Intervention de François Guérin

Réunion du jeudi 12 juillet 2018 à 10h00
Commission des affaires économiques

François Guérin, directeur général de BEL'M :

Je suis directeur général d'une entreprise de taille intermédiaire (ETI) de 1 300 personnes, avec 8 usines principalement situées dans l'ouest de la France et dans la région Rhône-Alpes. Nous fabriquons des portes, des fenêtres et des solutions photovoltaïques pour l'habitat. Nous sommes une entreprise très engagée sur la responsabilité sociale (RSE). Nous avons mis la RSE au coeur de notre modèle économique depuis très longtemps. Je suis aussi vice-président de l'association « Dirigeants responsables de l'Ouest » (DRO), qui essaie de porter la RSE dans nos entreprises. Nous sommes beaucoup d'entreprises engagées sur cette thématique dans les Pays de la Loire. Je tiens également à souligner la place de la CCI sur cette thématique, puisque la CCI a toujours été une plateforme où nous avons beaucoup parlé de la RSE, avec des projets comme la transition écologique et énergétique. Je vais vous parler du nouvel objet social de l'entreprise, qui intègre les enjeux sociaux et environnementaux. Nous avons souvent dit que nous ne voulions pas qu'on légifère sur la RSE, parce que la RSE était un champ d'exploration et il fallait donner de la liberté. Pour autant, comment inciter les entreprises à y aller ? Comment créer un cadre non contraignant qui rende les choses plus visibles, plus claires et plus lisibles ? Ce qui est proposé dans le projet de loi PACTE nous semble être une très bonne piste. Changer l'objet social d'une entreprise pour y intégrer les enjeux sociaux et environnementaux est aujourd'hui optionnel dans le projet de loi. Est-ce suffisant ? Comment inciter, petit à petit, beaucoup plus d'entreprises à y aller ? Faut-il rendre obligatoire l'intégration des enjeux sociaux et environnementaux au-delà d'un certain délai ? Pour être plus incitatif, nous pourrions aussi mettre un lien avec des éléments très concrets. Par exemple, lorsque des critères RSE sont insérés dans des marchés publics, une entreprise qui a intégré dans son objet social ces enjeux pourrait répondre directement à ces critères. Nous avons fait tout un travail dans les territoires sur la notation financière des entreprises. Nous sommes arrivés à faire bouger la Banque de France sur un point : une entreprise qui a une démarche RSE voit sa note impactée positivement. Une entreprise, qui a intégré ces missions dans son objet social, pourrait bénéficier directement de cette mesure-là.

Par ailleurs, comment l'Etat peut-il aider à la reconnaissance de ce statut ? Quel label pouvons-nous créer pour le rendre visible ? Porter les enjeux sociaux et environnementaux, ce n'est pas placer l'entreprise dans une approche de court terme, mais au contraire dans une perspective de long terme. Nous engageons beaucoup d'actions qui n'ont pas de retour sur investissement à court terme, mais qui en ont plutôt à long terme. Par exemple, si nous voulons décarboner une usine, cela représente plusieurs millions d'euros d'investissement, avec un retour sur investissement au bout de 10 ans seulement. Ne pouvons-nous pas envisager des mesures d'amortissement particulières pour favoriser ces transitions écologiques ? Je pense que le projet de loi PACTE va vraiment dans le bon sens sur ces thématiques mais je considère qu'il faut davantage inciter les entreprises à basculer dans la démarche RSE en faisant le lien avec des éléments très concrets.

Un autre objectif du projet de loi PACTE consiste à faciliter le rebond. Mais avant le rebond, il y a la phase difficile durant laquelle l'entreprise est dans les mains d'un mandataire judiciaire. Dans 97 % des cas, on arrive à la liquidation. Comment faire en sorte que nous changions complètement cette approche-là ? Ce n'est pas possible que ce taux soit si élevé. Il doit y avoir sûrement des moyens, des nouvelles méthodes à mettre en place, pour améliorer cette phase-là. Nous pourrions faire intervenir, dans le cadre d'un accompagnement, un ou deux chefs d'entreprise qui apporteraient une vision plus dynamique et plus positive dans cette phase de redressement de l'entreprise.

Enfin, je croyais que la question du télétravail devait être abordée dans le cadre du projet de loi PACTE. Or, je n'ai pas vu d'éléments sur ce sujet-là. Nous sommes tous progressivement confrontés au télétravail. Le statut du salarié, résident et fixe à son poste, est en train d'exploser, surtout dans les entreprises de services. Il y a un vide juridique aujourd'hui. Dans quel cadre juridique entre le salarié en télétravail ? Nous ne voulons pas un cadre juridique trop rigide, parce que la personne en télétravail n'est pas entièrement sous le contrôle de l'entreprise. Cette question doit être approfondie.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.