Intervention de Jean-Michel Fauvergue

Réunion du jeudi 25 octobre 2018 à 10h05
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Michel Fauvergue, rapporteur pour avis des programmes Police nationale et Gendarmerie nationale :

La trajectoire de hausse du budget de la police et de la gendarmerie dans le cadre du quinquennat se traduit dans le projet de loi de finances pour 2019 par une augmentation sensible des moyens financiers et des effectifs. Les engagements sont donc tenus.

Les renforts nets d'effectifs s'élèvent à 1 735 éléments pour la police nationale et à 634 pour la gendarmerie. Les crédits de paiement sont également en nette hausse, de 172 millions d'euros pour la police sur le programme 176, et de 180 millions d'euros pour la gendarmerie sur le programme 152. Comme l'année dernière, cette augmentation est plus particulièrement fléchée sur l'immobilier et les moyens roulants.

Concernant les moyens roulants de la police, le renouvellement du parc automobile vieillissant fait l'objet d'un effort important cette année. L'objectif de renouvellement est fixé à 3 000 véhicules, contre 2 500 véhicules l'année dernière, ce qui représentait déjà en 2018 un effort important par rapport aux années précédentes.

L'année 2018 a été marquée par un effort substantiel des opérations immobilières, et l'année 2019 permettra le lancement d'opérations nouvelles soutenues au même rythme – environ 105 millions d'euros en autorisations d'engagement. Les crédits consacrés à la maintenance immobilière s'élèvent à 60 millions d'euros.

Pour ce qui concerne le plan d'action contre le terrorisme (PACT) présenté récemment par le Premier ministre, les services de renseignement et de police judiciaire seront aussi dotés d'effectifs et de moyens nouveaux : 270 emplois et 20 millions d'euros de mesures nouvelles pour la DGSI, dont 13,7 millions d'euros dédiés aux systèmes d'information, 34 emplois pour le service central du renseignement territorial, et 46 emplois pour la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ) affectés à l'antiterrorisme.

Le plan de réhabilitation immobilière de la gendarmerie se poursuit en 2019, et les crédits sont en forte hausse. Ils permettront la réhabilitation de près de 4 000 logements. La sécurité des casernes fait l'objet d'un effort particulier de 15 millions d'euros.

Le renouvellement du parc automobile de la gendarmerie fait pour sa part l'objet de l'acquisition de 2 800 véhicules. Dans le même temps, les saisies effectuées dans le cadre de procédures judiciaires ont permis en 2018 d'affecter à la gendarmerie environ un millier de véhicules supplémentaires. La gendarmerie expérimentera, à partir du 1er janvier 2019, la location avec option d'achat de 400 véhicules affectés à la Garde républicaine. Cette expérience intéressante est à suivre.

Cet effort, qui s'inscrit dans la continuité du précédent budget voté par la majorité, doit être salué. Votre rapporteur pour avis souligne cette mobilisation budgétaire qui devrait être perçue, non comme une fin mais bien comme un moyen d'améliorer les réalités opérationnelles que vivent les agents de terrain. Cette valorisation du potentiel opérationnel exceptionnel des policiers et des gendarmes leur est due, pour le bénéfice de la population.

Cette année, nous nous sommes plus particulièrement intéressés au cas de la police technique et scientifique (PTS), en forte progression avec les avancées de la recherche génétique qui sont appliquées aux enquêtes judiciaires. L'organisation de notre PTS est complexe en raison d'une pluralité d'acteurs : l'Institut national de la police scientifique pour la police nationale, le service central de la police technique et scientifique pour la police nationale, l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale, le service régional de l'identité judiciaire pour la préfecture de police. Vous l'avez compris, un effort de rationalisation est nécessaire.

Comme l'année dernière à brève échéance, votre rapporteur recommande une nouvelle fois d'amplifier la rationalisation de la gouvernance en confiant au service central de la police technique et scientifique une véritable autorité hiérarchique sur l'ensemble des services de la PTS de la police nationale. Mais l'objectif final à l'échelle du quinquennat, et si possible avant, reste l'intégration aussi rapide que possible des structures existantes de la police et de la gendarmerie nationales au sein d'une grande direction commune de la PTS qui est aussi suggérée par la Cour des comptes. D'où ma première question : monsieur le ministre, envisagez-vous une telle direction et, le cas échéant, dans quel délai ?

Au-delà de la PTS, cette démarche doit être étendue à tous les secteurs de la sécurité intérieure. Votre rapporteur relevait dans son rapport pour avis l'année dernière qu'en région parisienne, du fait de la dualité des polices entre la préfecture de police et la direction générale de la police nationale, la continuité et l'efficacité opérationnelle sont tributaires d'échelons de coordination multiples et, par voie de conséquence, faillibles et dépensiers en énergie et effectifs. Cette situation, qui nuit à l'efficacité opérationnelle des agents, demeure.

En matière de sécurité publique et d'ordre public, dans le secteur géographique de la préfecture de police où les effectifs sont nombreux et les problématiques parisiennes particulières, la coordination zonale actuelle apparaît satisfaisante. En revanche, dans les autres domaines, votre rapporteur pour avis préconise l'intégration aux structures centrales de la direction générale de la police nationale (DGPN) de plusieurs services spécialisés de la préfecture de police. En matière de police judiciaire, la direction régionale de la police judiciaire (DRPJ) pourrait être intégrée à la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ). En matière de renseignement, la direction du renseignement de la préfecture de police (DRPP) pourrait être intégrée pour partie à la DGSI et pour une autre partie au service central du renseignement territorial (SCRT). Pour les unités d'intervention, la brigade de recherche et d'intervention (BRI) pourrait être intégrée au RAID – Recherche, assistance, intervention, dissuasion. Enfin, en matière de lutte contre l'immigration clandestine, la sous-direction de la lutte contre l'immigration irrégulière (SDLII) pourrait être intégrée à la police aux frontières (PAF).

Monsieur le ministre, quels transferts de la préfecture de police à la DGPN le Gouvernement peut-il envisager ?

Votre rapporteur préconise qu'une réflexion soit engagée pour la constitution de centres de commandement départementaux communs aux forces de police et de gendarmerie, comme nous le préconisions déjà dans le rapport que nous avons remis au Premier ministre avec ma collègue Alice Thourot. Notre objectif est de permettre de récupérer des effectifs et d'être plus opérationnels dans le traitement des interventions pour rendre un meilleur service à la population. D'où ma question : envisagez-vous la constitution au niveau départemental de centres de commandement communs aux deux forces ?

Concernant les forces nationales d'intervention spécialisées, votre rapporteur pour avis réitère sa proposition déjà formulée l'année dernière d'un commandement unifié du RAID et du groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN). Ce commandement unique permettrait de mettre un terme définitif aux conflits de compétences et de rationaliser là aussi les effectifs et les dépenses. Monsieur le ministre, envisagez-vous une telle organisation et, le cas échéant, dans quel délai ?

Vous l'aurez compris, la clé de voûte de cet avis tient à la réorientation des personnels opérationnels vers leur coeur de métier. Pour cela, il nous faut aussi accélérer le transfert et la suppression des missions périphériques et autres tâches indues qui détournent un nombre encore trop important de policiers et de gendarmes de leurs missions prioritaires. Or il n'a été constaté que peu d'évolution dans ce domaine depuis un an, en particulier concernant la garde statique des bâtiments publics, et surtout la gestion des procurations électorales qui vont être un problème dans l'année à venir. Mon collègue Fabien Matras développera cet aspect, mais il me tient à coeur de vous préciser que des solutions de recours à la sécurité privée pourraient être mises en oeuvre ; nous l'avons évoqué, Alice Thourot et moi-même, dans notre rapport.

Par ailleurs, la substitution de personnels administratifs, techniques et scientifiques aux personnels actifs doit se poursuivre sur les fonctions support afin de libérer des personnels actifs pour les missions opérationnelles. L'objectif du plan de substitution de personnels administratifs aux personnels des corps actifs sur les fonctions de soutien est par ailleurs reconduit en 2019. Le rythme de 500 pour la police nationale et de 300 pour la gendarmerie nationale, chaque année, jusqu'à la fin du quinquennat, se heurte à un problème de recrutement, en particulier sur la région parisienne, ce que le préfet de police a soulevé lors des auditions. Le cas échéant, monsieur le ministre, quels recrutements d'agents administratifs envisagez-vous spécifiquement en région parisienne ?

Le rapporteur pour avis se félicite de la trajectoire très favorable du budget actuel des forces de police et de gendarmerie nationales. Il demeure cependant persuadé que les quelques pistes de réforme soulevées ici seront de nature à favoriser la cohésion opérationnelle des diverses forces de sécurité intérieure et à dégager, à budget constant, de très nombreux équivalents temps plein travaillé (ETPT) qui pourront utilement renforcer la police de sécurité du quotidien, projet majeur du quinquennat dans le domaine de la sécurité.

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