Intervention de Serge Morvan

Réunion du mercredi 21 novembre 2018 à 9h45
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Serge Morvan, Commissaire général à l'égalité des territoires :

L'Agence nationale de la cohésion des territoires doit effectivement concilier cette demande forte avec ce qui existe déjà sur les territoires. Elle doit en tenir compte pour jouer le rôle d'ensemblier dont vous avez parlé.

Alors, comment formaliser l'intervention de l'agence ? Comment formaliser la contractualisation entre les services de l'État et les porteurs de projets, mais aussi avec la région, le département, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ? Il peut être intéressant de développer des relations contractuelles avec les métropoles au bénéfice des territoires environnants et de ceux qui ne sont pas directement au contact de celles-ci. Cela pose un problème juridique, qu'il est nécessaire de résoudre pour parvenir à une « mobilisation générale » : comment faire intervenir les métropoles sur des territoires qui ne font pas partie de leur périphérie immédiate ?

La question n'est pas seulement celle des relations entre l'État et les collectivités territoriales, mais aussi celle de l'intervention des citoyens et des entreprises qui sont les forces vives des territoires. Non seulement ils formulent des demandes, mais aujourd'hui ils apportent des solutions. Je souhaite donc que l'Agence nationale de la cohésion des territoires s'appuie sur les habitants et les entreprises. Dans le rapport, j'ai mentionné une « réserve citoyenne » et son rôle dans les « fondations des territoires ». Cependant, tout n'est pas de niveau législatif, c'est pourquoi ces dispositifs ne figurent pas dans la proposition de loi.

J'ai participé hier à une réunion sur la création de fondations destinées à permettre aux entreprises de travailler différemment avec les collectivités territoriales. Je reconnais humblement qu'il n'est pas facile de mettre en place une nouvelle manière de travailler, car cela implique de changer les mentalités, et d'abord celles des préfets et des services de l'État.

Comment faire pour avoir une approche différenciée et en même temps reproduire certains projets, grâce à ce que vous avez appelé une « projetothèque », madame de Courson ? Il faut effectivement que l'agence mette à la disposition de l'ensemble des territoires un panorama des actions possibles, afin de les aider à formuler les projets qu'ils imaginent et qu'ils doivent adapter à la réalité de leur territoire. Elle doit avoir ce pouvoir d'inspiration, sans pour autant recentraliser les projets.

L'agence doit travailler dans un contexte nouveau en tenant compte du fait que notre pays est, à de multiples égards, en transition, sur le plan numérique, mais aussi sur les plans démographique et écologique. Elle veillera à ce que la définition des politiques publiques prenne vraiment en compte la dimension territoriale. Lorsqu'on territorialise une politique, il faut tenir compte des territoires. Cela paraît une lapalissade, mais aujourd'hui les territoires ne sont pas toujours pris en compte, et c'est pour cela qu'une agence est nécessaire.

Comment fonctionnera-t-elle ? Les porteurs de projets appellent le préfet pour expliquer leur projet. Ensuite, le préfet doit mettre autour de la table les autres collectivités territoriales pour définir les besoins, notamment en ingénierie. En effet, c'est toujours plus facile pour un élu local d'aller voir le préfet ou le sous-préfet, plutôt que de monter à Paris pour discuter avec les services centraux. Il faut donc que l'on puisse connaître au niveau local les dispositions possibles, grâce aux collectivités territoriales et à l'ingénierie privée. Si on ne parvient pas à trouver les moyens nécessaires au niveau local, il faut monter au niveau régional, pour s'adresser à des personnels plus spécialisés. En effet, de nombreux opérateurs sont organisés au niveau régional, tels que l'ADEME, la Banque des territoires ou la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Si ce n'est pas suffisant, on s'adressera alors au CEREMA, qui rassemble des spécialistes de très haut niveau, notamment en matière d'environnement et de mobilité, qu'il est impensable d'embaucher sur place.

En outre, nous savons que l'ANCT doit avoir une action renforcée dans quinze ou vingt départements. Il est en effet évident que l'ANCT doit cibler les territoires qui ont particulièrement besoin d'elle, c'est-à-dire les territoires les plus fragiles ou les moins bien dotés. Comme vous le savez, dans les zones rurales, il y a beaucoup de dynamisme et d'énergie ; il faut se mettre au service de ces territoires pour que les projets qui foisonnent soient effectivement réalisés.

Il est certain qu'il y a une différence entre une agence « rêvée » et une agence réelle. En écrivant le rapport, j'ai proposé un objectif. Je songeais à un proverbe chinois, d'après lequel « Un voyage de mille lieues commence par un pas ». Accomplissons donc ces premiers pas, en faisant dès maintenant ce qui est possible, et gardons en tête notre objectif.

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