Intervention de Yves Struillou

Réunion du mercredi 20 juin 2018 à 18h05
Commission d'enquête sur les maladies et pathologies professionnelles dans l'industrie risques chimiques, psychosociaux ou physiques et les moyens à déployer pour leur élimination

Yves Struillou, directeur général du travail :

Sur le premier point, vous comprendrez que je respecte un strict devoir de réserve. C'est la directrice de la sécurité sociale qui traite la question des excédents de la branche AT-MP. Avec votre autorisation, je serai donc sur ce point d'une grande prudence, confinant au silence…

En ce qui concerne l'externalisation des risques, la législation s'est construite au fil du temps, notamment en 1977 et en 1992, en s'axant sur la coactivité. Ce n'est qu'un des éléments de la sous-traitance, mais il est très important : la coactivité induit des risques, comme l'ont montré plusieurs exemples récents. Dans l'explosion qui s'est produite à Dieppe, c'est une opération de maintenance réalisée en fin de semaine qui était en cause. Un plan de prévention doit être élaboré par l'entreprise. S'il y en avait un, concrètement, il n'existait que sur le papier : l'entreprise n'avait pas été prévenue qu'elle interviendrait dans un site classé Seveso et un feu s'est déclenché. Dans l'affaire du silo qui a explosé, il s'agissait aussi d'une opération de maintenance. Même si l'on ne connaît pas encore l'explication, il y a eu une concentration de poussière explosive et une flamme. On pourrait également citer l'effondrement de passerelle qui a fait plusieurs dizaines de morts à Saint-Nazaire. Il faut revoir la législation pour les situations de coactivité. Il y a des trous : dans le cas d'une fan zone, par exemple, il n'y a pas de dispositions imposant à l'organisateur de prendre certaines mesures en matière de risque – non pas pour le public, même s'il y a un lien, mais en ce qui concerne les installations électriques, les échafaudages et la coactivité lors du montage et du démontage. Il existe une lacune.

S'agissant de la sous-traitance en tant que telle, tout existe – la réalité est assez diverse – mais un chef d'entreprise qui externaliserait une fonction dans la seule perspective de la gestion du risque s'exposerait beaucoup. Le dispositif de contrôle s'appuie sur un ensemble de dispositions qui obligent le donneur d'ordres à vérifier que l'entreprise utilisatrice respecte les consignes à suivre lors d'une intervention dans un établissement industriel ou classé Seveso. Il y a aussi la culture de prévention, et ce n'est pas une pirouette de ma part. La question est de savoir quels sont les risques encourus et quel est le coût de l'externalisation, aussi bien sur le plan humain – je pense à l'accident de l'usine AZF de Toulouse –, que juridique et économique. La décision relève du chef d'entreprise. Une disposition réglementaire lui impose de donner des instructions à l'entreprise utilisatrice, qui doit les respecter. On rencontre, bien évidemment, beaucoup de difficultés quand il s'agit d'une sous-traitance très ponctuelle – j'ai évoqué, tout à l'heure, les travaux de fumisterie. Vous avez plus probablement en tête des externalisations très dures, reposant sur un choix économique de recentrage sur ce qui fait la valeur du métier. J'ai le sentiment que c'est moins fréquent qu'auparavant : certaines entreprises veulent plutôt récupérer la maîtrise de leurs processus. Il faut agir sur la culture de prévention et sur l'évaluation des risques, de telle manière que celui qui décide le fasse en toute connaissance de cause.

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