Intervention de Huguette Bello

Réunion du mardi 26 juin 2018 à 16h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHuguette Bello :

Mon intervention portera surtout sur les articles 15 et 17 du projet de loi. La grande innovation de ce texte est la généralisation du droit à la différenciation pour toutes les collectivités territoriales de la République, qui disposeront désormais d'un pouvoir normatif dans les matières relevant de leurs compétences. Cette révision constitutionnelle étend ainsi, pour partie, à l'article 72, la décentralisation normative imaginée en 2003 pour les collectivités d'outre-mer visées à l'article 73. Elles peuvent adopter, pour leur territoire, des règles normatives dans le domaine de la loi, à l'exception notable de La Réunion.

Le projet de loi maintient, pour l'instant, cette exception. En ce qui concerne La Réunion, la rédaction qui nous est proposée pour l'article 72 et celle de l'actuel article 73 sont identiques, aux procédures d'habilitations près : ce sont des frères jumeaux. À la suite de ce que le président de la région a déclaré, il se répète à l'envi que le nouvel article 72 est bienvenu et suffisant, car il offre « de vraies marges de manoeuvre à La Réunion ». Il faut rappeler que celles-ci lui ont été offertes il y a quinze ans, lors de la révision de 2003. Notre préoccupation est précisément de ne pas revivre le scénario de cette époque : le débat a été tronqué et le dénouement est intervenu en dehors du Parlement. Cette stratégie « hors les murs » ne va pas dans le sens du temps long que toute révision constitutionnelle requiert. Elle est aussi la source de bien des dérives. Il y a quelques jours, quatre députés réunionnais ont été assimilés à des putschistes pour avoir commis le forfait de déposer un amendement à l'article 17 du projet de loi. L'expérience des quinze dernières années, les nouveaux enjeux du développement, le revirement de la doctrine européenne, mais aussi la nouvelle rédaction de l'article 72 plaident avec force et évidence pour un amendement supprimant la disposition qui limite le champ d'action de La Réunion.

Le Gouvernement a posé une condition avant tout passage à l'acte : qu'il existe un consensus au sein des parlementaires réunionnais. Nous y avons travaillé : 5 députés sur 7 et 2 sénateurs sur 4 sont aujourd'hui favorables à une évolution. Mieux encore, 4 d'entre nous ont pris la précaution d'y assortir un dispositif garantissant le maintien de la région et du département, afin de pas susciter un débat institutionnel sur la question d'une assemblée unique. Notre proposition a par ailleurs recueilli l'assentiment de la délégation aux outre-mer de notre assemblée.

On voit bien aujourd'hui que toutes les vieilles ficelles sont de retour, même si ce sont parfois de jeunes marionnettistes qui les utilisent. Même notre Constitution en fait l'expérience.

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