Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du mercredi 10 octobre 2018 à 21h30
Commission des affaires sociales

Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics :

En ce qui concerne les rapports entre l'État et la sécurité sociale, nous pouvons nous mettre d'accord, monsieur le rapporteur général, sur le fait qu'il n'y a pas de cagnotte sociale, pas plus qu'il n'y avait de cagnotte fiscale lorsque la croissance semblait partie pour durer : avec 2 200 milliards d'euros de dettes, on ne constitue pas de cagnotte fiscale ; avec une dette sociale qui s'élève à 120 ou 125 milliards d'euros on ne constitue pas non plus de cagnotte sociale. Nous visons un apurement à l'horizon 2024, ce qui se rapproche mais reste au-delà du quinquennat du Président de la République et de cette législature.

Nous pouvons éventuellement nous poser la question de savoir ce que nous ferons de nos excédents après 2024, mais encore faut-il y arriver, ce qui n'est pas gagné car certaines économies restent à confirmer et que cela dépend également de la croissance, et donc des recettes. La question mérite sans doute d'être posée, car nous devons anticiper l'avenir, mais elle ne nous paraît pas avoir d'actualité immédiate, notre priorité étant le désendettement, sachant que le jeu des vases communicants des politiques publiques complique parfois la prise de décision dans le champ social.

Comme le montre le rapport Charpy-Dubertret, nous avons voulu essayer à la fois de simplifier la tuyauterie et de responsabiliser les acteurs. Il n'est pas tout à fait normal en effet, comme cela a souvent été pointé par la Cour des comptes que les commandeurs ne soient pas les payeurs et que l'on mise sur des crédits budgétaires pour financer les compensations : lorsqu'on atteint 36 milliards d'euros de compensation, la machine devient folle… Nous souhaitons donc la simplifier.

Si les réformes précédentes ont permis les excédents que nous connaissons aujourd'hui, il ne faut pas oublier le travail quotidien de tous les professionnels de santé et des Français qui grâce à leurs recettes et à leurs non-dépenses, si je puis dire, ont contribué à cet équilibre. Nous n'avons pas la volonté de mettre l'intégralité d'éventuels excédents dans le champ de l'État pour résoudre l'endettement public au sens large.

La règle que nous avons proposée, c'est à la fois une chronique et le chacun pour soi : chacun reste dans son coin, et quand il y a des allégements généraux il y a des compensations, et quand des choix spécifiques sont faits par des champs spécifiques on respecte cette règle. Je crois que nous aurons l'occasion d'y revenir lors de la discussion du budget. Le PLFSS que nous présentons prévoit 36 milliards d'euros de compensation entre l'État et la sécurité sociale, et 2 milliards qui sont proprement sociaux – forfaits sociaux, mesures de correction de la CSG pour un montant de 300 millions – et ne sont pas compensés.

Plusieurs d'entre vous, quel que soit leur groupe politique, m'ont interrogé sur le dispositif TO-DE. Comme je vous l'ai dit dans mon propos liminaire, ce ne serait pas responsable de dire que l'allégement général de charges bénéficiera à l'intégralité du monde agricole – plus 60 millions par rapport à aujourd'hui. Il y a donc des spécificités à prendre en compte sur les métiers que vous avez évoqués. Le Premier ministre a évoqué avec les organisations syndicales agricoles une sortie « en sifflet » du dispositif TO-DE qui n'est peut-être pas aussi nette que ce que nous présentions jusqu'à présent. Il nous faut sans doute ici ou là jouer sur l'intégralité des mesures que nous pouvons mettre en place. Je vous rappelle que le projet de loi de finances comporte des mesures extrêmement favorables aux agriculteurs, ne serait-ce qu'en ce qui concerne l'épargne ou la fiscalité. Nous vous proposons d'étudier la sortie en sifflet d'un système qui n'est pas structurel ainsi que des mesures structurelles qui relèvent de telle ou telle filière pour leur permettre de faire face à la compétitivité internationale puisque parfois le coût du travail saisonnier peut représenter jusqu'à 70 %, notamment dans l'horticulture et la viticulture.

Aujourd'hui, je ne connais pas encore totalement les arbitrages que souhaite faire le Premier ministre, mais nous aurons l'occasion de discuter dans l'hémicycle du dispositif TO-DE, qui représente environ 300 millions, et de trouver un compromis, sur proposition soit du Parlement, soit du Gouvernement, le Gouvernement ayant la volonté de ne pas faire comme s'il n'y avait pas d'allégement de charges tout en comprenant que certains métiers et filières ont davantage de difficultés que d'autres. Je suis sûr que nous parviendrons à trouver, avec Mme Buzyn et le ministre de l'agriculture, un chemin qui nous permettra de respecter le travail du monde agricole.

Monsieur Door, vous m'interrogez sur la suppression de 1 % de la cotisation sur les retraites complémentaires, donc sur les retraités les moins modestes, qui représente environ un milliard d'euros. Je vous rappelle que le taux de CSG pour les retraités est inférieur d'un point à celui des actifs. Nous n'avons fait qu'augmenter un taux réduit qui reste inférieur à celui des actifs. Si nous supprimions ce pourcentage, il faudrait d'abord trouver un milliard, ce qui n'est pas si évident. Vous qui êtes un fin connaisseur de ces questions et responsable par ailleurs, je suis sûr que vous pouvez nous présenter un amendement qui trouve un gage sérieux d'un montant d'un milliard. Si un gouvernement, quel qu'il soit, devait un jour se poser la question de la fiscalité sociale pour les retraités, je ne suis pas certain qu'il serait juste de supprimer ce pourcentage. Je ne suis donc pas tout à fait sûr que ce soit le chemin que prendrait ce Gouvernement ni les gouvernements en général, indépendamment du fait que cela coûte un milliard.

Je suis assez étonné de la prise de position de M. Door et de M. Lurton sur la question des prestations familiales et sur la revalorisation modérée des prestations sociales. J'ai écouté avec attention M. Wauquiez – rassurez-vous, monsieur Door, « M. Wauquiez », ce n'est pas une insulte, ce n'est pas grave – qui a fait une conférence de presse hier. Il a dit notamment que les fonctionnaires devraient travailler 39 heures payées 35 !

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