Intervention de André Chassaigne

Séance en hémicycle du vendredi 14 septembre 2018 à 15h00
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Article 11 undecies

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Avant de défendre cet amendement, je voudrais, dans le cadre du temps de parole qui m'est imparti, aborder une question qui est liée à cet article 11 undecies, et plus particulièrement à son alinéa 5 : celle de l'aide alimentaire.

Je souhaite en effet alerter M. le ministre sur l'inquiétude très forte qui, depuis quelques semaines, pèse sur le maintien du Fonds européen d'aide aux plus démunis, le FEAD.

Je rappelle que le FEAD a été créé en 2014 après trois ou quatre années de discussions extrêmement dures au sein de l'Union européenne. Il existait auparavant une aide alimentaire qui était menacée de disparition.

Or le FEAD doit rester opérationnel jusqu'en 2020. Je précise qu'il fonctionne selon un mécanisme de solidarité qui permet de fournir une aide alimentaire – c'est-à-dire quarante denrées différentes, notamment des céréales, des produits laitiers et des conserves – et matérielle à des associations qui sont au nombre de quatre : le Secours populaire français, les Banques alimentaires, les Restos du coeur et la Croix-Rouge française.

Ces associations sont aujourd'hui extrêmement inquiètes, compte tenu des orientations qui sont esquissées en Europe ainsi que du risque, une fois de plus, de disparition de cette aide alimentaire au niveau européen.

Monsieur le ministre, je voulais donc vous alerter sur la gravité de la situation. En France, le FEAD a permis, en 2016, de soutenir 4,3 millions de personnes dont les moyens sont trop faibles pour acheter tout au long de l'année de quoi manger et pour respecter un certain équilibre nutritionnel.

En 2015, le Secours populaire d'Île-de-France a mené une enquête auprès des familles fréquentant ses libres-services de la solidarité. Résultat : 40 % de ces familles dépendaient des associations pour se nourrir – et souhaitaient bien entendu continuer à disposer des produits que le FEAD leur permettait d'obtenir.

Je voulais donc aujourd'hui pousser un cri d'alarme, monsieur le ministre, afin que vous soyez extrêmement attentif au niveau européen et que nous ne retombions pas dans la situation que nous avons vécue au début des années 2010.

Les plus anciens dans cet hémicycle se souviennent d'ailleurs que les représentants des quatre associations étaient venus à l'Assemblée nationale. Une action très forte avait été conduite, qui avait permis de faire bouger les lignes au niveau européen.

Je voulais donc vous alerter sur cette question-là, avant d'en venir à l'amendement no 544 . Il porte sur le rétablissement d'une mesure adoptée par le Sénat, qui permettait d'intégrer aux grands objectifs de la politique agricole française « des actions en faveur du maintien des abattoirs à proximité des élevages ».

Vous avez fait supprimer cette mention en commission, monsieur le ministre, en arguant qu'il n'était pas justifié de citer les abattoirs plutôt que d'autres établissements de la chaîne alimentaire.

Il me semble que cela revient à sous-estimer l'urgence qu'il y a à sauvegarder, voire à recréer, un maillage territorial d'abattoirs de petite capacité.

Depuis plusieurs décennies en effet, la tendance est, à l'inverse, à la concentration des abattages dans de grosses structures industrielles, évolution qui complique, voire empêche parfois l'accès de certains éleveurs aux structures d'abattage en plombant leur coûts de production.

Il leur faut en effet parfois parcourir jusqu'à 150 kilomètres jusqu'au lieu d'abattage : le coût de transport et d'abattage est de ce fait extrêmement important, notamment lorsque le nombre d'animaux à abattre est faible.

Je pense en particulier aux éleveurs qui font de la vente directe et qui supportent des charges extrêmement lourdes : ils regrettent qu'il n'y ait pas d'abattoirs de proximité et souhaitent que ces abattoirs, lorsqu'ils existent, soient maintenus, ou que l'on puisse en créer d'autres.

Nous nous réjouissons bien sûr de l'adoption de l'article 13 quinquies – dont vous parlerez peut-être, monsieur le ministre – qui porte sur les abattoirs mobiles, qui sont complémentaires des abattoirs fixes et qui représentent une forme de diversification des activités des abattoirs de proximité.

Pour autant, ces abattoirs mobiles ne peuvent, on le sait, exister que parce qu'il existe des abattoirs fixes. Généralement, les premiers viennent en appui des seconds : je ne crois pas que les uns puissent exister sans les autres.

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