Intervention de Laurent Nuñez

Réunion du mardi 12 février 2019 à 16h40
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Laurent Nuñez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Intérieur :

Les mineurs radicalisés peuvent être inscrits au FSPRT, et ils bénéficient d'un accompagnement social. Ils ne sont pas laissés au bord du chemin. L'idée est d'essayer de leur montrer un autre chemin par le biais de la réinsertion professionnelle ou en milieu scolaire.

Les préfets auraient du mal à réunir les conditions de fermeture des lieux de culte radicalisés, dites-vous, madame Fajgeles, après les échanges que vous avez eus avec certains élus ? Cette mesure, qui vise à prévenir des actes de terrorisme, touche à cette question essentielle qu'est la liberté de culte : pour qu'un lieu de culte soit fermé, la loi a donc prévu des critères très précis sur les propos qui y sont tenus, les idées ou théories qui y sont diffusées, les activités qui s'y déroulent. Ces propos, idées, activités doivent inciter à la discrimination, à la haine, à la violence, à la commission d'actes terroristes en France ou à l'étranger, ou faire l'apologie de tels agissements et de tels actes. Les faits doivent donc être caractérisés : ils peuvent avoir trait à la nature des messages véhiculés, aux prêches, à l'organisation de conférences, à la diffusion d'écrits, à l'invitation de personnalités connues pour leur soutien à des organisations comme Daech. Le critère de la fréquentation du lieu de culte peut également être retenu, notamment l'implication de dirigeants ou de fidèles dans des organisations terroristes ou leurs liens avec des individus affidés à ces organisations.

Les dossiers, construits avec l'aide des services de renseignement, sont très étayés. Nous demandons aux préfets de veiller à ce qu'ils soient suffisamment solides pour ne pas encourir le risque d'une annulation contentieuse. Les mesures prises ont systématiquement fait l'objet de recours, qui ont tous été rejetés. C'est important à signaler : il n'y aurait rien eu de pire que l'annulation d'une décision de fermeture de lieu de culte. À la faveur d'une autre question, j'évoquerai les associations gestionnaires de lieux de culte, qui peuvent faire l'objet d'une procédure de dissolution.

Nous n'avons pas constaté de réouverture de l'un ou l'autre des cinq lieux de culte qui ont été fermés pendant la durée de production de ce rapport. À l'issue de la période de fermeture de six mois, ils n'ont pas rouvert pour diverses raisons, et notamment parce que les baux n'étaient pas renouvelés. L'objectif a été atteint puisque, comme je le disais dans mon propos liminaire, dans chaque cas, un effet directement mesurable a été constaté sur la vie du quartier.

Pour répondre à votre dernière question, nous n'avons pas relevé de difficultés d'application de ce texte, qui appelleraient des corrections. Nous sommes parvenus à un bon équilibre entre la nécessité d'avoir des dossiers construits et le respect de la liberté de culte.

Monsieur Diard, le fait qu'il n'y ait que quatre-vingt-six requêtes en matière de visites domiciliaires ne signifie pas que l'outil est ciblé sur le haut du spectre. Il peut aussi concerner des individus situés plutôt dans le bas du spectre, mais en relation avec des individus situés dans le haut.

Vous avez raison : l'évaluation du passage à l'acte est extrêmement difficile. Vous avez cité le cas du terroriste de Strasbourg, inscrit au FSPRT parce qu'il avait été signalé comme s'étant radicalisé en prison. Il faisait l'objet d'une surveillance effective qui n'avait jamais révélé de velléités de passage à l'acte. Il était suivi dans le cadre du groupe d'évaluation départemental (GED). Il avait d'ailleurs été décidé de le traiter selon une procédure de droit commun puisqu'il était un délinquant notoirement connu pour des faits de ce type, il a effectivement échappé à une interpellation le matin, dans les conditions que vous avez décrites. Est-ce cela qui a entraîné son passage à l'acte ? Seule l'enquête judiciaire le révélera. Les services de renseignement se concentrent sur cette difficile détection du passage à l'acte.

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