Intervention de Kévin Puisieux

Réunion du mercredi 26 septembre 2018 à 17h15
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Kévin Puisieux, responsable Économie et finance de la Fondation pour la nature et l'homme :

L'une des questions qui vous sera soumise au cours de débat budgétaire, madame El Haïry, est celle de l'intégration de l'huile de palme dans les biocarburants, compte tenu de son impact à l'autre bout de la planète. En ce qui concerne la redistribution et le ras-le-bol fiscal, la composante carbone rapportera cette année 2,8 milliards d'euros de plus que l'an dernier, et même 3,7 milliards si l'on tient compte de la suppression du taux réduit de TICPE pour les professionnels. La FNH s'interroge sur la destination de ces 3,7 milliards : en l'état, la hausse du chèque énergie et l'augmentation de la capacité de la prime à la conversion sont très réduites par rapport à ces marges supplémentaires. Rappelons en effet qu'il manque 10 à 20 milliards d'euros d'investissements publics par an pour atteindre nos objectifs ; le débat doit donc avoir lieu dans le cadre de la discussion budgétaire, à partir des chiffres que nous évoquons.

MM. Orphelin, Alauzet et d'autres se sont demandé comment pérenniser l'incitation et la visibilité des mesures sachant qu'une partie du prix des carburants est soumise à des fluctuations sur lesquelles nous n'avons pas de prise et qui sont davantage liées à des mouvements de marché plutôt qu'à l'état des ressources disponibles ; le prix de l'énergie fait l'objet de spéculation et il faut faire avec. C'est un vrai chantier. Le rapport de Mme Peyrol et M. Bureau aborde la question de la redistribution : il faut déterminer jusqu'à quel point elle n'annule pas l'incitation à changer de comportement. La priorité, cependant, consiste à décider quoi faire des recettes nouvelles de la taxe carbone.

L'anticipation est un sujet important, monsieur Saddier. On a parfois tendance à dissocier les réflexions conduites sur tels et tels points : vous avez adopté le projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique en vous félicitant de libérer la construction et donc, potentiellement, l'artificialisation des sols, tandis que le plan relatif à la rénovation, défendu par l'ancien ministre de la transition écologique et solidaire, est dépourvu de moyens. En la matière, l'action gouvernementale est quelque peu schizophrène – pardonnez-moi ce terme médical. L'absence de cohérence est un fait majeur. Qu'il s'agisse du diesel ou de l'étalement urbain, nous créons des zones de vulnérabilité énergétique en encourageant à coups d'avantages fiscaux, pendant dix voire quinze ans, les habitants des centres-villes à préférer le neuf à la rénovation. C'est une bombe à retardement qui se traduit par l'arrivée de populations dans les zones périurbaines. Nous payons ce manque d'anticipation et continuons de commettre des erreurs concernant les SUV ou encore le diesel.

Quant aux dépenses qui pourraient être remises en cause, je pense à la dépense fiscale en matière d'épargne. Chaque année, une cinquantaine de niches fiscales coûte 10 milliards d'euros et oriente les produits d'épargne. En réalité, le faible volume d'études, de contrôles et d'évaluations sur ce sujet montre que l'on ne sait guère si ces dispositifs fonctionnent et qu'ils se caractérisent par une forte incohérence. Il existe une importante marge de manoeuvre pour en renforcer l'efficacité.

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