations sportives locales, ce qui me paraît très positif pour tous les citoyens de Lille et de ses environs.

La personnalisation des contenus est un enjeu auquel je crois beaucoup. L'évolution des offres de télévision, avec le développement de Netflix et le bouleversement auquel il a conduit dans la manière de consommer des contenus – de fiction, notamment –, crée de nouvelles habitudes de consommation. Nous voulons avoir le choix du moment et du contenu. Nous voulons être dans une démarche beaucoup plus active et plus personnalisée. C'est la raison pour laquelle nous travaillons beaucoup, à Radio France, à ce que l'on appelle la radio sur mesure. Cela nécessite beaucoup d'innovations techniques dans l'infrastructure mais aussi dans le traitement des données d'usage ou métadonnées. Cela soulève des enjeux de professionnalisation et d'investissements techniques très importants ainsi que d'innovations technologiques sur lesquelles nous devons travailler avec de nombreuses start-up. C'est pourquoi Radio France est présente à Station F, dans le cadre de la French Tech. Nous allons conclure un partenariat avec un incubateur de start-up de médias, et travaillons aussi avec une start-up israélienne sur la manière de mettre en images la radio. Le champ d'innovation est très important et nous offre l'occasion de travailler avec tout un écosystème de petites entreprises et de conclure des partenariats féconds.

Un autre domaine dans lequel la coopération avec les autres acteurs de l'audiovisuel public est importante est la gestion des données. On l'a vu ces derniers mois avec la question soulevée par l'affaire Cambridge Analytica sur Facebook. La question de la gestion des données se pose avec l'évolution du numérique et des nouvelles offres de service proposées au citoyen. En tant qu'entreprise de service public, nous devrons être exemplaires dans la gestion de ces données et nourrir des réflexions croisées avec les autres entreprises de service public. Nous réfléchissons ainsi à la manière de mettre en application le règlement général sur la protection des données (RGPD) avec les autres entreprises du secteur public audiovisuel.

Je me réjouis que le CSA nous ait permis d'étendre la diffusion de France Bleu Toulouse, désormais rebaptisée France Bleu Occitanie. Il faut qu'on bâtisse un projet éditorial à la hauteur de cette extension du bassin de diffusion. C'est un enjeu très stimulant pour nos équipes. Les discussions avec France 3 pourront également être un facteur de construction d'une offre nouvelle à plus grande échelle.

Mme Mörch a évoqué le rôle que doit jouer la radio dans l'éducation aux médias. Radio France, avec ses différentes antennes, tient compte de cet enjeu croissant depuis plusieurs années. Nous en avons déjà parlé à propos du problème des fausses informations. Il faut éduquer les Français à la manière de rechercher de l'information. Nous y avons beaucoup travaillé à France Inter dans le cadre du projet InterClass' qui consiste à aller dans les banlieues construire de l'information avec des jeunes au collège et au lycée. Nous le faisons aussi dans le cadre de la semaine de la presse et des médias à l'école. Au sein du réseau France Bleu, nous avons monté un projet intitulé « Mon micro citoyen » dans le cadre duquel on apprend aux jeunes à créer une offre d'information. Mouv' l'a fait aussi, en se rendant dans des établissements scolaires dans les banlieues. Cette présence me paraît essentielle pour toucher les jeunes et leur apporter une connaissance de nos médias, de la manière dont ils jouent leur rôle et font leur travail et de l'importance d'aller chercher les bonnes sources. Il faut aller encore plus loin au cours des prochaines années et donner une cohérence aux multiples initiatives qui ont vu le jour, afin de leur faire gagner en visibilité. Il nous faut essayer d'organiser intelligemment notre présence sur le territoire – nos forces n'étant pas extensibles.

FIP est une antenne très aimée de ses auditeurs, dont nous recevons chaque semaine énormément de courrier. Elle est diffusée dans dix villes et est écoutée en numérique sur le reste du territoire. Parmi ces dix villes, certaines sont pourvues d'une animation locale nourrissant l'antenne avec un agenda culturel. Cette animation locale reflète ainsi les manifestations culturelles de quatre agglomérations. Notre objectif est d'essayer d'élargir cette dimension de prescription culturelle et de visibilité de l'agenda culturel en étant présents non seulement dans ces quatre agglomérations mais plus largement sur le territoire et notamment, dans les dix villes où FIP est émise par voie hertzienne. L'une des évolutions auxquelles nous travaillons avec la directrice de FIP et les animatrices locales consiste à diviser l'offre en quatre grandes régions et à faire que l'animation locale soit assurée à cette échelle beaucoup plus large. Il s'agit donc de faire évoluer l'organisation de FIP pour avoir une animation locale qui soit pensée de manière plus large sur le territoire et qui puisse nourrir l'offre numérique. Nous allons essayer de donner au plus grand nombre de nos auditeurs accès à cet agenda culturel, dimension qui est plébiscitée dans les quelques villes où elle existe aujourd'hui.

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