Intervention de Valérie Rabault

Séance en hémicycle du mardi 15 janvier 2019 à 15h00
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Motion de renvoi en commission (projet de loi ordinaire)

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Rabault :

Un désir d'être pris en considération quel que soit son niveau de ressources, quel que soit l'endroit où l'on habite.

Les perspectives que vous offrez là montrent bien que c'est tout l'inverse qui se profile : une justice à deux vitesses, l'une rapide et avec des voies de recours supplémentaires pour les plus riches, l'autre plus lente et moins efficace pour les plus pauvres ; une justice pour les habitants des grandes villes qui pourront aisément pousser la porte du juge, une justice pour les habitants des campagnes qui devront bientôt faire des heures de transports pour voir leur affaire jugée.

Puisque les Français réclament avec vigueur l'oreille du Gouvernement, il est peut-être temps de les écouter. Quand, ce midi, avocats, magistrats, justiciables et défenseurs des droits fondamentaux se rassemblent pour protester contre cette réforme, quelle réponse leur apportez-vous ? Aucune ! Au manque criant de moyens de la justice, vous répondez par un rationnement supplémentaire.

Pour conclure, il n'est pas acceptable en démocratie de renoncer à sa responsabilité politique et de la déléguer aux chefs de juridiction. C'est pourtant ce que vous faites en leur imposant de décider de la présence judiciaire sur le territoire. Or cette décision relève de votre responsabilité et non de celle des chefs de juridiction. Vous laissez donc à d'autres le soin de faire les basses besognes, à savoir la réduction des tribunaux rendue inévitable par la logique de votre texte. Députés de la nation, nous sommes pleinement responsables et conscients de ce qui incombe au politique ; or aujourd'hui, vous voulez nous imposer de déléguer cette décision à d'autres. Nous devons assumer les choix budgétaires, nous devons assumer la présence sur le territoire français des tribunaux. La réforme que vous proposez n'est qu'une forme d'hypocrisie puisque vous fermez le ban en laissant à d'autres le soin de décider.

Pour toutes ces raisons, nous déposons cette motion de renvoi en commission. Nous déposons cette motion de renvoi en commission afin d'obtenir les réponses aux questions auxquelles vous n'avez pas voulu répondre jusque-là. Nous déposons cette motion de renvoi en commission pour que l'ensemble de nos concitoyens, justiciables, magistrats, avocats qui, de nouveau, ont défilé aujourd'hui place Saint-Michel, à Paris, soient entendus. Ce n'est pas une logique corporatiste : il s'agit d'apporter une réponse à l'enquête du CEVIPOF selon laquelle la justice est, de tous les services publics, tous ! , celui qui inspire le moins confiance aux Français. Seuls les banques, les syndicats et les partis politiques font moins bien !

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