Intervention de Nicole Belloubet

Séance en hémicycle du mardi 10 juillet 2018 à 22h15
Démocratie plus représentative responsable et efficace — Discussion générale

Nicole Belloubet, garde des sceaux :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je ne dirai que quelques mots, car je ne prétends pas répondre à tous les orateurs individuellement.

Je voudrais, d'abord, vous dire que c'est avec une certaine émotion et avec un sentiment de responsabilité que je m'adresse à vous, législateurs qui, en ce moment même, êtes érigés en constituants. Après tout, ce n'est pas une chose si fréquente pour que cela mérite d'être souligné.

Ce sentiment de responsabilité va de pair avec la certitude que la proposition de réforme constitutionnelle que vous fait le Gouvernement est légitime. Certains d'entre vous nous ont fait une sorte de procès en illégitimité, nous reprochant de n'être fidèles ni à l'esprit de nos institutions, ni même à la forme exigée par la Constitution. Je m'inscris en faux contre ce double procès.

L'action du Gouvernement est légitime, d'abord, parce qu'elle témoigne d'une fidélité aux institutions. Le Premier ministre a rappelé tout à l'heure que nous ne souhaitons en aucun cas être infidèles à l'esprit de la Ve République. Nous nous inscrivons dans la continuité de l'histoire de la Ve République et de la révision constitutionnelle de 2008, que nous chercherons à approfondir et à affermir. Nous ne sommes pas seulement fidèles à l'esprit de la Constitution ; nous le sommes également à la lettre exigée par les institutions.

La lettre exigée par notre Constitution, c'est celle de l'article 89. Il n'y a pas d'autre lecture possible. L'article 89, comme l'un d'entre vous l'a souligné tout à l'heure, fait de vous le pouvoir constituant dérivé. Autrement dit, vous avez une totale légitimité à agir, en tant que pouvoir constituant, et il n'est pas toujours nécessaire de faire appel au peuple. Bien sûr, le peuple s'est exprimé à plusieurs reprises lorsqu'il s'est agi d'instituer la République. Et là, c'était bien légitime. Les circonstances de l'après-guerre – M. Mélenchon l'a lui-même souligné – , comme celles qui ont vu la naissance d'autres républiques ont nécessité l'approbation du peuple, parce que c'étaient des circonstances singulières.

Dans le pouvoir constituant dérivé que vous exercez, il n'est pas toujours nécessaire que le peuple s'exprime directement, et il est parfaitement légitime que vous vous exprimiez, en tant que représentants. Je crois vraiment que la proposition que nous vous faisons s'inscrit dans cette double légitimité, celle des institutions et celle de la forme démocratique qui est la nôtre. J'ai bien entendu, monsieur Larrivé, votre crainte de nous voir écrire un requiem pour la Ve République. Ce n'est pas du tout notre projet. Peut-être le vôtre était-il d'écrire une Pavane pour une infante défunte– celle de vos fantasmes – , en nous prêtant des propos critiques sur la Ve République, que nous n'avons pas exprimés.

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