Intervention de Arnaud Viala

Réunion du mercredi 30 janvier 2019 à 9h40
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Viala :

La création de l'ANCT a été annoncée à grand renfort de communication par le Président de la République et le Premier ministre dès le début du quinquennat. Elle a été présentée comme une révolution dans les modes d'intervention de l'État et la manière de coordonner les politiques publiques dans les territoires, et comme un moyen de répondre à toutes les interrogations qui, avant même la crise que nous traversons depuis quelques semaines, étaient extrêmement prégnantes parmi les élus territoriaux, mais aussi parmi ceux de nos concitoyens qui vivent en dehors des quelques grandes métropoles françaises.

À l'arrivée, que nous proposez-vous ? Vous nous proposez, à travers une simple proposition de loi – ce qui montre, en soi, l'absence de stratégie d'ensemble de votre part – la création d'un « machin », pour reprendre un mot du général de Gaulle, dont on ne sait pas exactement comment il va fonctionner. Pour le dire autrement, on a vraiment le sentiment ce matin que la montagne accouche d'une souris.

Sur la forme, j'aimerais que vous nous expliquiez, monsieur le rapporteur pour avis, de quelle manière l'ANCT va s'articuler avec les structures déjà existantes qui, pour certaines d'entre elles, ont fait leurs preuves. Je pense notamment au CGET, dont j'ai du mal à comprendre qu'il soit placé sous la tutelle de l'agence, alors même qu'il conduit, dans la plupart des territoires, des politiques extrêmement efficaces en matière de développement. J'aimerais également que vous m'indiquiez les moyens qui seront mis à la disposition de l'agence, puisque vous indiquez que le délégué territorial de l'agence sera le préfet de département. Or nul n'ignore ici que les préfectures de département ont très peu de moyens en termes d'ingénierie et d'accompagnement de projet et qu'elles en sont aujourd'hui réduites à renvoyer leurs interlocuteurs vers les conseils départementaux, et surtout vers les intercommunalités, qui sont souvent les plus à même d'accompagner les projets territoriaux. Comment ces préfets de département, qui sont déjà les interlocuteurs naturels lorsqu'on a besoin d'un accompagnement, seront-ils en mesure, sans moyens supplémentaires, de trouver des réponses aux questions qui leur seront posées ?

J'aimerais également que vous explicitiez la relation de l'agence avec les départements en matière d'ingénierie. En effet, depuis l'adoption de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, la plupart des conseils départementaux sont en mesure d'offrir aux collectivités de premier niveau, notamment les communes et les intercommunalités, des solutions en matière d'ingénierie. La nouvelle agence va devenir le « guichet unique », pour reprendre vos termes, mais on ne sait pas comment elle va s'articuler avec l'ingénierie des conseils départementaux.

Sur le fond, l'ANCT nous est présentée comme la réponse à toutes les questions qui se posent en matière d'aménagement du territoire et d'équité territoriale des politiques publiques. Pourtant, dans la proposition de loi sur laquelle nous sommes invités à nous prononcer, on ne trouve rien sur la stratégie, rien sur la volonté décentralisatrice qui devrait présider à la création d'une telle agence, rien sur ses objectifs ni sur les desseins qu'elle doit favoriser en matière de politique publique et d'aménagement du territoire, rien, enfin, sur un lien éventuel avec les travaux en cours sur l'hypothétique future révision constitutionnelle et son volet consacré à l'expérimentation et à la différenciation, qui doit permettre aux territoires d'exprimer des volontés particulières liées à leurs spécificités. Ce travail n'est donc pas abouti.

Le groupe Les Républicains n'a rien contre le principe d'une agence en faveur de la cohésion des territoires, mais, si une telle agence doit exister, qu'on lui assigne des objectifs et qu'on lui donne les moyens de les atteindre ! En attendant que vous nous éclairiez sur ces deux points, nous sommes très réservés quant à la plus-value qu'apporterait une telle structure, qui représentera, de surcroît, une charge financière supplémentaire, en raison notamment des émoluments des personnes qui la feront fonctionner.

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