Intervention de Laurence Delva

Réunion du mardi 10 juillet 2018 à 11h15
Commission d'enquête sur l'alimentation industrielle : qualité nutritionnelle, rôle dans l'émergence de pathologies chroniques, impact social et environnemental de sa provenance

Laurence Delva, cheffe du service de l'alimentation du ministère de l'agriculture, de l'alimentation et de la forêt :

Vous vous interrogez sur l'efficacité des mesures liées à l'éducation alimentaire.

La « fenêtre de tir », s'agissant de l'âge des enfants sensibles aux mesures et aux actions que l'on peut conduire en matière d'éducation alimentaire des consommateurs de demain, est extrêmement réduite. À partir de dix ou douze ans, il devient extrêmement difficile d'inculquer de bonnes pratiques alimentaires au regard de l'offre alimentaire proposée aux jeunes adolescents. Il s'agit d'un constat : la fenêtre de tir est assez étroite.

Deuxième élément, les programmes d'éducation alimentaire sont sous la responsabilité des enseignants ; il faut donc que les enseignants et les responsables d'établissement, qui sont souverains en matière d'éducation, soient motivés, éprouvent cette envie, se donnent le temps et les moyens de mettre en oeuvre ces mesures. Sans doute cela explique-t-il que les résultats ne sont pas toujours à la hauteur de nos ambitions. C'est la raison pour laquelle, à la suite des états généraux de l'alimentation, le renforcement de la dimension éducative a été plébiscité dans la feuille de route. Aussi travaillons-nous conjointement avec l'Éducation nationale pour ancrer ces valeurs éducatives dans le parcours citoyen.

Nous avons également le projet d'élaborer un vademecum à l'usage des enseignants afin qu'ils mettent en pratique ces dispositions du parcours national citoyen. Mais nous butons sur une difficulté lorsque nous en débattons avec ma collègue de l'Éducation nationale. Elle constate que les programmes ne cessent de gonfler, qu'on leur demande d'en faire toujours plus et que les emplois du temps sont toujours contraints. Nous sommes confrontés à la nécessité de nous intégrer dans les programmes existants et tributaires, encore une fois, des moyens et de la bonne volonté des enseignants et des directeurs d'établissement, sachant que l'idéal serait que cette éducation alimentaire ne constitue pas un module autonome, mais une information qui perfuserait à travers les enseignements d'histoire, de sciences de la vie et de la terre (SVT) ou du français. L'éducation à l'alimentation revêt un caractère transversal. C'est pourquoi, dans le cadre de la feuille de route élaborée en concertation étroite avec l'Éducation nationale, nous voulons développer le volet alimentaire du parcours citoyen et l'introduire dans l'ensemble des programmes.

Je voudrais faire une remarque qui est vraie pour l'ensemble des politiques incitatives. J'ai indiqué au début de mon propos que l'objectif visait à faire évoluer les pratiques, qu'il s'agisse des pratiques alimentaires, des pratiques d'usage des produits phytopharmaceutiques ou d'utilisation des antibiotiques. L'ensemble de ces mesures incitatives ont un point commun : l'évolution des pratiques demande un pas de temps de plusieurs années. De la même façon, nous constaterons les effets des classes du goût ou des animations de type « Plaisir à la cantine » lorsque ces jeunes enfants seront devenus des consommateurs avertis, voire de jeunes parents. Un pas de temps est nécessaire à l'évaluation de l'efficacité des mesures, les résultats ne sont pas immédiatement visibles.

Pour résumer, je m'inscris dans le sens de votre propos : l'efficacité n'est pas suffisamment avérée, les dispositifs sont insuffisamment déployés. Aussi, dans le cadre de la feuille de route, nous devons nous employer à augmenter l'impact de ces mesures. Un petit bémol toutefois : n'oublions pas que l'évolution des pratiques est un objectif au long cours dont on ne peut évaluer les résultats qu'au terme de plusieurs années.

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