Intervention de Miguel Arias Cañete

Réunion du jeudi 14 février 2019 à 9h10
Commission des affaires européennes

Miguel Arias Cañete, Commissaire européen chargé de l'action pour le climat et l'énergie :

De nombreux États membres ont décidé de mettre fin à l'extraction du charbon et la production d'électricité à partir de ce minerai, et d'autres pays, de réduire la production d'électricité d'origine nucléaire. Dans ce contexte, avant que l'on soit capable de développer toutes les énergies renouvelables nécessaires, le gaz naturel assurera la transition entre les énergies d'origine fossile et les énergies propres. Mais, en 2050, le gaz ne pourra jouer un rôle que s'il est d'origine renouvelable et, d'évidence, sa part dans le mix énergétique européen diminuera. Cela doit conduire à la prudence au moment de financer des infrastructures : on ne peut installer partout des gazoducs dont on ne pourra amortir le coût. La circonspection s'impose particulièrement quand il s'agit de deniers publics – si des investisseurs privés souhaitent se lancer dans de folles entreprises, à la bonne heure, mais si ce doit être avec le soutien d'argent public, c'est une autre histoire.

Parler du pacte finance-climat, c'est en revenir à la fiscalité énergétique et donc, une fois encore, au problème de fond qu'est la règle de l'unanimité : aussi longtemps que cette règle durera, il n'y aura pas de fiscalité énergétique européenne intelligente et harmonisée. Parce que les conceptions des États membres sont très différentes, le processus législatif communautaire est complexe. Entre le moment où l'Union lance un processus législatif et celui où il aboutit, quelque deux ans de discussions ont lieu pour parvenir à une position unanime.

J'étais présent quand l'accord politique provisoire sur l'amélioration de la directive existante sur le gaz a été discuté jusqu'à minuit. Ces compromis sont complexes, car les intérêts en jeu sont très différents : en l'espèce, certains souhaitent que les gazoducs ne soient soumis à aucune règle, mais d'autres estiment que la règle européenne doit valoir pour tous les gazoducs. Actuellement, l'Union européenne est fortement dépendante des importations de gaz russe. Parce qu'elle souhaite le renforcement de la sécurité énergétique de l'Union et donc la diversification des sources d'approvisionnement, la Commission a, notamment, appuyé le corridor gazier sud-européen et mis au point une stratégie relative au gaz naturel liquéfié.

La neutralité climatique permettra à l'Union de réduire sa dépendance énergétique, qui passera de 55 % à 25 %. Mais, alors même qu'elle se fixe des objectifs tendant à parvenir à la neutralité climatique, l'Union, chaque année, subventionne les énergies fossiles à hauteur de 55 milliards d'euros et règle une facture d'importation de ces énergies de 176 milliards d'euros. Si l'on parvient à la neutralité climatique, les importations seront réduites de 70 % – ce qui représente une économie cumulée astronomique – et la sécurité énergétique de l'Union augmentera. De plus, le résultat obtenu sera bénéfique pour la santé des Européens, ce qui n'est pas anodin sachant que, chaque année, l'Union enregistre 400 000 décès prématurés dus à la mauvaise qualité de l'air et que les problèmes sanitaires associés sont à l'origine d'un coût supérieur à 100 milliards d'euros.

Pour atteindre nos objectifs, nous devrons aussi repenser notre politique de traitement des déchets en développant l'économie circulaire. Les États membres ont des positions différentes, mais l'Union européenne a une législation commune qui doit être renforcée dans tous les États membres, lesquels doivent présenter des plans nationaux intégrés et les appliquer. Nous allons harmoniser les efforts collectifs par le biais de la gouvernance, car c'est le seul moyen d'agir globalement dans la même direction, même si c'est à une vitesse différente. Si, finalement, le prix de l'énergie renouvelable est plus bas que celui de l'énergie d'origine fossile, même des pays comme la Pologne devront revoir leur stratégie car les citoyens européens ont besoin d'énergie bon marché.

Tous les États du monde doivent faire des efforts, mais cela pose un problème aux pays les moins développés, auxquels les capacités pour agir font défaut. Si la France éprouve des difficultés pour atteindre ses objectifs, imaginez ce qu'il en est pour le Mali ! Il faut construire des capacités dans les pays en voie de développement. L'Union européenne a la responsabilité majeure de consacrer le temps et les investissements nécessaires pour réaliser l'état des lieux qui permettra de répondre aux problèmes de ces pays de manière appropriée et pour contribuer à créer les conditions législatives favorables aux investissements privés étrangers, car il n'y aura pas d'investissements en l'absence d'un cadre juridique stable et sûr.

Le Brexit a été anticipé dans le secteur de l'aviation pour les quotas d'émission. Dans la relation future, il sera de l'intérêt du Royaume-Uni d'avoir un marché carbone connecté à celui de l'Union européenne. Nous voyons avec les exemples de la Norvège et maintenant de la Suisse que la logique finit par s'imposer. S'il en allait autrement, il faudrait créer un marché de quotas britannique compatible avec le marché européen. Mais il y aura des problèmes plus compliqués que celui-là à résoudre dans le cadre du Brexit, et j'espère que le Brexit « dur » sera évité.

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