Intervention de Nicolas Hulot

Réunion du mardi 10 juillet 2018 à 16h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire :

Sur la pollution par les particules, monsieur Jean-Luc Fugit, je ne peux qu'être d'accord avec vous. Pour moi, il est évidemment important de parler des transferts de matière. J'approuve sans réserve l'idée d'encourager les agences de l'eau à collaborer davantage avec les agences qui travaillent sur la qualité de l'air. Elles doivent coordonner leurs approches. Ce d'autant plus que l'on sait que la pollution atmosphérique peut effectivement avoir des effets sur les écosystèmes, notamment d'eutrophisation et d'acidification. Les océans en subissent évidemment les conséquences. S'y ajoute l'impact lié à l'ozone et aux pesticides présents dans l'air.

Je rappelle simplement que la directive du 14 décembre 2016 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques prévoit que chaque État membre veille à assurer la surveillance des incidences négatives de la pollution atmosphérique sur les écosystèmes, en s'appuyant sur un réseau de sites de surveillance qui soit représentatif de leurs types d'habitats d'eau douce, naturels et semi-naturels, et d'écosystèmes forestiers. À cette fin, les États membres assurent la coordination avec d'autres programmes de surveillance.

La France doit donc remplir son obligation en mettant en place un dispositif qui permette d'évaluer les incidences négatives de la pollution atmosphérique sur les différents écosystèmes, en assurant la coordination entre les différents programmes de surveillance établis en vertu des directives européennes et les autres dispositifs existants. Cela va donc dans le sens de ce que vous préconisez.

Je me souviens très bien, monsieur Paul-André Colombani, des Assises de l'eau à Bastia. Comme vous, plusieurs interlocuteurs m'ont rappelé, lors de mon déplacement, que l'île dispose de peu de ressources en eau souterraine. Le relief prononcé dessine de petits bassins versants cloisonnés, et la demande en eau est évidemment concentrée sur le littoral, avec ce fameux pic estival dû au trop grand succès de votre île. Le tourisme n'est cependant pas seul en cause : s'y ajoutent évidemment les besoins en irrigation.

Force est en outre de constater que votre climat méditerranéen et montagnard est déjà fortement soumis aux changements climatiques. Vous êtes aux premières loges, avec de fortes variations d'une année sur l'autre, des précipitations intenses de courte durée, dont nous avons eu une démonstration à l'automne et en hiver, alternant avec des sécheresses intenses – d'où l'allongement des périodes d'étiage – et des baisses de l'enneigement.

Tout cela n'est pas si sombre, parce que les masses d'eau en Corse sont en meilleur état que sur le continent. Plus d'un tiers de vos cours d'eau sont en très bon état – conservez-le ! – et près de la moitié en bon état. Cela fait partie des richesses de l'île.

Il faut évidemment préserver ce bon état des masses d'eau, sans entraver le développement économique. Un plan de bassin d'adaptation au changement climatique est donc en cours d'élaboration, comme pour les autres bassins. C'est un travail essentiel, auquel l'État sera évidemment associé. Il doit être conduit au plus près de la réalité des territoires, en se gardant des solutions toutes faites. Il faut faire du sur-mesure, à l'échelle du bassin et des sous-bassins, identifier les mesures les plus pertinentes, au meilleur endroit, sur les secteurs prioritaires. C'est pourquoi nous avons souhaité qu'une instance de dialogue coordonne l'ensemble des acteurs impliqués, de la collectivité aux citoyens. Il faut y associer également des vacanciers. En Corse, comme dans les départements et les régions d'outre-mer, le bassin recouvre le périmètre de la collectivité. C'est donc une opportunité si l'on veut faciliter le rapprochement entre les politiques à l'échelle locale et multiplier les synergies.

Vous m'avez interrogé, monsieur Pierre Vatin, sur les décharges abandonnées et les pollutions accidentelles. Les décharges abandonnées sont un véritable fléau, que nous avons bien identifié dans le plan « biodiversité ». On ne peut y remédier, malheureusement, que par un renforcement des sanctions. Un groupe de travail a été lancé pour avancer sur ce sujet. Le plan prévoit, d'une part, d'améliorer la capacité d'intervention des collectivités en renforçant leurs pouvoirs de police, d'autre part d'instituer des amendes qui, je l'espère, auront un effet dissuasif plus efficace.

Quant à la pollution par les nitrates, elle est maintenant mesurée bien plus précisément – c'est plutôt une bonne chose, même si on préférerait parfois ne pas savoir – ; nous sommes donc en mesure de faire évoluer les réglementations. Je n'ai pas connaissance, à ce stade, d'une évolution de la réglementation européenne, mais cela ne nous empêche pas de commencer à y travailler.

J'ai sans doute omis quelques-unes de vos questions. Notre responsabilité sera d'y répondre ultérieurement.

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