Intervention de Emmanuel Macron

Séance en hémicycle du lundi 3 juillet 2017 à 15h00
Déclaration de m. le président de la république

Emmanuel Macron, Président de la République :

Car le sentiment d'appartenance, en définitive, existe moins qu'auparavant. Nos sociétés modernes ont tendance à se fractionner au gré des intérêts, des égoïsmes, des idées de chacun. Là encore, il nous revient, dans l'action publique, de résister aux forces de division, aux effets de dislocation qui sont à l'oeuvre et qui ne sont aucunement invincibles pour peu qu'on s'en donne les moyens. Aussi notre solidarité doit-elle retrouver des formes concrètes.

L'école en est le premier creuset ; notre université, ensuite ; nos familles, également ; notre culture. La langue, l'accès au savoir, l'ouverture à des possibles qui nous rassemblent forgent un peuple. Ces solidarités organiques, que nous avons mésestimées, sont aussi ce qui tient notre société. Face à la crise morale et de civilisation que nous vivons, nous devons savoir forger à nouveau ces solidarités profondes et un imaginaire puissant et désirable où chacun trouvera sa place. Telle est aussi la réponse que nous devons apporter à ce qui corrompt la société.

Je parlais tout à l'heure du terrorisme islamiste. Il faut bien sûr y apporter une réponse sécuritaire, mais celle-ci ne servira à rien, elle ne sera qu'une poursuite de chaque jour, si par l'éducation, la culture, la morale profonde – au sens plein du terme – qui doit infuser notre société, notre imaginaire collectif et nos solidarités, à nouveau, nous ne décidons pas de rebâtir ce qui nous tient comme un peuple un, ce peuple dont l'histoire constitue l'énergie profonde, ce grâce à quoi il s'est relevé de tant et tant de drames, sans jamais s'affaisser.

La réponse à tout ce que nous vivons, ce ne sont ni des lois ni des règlements ; c'est cette dignité collective retrouvée, c'est cette volonté de faire à chaque instant. C'est cette responsabilité de chacune et chacun, dans la société, de redonner du sens, de savoir qui nous sommes, pourquoi nous sommes là, ce qui nous tient, d'avoir à chaque instant en tête la nature du défi qui est le nôtre et de ne rien céder à la lèpre de l'esprit du moment, l'esprit de la division, de l'accusation. C'est tout cela qui durera : ce qui nous dépasse, ce qui nous a faits, ce qui nous a forgés.

Le troisième principe d'action de notre mobilisation sera de redonner place à l'intelligence française.

Par intelligence, j'entends évidemment les grandes découvertes, les chercheurs, nos grands physiciens, nos grands médecins, les inventeurs, les innovateurs, tout ce qui et a fait et fait encore la fierté de notre pays. Elle est là, encore présente, forte, dans tous les territoires. Il nous faut la reconnaître, la montrer ; il nous faut savoir la célébrer là où trop de fois nous avons préféré jalouser.

Je pense aux écrivains, aux philosophes, aux historiens, aux cinéastes qui continuent d'apporter au monde ce regard libre de préjugés qui fait notre force ; je pense aux peintres et aux musiciens qui remettent, au fond, la politique à sa juste place en nous faisant entrevoir un au-delà de l'existence immédiate qui rend à la condition humaine sa grandeur, sa beauté, souvent son tragique.

Redonner toute sa place à l'intelligence française, c'est aussi se refuser à toutes ces incohérences qui nous minent. Et nous n'y parviendrons qu'au prix d'un véritable effort de réflexion collective. Nous ne pouvons pas, par exemple, continuer d'affirmer hautement notre attachement aux principes de l'asile tout en nous abstenant de réformer en profondeur un système qui, débordé de toutes parts, ne permet pas un traitement humain et juste des demandes de protection émanant d'hommes et de femmes menacés par la guerre et la persécution – ceux qu'on appelait en 1946 les « combattants de la liberté ».

Redonner sa place à l'intelligence française, c'est faire de notre pays le centre d'un nouveau projet humaniste pour le monde, le lieu où l'on concevra, créera une société qui retrouve ses équilibres : la production et la distribution plutôt que l'accumulation par quelques-uns, l'alimentation saine et durable, la finance équitable, le numérique au service de l'homme, la fin de l'exploitation des énergies fossiles et la réduction des émissions de polluants. Et nous le ferons non pas parce que c'est à la mode ou pour faire plaisir à quelques-uns, mais parce que c'est ce niveau d'ambition qui a toujours été le nôtre. C'est précisément quand le quotidien est difficile, quand il faut réconcilier tant de contraires et que les égoïsmes court-termistes incitent à l'inaction que nous devons aller de l'avant, définir un cap, le tenir, et inviter le monde à le suivre, car telle est la vocation de la France.

La France n'est pas un pays qui se réforme ; il serait faux de l'affirmer. Pardonnez-moi, monsieur le Premier ministre, de vous annoncer aujourd'hui, devant le Congrès, cette mauvaise nouvelle.

3 commentaires :

Le 05/07/2017 à 12:04, Laïc1 a dit :

Avatar par défaut

"Je pense aux écrivains, aux philosophes, aux historiens, aux cinéastes qui continuent d'apporter au monde ce regard libre de préjugés qui fait notre force"

Faut arrêter avec la philosophie : ce n'est qu'un tissu d'inepties et de préjugés destiné à pourrir la pensée et l'intelligence des jeunes Français. Si la France veut être à la hauteur de sa mission intellectuelle, qu'elle en finisse avec la philosophie et ces philosophes imposteurs, les vrais charlatans de la pensée que la France continue scandaleusement et malheureusement d'entretenir, et qui font sa faiblesse.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Le 05/07/2017 à 12:08, Laïc1 a dit :

Avatar par défaut

"je pense aux peintres et aux musiciens qui remettent, au fond, la politique à sa juste place en nous faisant entrevoir un au-delà de l'existence immédiate qui rend à la condition humaine sa grandeur, sa beauté, souvent son tragique."

Ce qui est tragique, c'est une vie politique coupée des aspirations populaires. Avez-vous déjà assisté à un conseil municipal, au silence des citoyens devant la toute puissance des élus ? Ce silence forcé de la population face à une ultra minorité élue qui a tous les pouvoirs n'est-il pas hautement tragique ?

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Le 05/07/2017 à 12:13, Laïc1 a dit :

Avatar par défaut

"La France n'est pas un pays qui se réforme ; il serait faux de l'affirmer. Pardonnez-moi, monsieur le Premier ministre, de vous annoncer aujourd'hui, devant le Congrès, cette mauvaise nouvelle."

Est-une allusion religieuse à l'échec de la Réforme (on pense aux protestants) face à L’Église catholique ? La personne qui a écrit le discours pour M. Macron doit sans doute être un fan de louis 14...et un pilier inconscient de l'Eglise catholique.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.