Intervention de Boris Vallaud

Réunion du mercredi 20 juin 2018 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBoris Vallaud :

Il y a deux semaines, un de nos collègues a déclaré au sein de cette commission, en réponse à des amendements déposés par les groupes GDR et Nouvelle Gauche visant à supprimer l'article 30 de la loi « avenir professionnel », que cette disposition était une avancée démocratique dans la mesure où il reviendrait désormais au Parlement de voter chaque année un impôt affecté à l'assurance chômage. Le projet de rapport qui nous a été adressé relativise, voire contredit cette affirmation. Le vote d'un impôt affecté à l'assurance chômage appellerait des précautions toutes particulières que le Gouvernement semble en passe de supprimer en ce qui concerne notamment le budget de la sécurité sociale. La question qui se pose est celle de la place et du rôle que l'on accorde aux partenaires sociaux, comme Olivier Véran le rappelle très justement dans son avis. Je crois que nous devons nous garder d'affaiblir les partenaires sociaux, comme beaucoup de textes l'ont fait depuis un an.

Par ailleurs, notre rapporteur souligne très justement la duplicité du projet de loi constitutionnelle sur au moins deux points. Il y a en apparence une augmentation du temps imparti à l'examen du PLFSS, mais le Gouvernement s'attribue en réalité plusieurs semaines supplémentaires sur le dos des parlementaires. J'invite chacun d'entre nous, en particulier les collègues de la majorité, à regarder avec beaucoup d'attention l'amendement du rapporteur qui vise à instaurer un délai minimal de quatre semaines entre le dépôt du PLF et du PLFSS et leur examen. Le projet de rapport souligne également l'absence de réponse du Gouvernement sur la procédure qui sera mise en place dans le cadre de la loi organique pour l'examen conjoint du PLF et du PLFSS. Selon le rapporteur, le Gouvernement a tout de même indiqué clairement ses intentions sur un sujet : il n'est « pas disposé à laisser le Parlement se substituer à lui dans sa fonction d'arbitrage des grands équilibres financiers ». Comme le note fort justement Olivier Véran, si un tel propos peut s'entendre pour ce qui est du budget de l'État, cela constitue en revanche une dérive en ce qui concerne la sécurité sociale et les organismes sociaux.

Notre rapporteur démontre scrupuleusement que la méthode choisie par le Gouvernement pour conduire cette réforme empêche le Parlement d'amender la loi organique sur les sujets qui nous intéressent directement. Le silence du projet de loi organique qui nous est soumis en parallèle prive le Parlement de toute possibilité d'initiative compte tenu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur les cavaliers législatifs.

Ceux de nos collègues qui n'auraient pas d'autre boussole que les économies se laisseront peut-être convaincre par ce que rappelle notre rapporteur sur la gestion financière du budget de la sécurité sociale : elle est bien meilleure que celle du budget de l'État. La dette de la sécurité sociale représente 50 % des recettes annuelles, contre 700 % pour la dette de l'État.

Avec cette réforme, le Gouvernement ne nous demande pas de signer un chèque en blanc, mais tout un carnet de chèques, afin de réduire encore le temps de travail du Parlement sur le PLF et le PLFSS, de pouvoir décider seul de l'organisation des discussions budgétaires, à son seul profit, d'instaurer une procédure qui ouvre la porte à une confusion entre le consentement à l'impôt et la solidarité reposant sur les cotisations, et d'affaiblir encore davantage les partenaires sociaux, sans renforcer pour autant les pouvoirs du Parlement.

Le basculement en cours de l'assurance chômage vers la CSG et la tentative de confusion entre l'examen du PLF et du PLFSS ne constituent pas des progrès démocratiques. Nous partageons l'analyse du rapporteur, mais nous en concluons qu'il faudra rejeter ce projet de loi constitutionnelle.

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