Intervention de Pierre Dharréville

Séance en hémicycle du mercredi 25 juillet 2018 à 15h00
Liberté de choisir son avenir professionnel — Article 40 a

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Dharréville :

Le débat sur la protection sociale des travailleurs des plateformes est essentiel. L'article 40 A a été introduit dans le projet de loi en première lecture, suite à l'adoption d'un amendement du rapporteur visant à instaurer une charte sociale pour les faux indépendants. À notre sens, il ne s'agit pas de la réponse adéquate à cet enjeu de société. Les syndicats des travailleurs des plateformes comme le Collectif des livreurs autonomes de Paris – CLAP – y sont d'ailleurs fortement opposés, comme l'ont montré plusieurs manifestations récentes.

Aujourd'hui, les personnes qui travaillent pour des plateformes sont bien souvent placées dans une situation de dépendance économique et de subordination juridique sans bénéficier des protections attachées au statut de salarié. Un récent rapport de l'Institut national de recherche et de sécurité – INRS – sur les conditions de travail et la santé des travailleurs des plateformes pointe d'ailleurs un certain nombre de problèmes importants. Il en résulte des conditions d'emploi très précaires, des revenus dérisoires, l'absence de protection en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles, l'absence de droit au chômage. Cette situation ne peut plus durer. Elle laisse des milliers de personnes dans la précarité sans leur offrir de solides perspectives professionnelles. Nous ne pensons donc pas qu'il s'agisse d'un modèle économique à encourager pour l'avenir ; au contraire, il faut mettre un coup de frein à cette logique de dérégulation. Plusieurs tribunaux français ont reconnu, dans certains cas, l'application du droit du travail pour ces travailleurs en raison du lien qu'ils ont avec les plateformes.

La charte de responsabilité sociale envisagée, sans portée obligatoire, ne vise en réalité qu'à sécuriser les plateformes dans leurs relations avec les travailleurs afin d'éviter des requalifications en contrat de travail – en tout cas, c'est à cela qu'elle conduira. Elle ouvre la voie à la création d'un troisième statut, entre le salariat et le travail indépendant. À notre sens, cette solution est dangereuse : elle viendrait remettre en cause les frontières existantes tout en permettant aux employeurs de jouer entre les différents statuts pour s'exonérer de payer des cotisations et de respecter les obligations liées au code du travail. Les ordonnances sont déjà allées suffisamment loin pour ne pas en rajouter.

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