Intervention de Hélène Vainqueur-Christophe

Réunion du mercredi 27 juin 2018 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHélène Vainqueur-Christophe :

L'amendement CL845 a pour objet de supprimer le mot « race » de notre Constitution, qui consacre en effet l'usage d'un terme dont l'application à l'espèce humaine est non seulement fausse mais surtout choquante et dangereuse. Utilisé pour signifier la différence entre les groupes humains, ce terme s'attache à des caractères apparents, le plus souvent visibles. En tout état de cause, le concept biologique de « race » n'est pas opérant pour l'espèce humaine, comme le reconnaissent l'ensemble des scientifiques. Supprimer le support qu'est le mot ne supprime évidemment pas le discours mais lui ôte la légitimité qu'il pourrait puiser dans la loi fondamentale. En effet, lorsque la Constitution interdit à la loi d'établir une distinction selon « la race », elle légitime paradoxalement l'opinion selon laquelle il existe des races humaines distinctes.

Même si ce terme avait une importance juridique dans notre arsenal législatif, sa suppression n'entraînerait aucune régression de notre droit puisque tout juge peut et doit appliquer l'ensemble de celui-ci, au sommet duquel figure le bloc de constitutionnalité. Ainsi, si la suppression de ce terme dans l'article 1er avait l'inconvénient de réduire l'arsenal antiraciste de notre droit, le bloc de constitutionnalité, dont font notamment partie le Préambule de 1946 et la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen depuis la décision du Conseil constitutionnel de 1971 relative à la liberté d'association, permettrait de se prémunir contre toute régression juridique. De plus, le juge pourrait toujours se fonder sur les dispositions figurant dans des textes de valeur supra législative, c'est-à-dire le bloc de constitutionnalité et le droit international, dont la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH), pour incriminer un acte à caractère raciste.

Enfin, pour être certain que cette suppression n'entraîne pas de régression dans la lutte contre le racisme, il est proposé de remplacer le mot « origine » par le mot « origines ». Le pluriel permet en effet d'incriminer toutes les sortes de discrimination, qu'elles soient liées à l'origine ethnique, génétique ou culturelle. En outre, afin d'affirmer le principe de non-discrimination entre les femmes et les hommes, nous proposons d'ajouter, après le mot : « origines », le mot : « sexe ».

Mes deux amendements suivants déclinent des solutions de substitution. L'un prévoit d'inscrire « d'origines, de genre » et l'autre « d'origines » dans le premier alinéa de l'article 1er de la Constitution.

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