Intervention de Jacqueline Gourault

Séance en hémicycle du jeudi 5 juillet 2018 à 15h00
Transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes — Présentation

Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'état, ministre de l'intérieur :

Toutefois, le Gouvernement a mené un travail de concertation et a entendu la diversité des situations dans la mise en oeuvre de la compétence. Après un travail de concertation, sur lequel je ne reviens pas, et après la première lecture, le Gouvernement a reconnu la diversité des situations sur le terrain, qui appellent des solutions différenciées. C'est par exemple le cas de certaines communes rurales isolées ou des communes de montagne, qui bénéficient de circonstances naturelles très particulières, soit parce que le périmètre de l'intercommunalité est couvert par plusieurs bassins-versants, soit parce que la commune est très éloignée des réseaux existants sur le territoire.

Nous avons donc travaillé collectivement à trouver un texte de compromis, qui concilie les enjeux d'un nécessaire transfert avec ceux, légitimes, d'une adaptation à certaines réalités locales. C'est le sens de la mission que m'a confiée le Premier ministre et qui a abouti à la proposition d'une clause de sauvegarde des libertés communales.

Cette clause de sauvegarde des libertés communales donne la possibilité aux communes appartenant à des communautés de communes de s'opposer au transfert des compétences eau et assainissement avant le 1er juillet 2019, si 25 % d'entre elles représentant au moins 20 % de la population s'expriment en ce sens. Cette capacité de blocage s'exerce jusqu'au 1er janvier 2026, date à laquelle le transfert devient obligatoire.

Cette possibilité est réservée aux communautés de communes car, d'une part, ce sont elles qui couvrent majoritairement les zones de montagne et les zones rurales et, d'autre part, parce que les communautés d'agglomération ont déjà, dans leur majorité, effectué le transfert de ces compétences ou sont en train de le préparer.

Les vraies difficultés de transfert se concentrent sur l'eau, et non sur l'assainissement, comme je l'ai dit tout à l'heure. Ce constat nous a conduits à proposer que les élus locaux puissent transférer la compétence assainissement dès le 1er janvier 2020, et qu'ils puissent se donner, via la capacité de blocage, un délai supplémentaire pour transférer l'eau s'ils n'y sont pas prêts.

Enfin, nous avons entendu les difficultés liées au mécanisme de représentation-substitution dans les syndicats, pour les communautés de communes. Nous avons fait et nous faisons de nouveau la proposition de ne pas limiter ce mécanisme à un périmètre jugé trop contraignant, en supprimant le seuil de trois établissements publics de coopération intercommunale – EPCI. Ce mécanisme pourra donc jouer sans condition de taille pour garantir la pérennité des structures existantes, c'est-à-dire des syndicats. Je me réjouis que le Sénat ait fait sienne cette proposition.

L'ensemble de ces dispositions forment donc un texte équilibré, fruit d'un compromis. Elles constituent la base de la position du Gouvernement, à laquelle il s'est tenu et continuera de se tenir pendant les débats parlementaires. Je me félicite donc que la commission ait rétabli le texte issu de l'Assemblée nationale. Je vous en remercie, madame la rapporteure.

Le débat parlementaire a également fait émerger de nouveaux sujets, à propos desquels je m'étais engagée, sur les bancs du Sénat, à apporter des réponses au cours de la navette parlementaire. Je veux d'abord parler de la gestion des eaux pluviales. Elle constitue un enjeu important, à la convergence de plusieurs champs d'action des collectivités territoriales et de leurs groupements, tels que l'assainissement, la voirie, voire, en certaines circonstances, la gestion des milieux aquatiques et à la prévention des inondations – GEMAPI.

Dans son rapport au Parlement, prévu par les dispositions de l'article 7 de la loi relative à l'exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la GEMAPI, le Gouvernement a souligné la diversité des moyens techniques pouvant être mobilisés pour assurer une gestion efficiente des eaux pluviales et de ruissellement, ainsi que les liens entretenus avec la compétence « assainissement », « voirie », ou « GEMAPI ». Il ressort de ces éléments la nécessité de concilier la clarification juridique de la répartition des compétences exercées par les collectivités territoriales et la souplesse utile à la mise en oeuvre de ces compétences. Il apparaît donc opportun de définir une compétence relative à la gestion des eaux pluviales urbaines qui puisse être identifiée de manière distincte.

Le Conseil d'État assimile la gestion des eaux pluviales urbaines à un service public relevant de la compétence « assainissement » lorsque cette dernière est exercée de plein droit par un EPCI. Cette compétence s'exerce dans les zones urbanisées et à urbaniser, lesquelles peuvent à leur tour se définir, pour l'application des dispositions de la loi relative à la gestion des eaux pluviales, comme celles couvertes par un document d'urbanisme.

Ce rattachement fait pleinement sens dans les zones urbanisées, souvent dotées d'une forte proportion de réseaux unitaires – je pense aux communautés urbaines et aux métropoles. C'est d'ailleurs l'état présent du droit.

Pour les communautés de communes, cependant, le Gouvernement comprend qu'il soit nécessaire de faire de la compétence « eaux pluviales urbaines » une compétence facultative, pour des raisons de meilleure adaptation à la diversité des situations rencontrées sur le terrain. Cela doit conduire effectivement, comme certains amendements que nous allons examiner le proposent, à en faire une compétence distincte de la compétence « assainissement », qui doit pour sa part être exercée obligatoirement au niveau intercommunal.

Je veux également évoquer le cas des conditions de la minorité de blocage pour les communes ayant déjà transféré l'assainissement non collectif à leur communauté de communes. Souvent, dans la ruralité, le service public d'assainissement non collectif – SPANC – a spontanément été organisé au niveau des communautés de communes. Le transfert, de manière facultative, de l'assainissement non collectif est très présent dans le monde rural, puisque plus de la moitié des communautés de communes exerçant la compétence assainissement non collectif n'exercent pas la compétence assainissement collectif.

La loi NOTRe, en prévoyant un bloc de compétences indissociable, conduisait à ce que les communes membres de communautés de communes exerçant une partie de la compétence ne pouvaient bénéficier de la faculté de blocage. Nous avons entendu cette contradiction et nous serons donc favorables à ce que les communes puissent, en utilisant la minorité de blocage, exercer l'assainissement collectif au niveau communal et l'assainissement non collectif au niveau de la communauté de communes, jusqu'en 2026, au maximum. Il est en effet limité et justifié par les caractéristiques particulières de l'organisation de l'assainissement non collectif.

Vous l'avez compris, c'est avec détermination que nous devons aborder ce débat aux conséquences importantes pour l'ensemble de nos communes et de nos intercommunalités et pour l'ensemble des Français, peu importe leur lieu d'habitation. C'est aussi un enjeu d'organisation de nos collectivités locales et, comme vous le voyez, le Gouvernement a entendu certaines de leurs préoccupations.

Après les heures de débat avec les associations d'élus, après les heures de débat au sein de chacun des hémicycles, je crois que nous avons pris en compte la diversité des situations et apporté de la souplesse dans l'application de la loi. C'est donc avec réalisme et efficacité que nous abordons cette discussion, et j'espère qu'elle aboutira rapidement. Comme vous le savez, le choix devra être fait avant le 1er juillet 2019, c'est-à-dire dans un an. Plus tôt la loi sera adoptée, mieux ce sera.

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