Intervention de Raoul Briet

Réunion du mercredi 6 mars 2019 à 16h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Raoul Briet, président de la première chambre de la Cour des comptes :

Souhaitée par l'opinion, effectivement.

On a créé toujours plus de budgets à côté du budget ou dans le budget, et ce sujet est central. Indépendamment de ce que le Premier président a dit tout à l'heure, l'idée que nous avions avancée, en 2017, de faire voter un objectif de dépense « toutes administrations publiques » vise précisément à essayer de formaliser un cadre global de dépenses par-delà les frontières mouvantes entre les collectivités locales, l'État et les administrations de sécurité sociale. Cela permettrait, ex post, de mesurer les résultats, d'apprécier les écarts et d'en déterminer les causes. Il n'existe aucun remède miracle en la matière, mais cette mesure permettrait de donner corps à un objectif de dépenses en euros courants, et non pas en renvoyant à des notions bruxelloises un peu absconses d'effort structurel en dépenses que personne ne peut comprendre. Il s'agit là des sommes décaissées entre le 1er janvier et le 31 décembre par l'ensemble des administrations publiques, ce qui, nous semble-t-il, permettrait de progresser dans la pédagogie et dans le pilotage par le Parlement des dépenses de l'ensemble des administrations publiques.

Par ailleurs, si un effort significatif de réduction du nombre des indicateurs a été conduit, on n'en constate pas moins que les indicateurs de la LOLF demeurent très nombreux, mais surtout, qu'ils ne « mordent » pas sur les décisions que vous, parlementaires, prenez, ni sur les décisions de gestion que prennent les responsables de programme.

De façon rapide, on peut dire qu'une sorte de corpus s'est créé ; les gestionnaires ont d'ailleurs continué à utiliser leurs propres systèmes d'indicateurs de gestion à des fins de pilotage qui sont les leurs. Il y a donc matière à reconsidérer l'usage qui a été fait de ces indicateurs. Dans notre prochain rapport sur le budget de l'État (RBDE), nous évoquerons les exemples étrangers, qui montrent que, pour que ce dispositif d'indicateurs de performance vive vraiment et ait prise sur la réalité, il faut l'associer à d'autres dispositions, notamment à des dispositions régulières de revue de dépenses afin de créer des enjeux auprès des cadres de décision.

M. le rapporteur général a posé la délicate question des taxes affectées ; il me semble qu'il faut partir de situations compliquées avec des idées simples. Le principe demeure que la taxe affectée constitue l'exception alors que la spécialité est la règle. À partir du moment où la taxe affectée doit être l'exception, il n'y a pas de raison de la plafonner pour financer le budget général. Encore faut-il que les taxes affectées correspondent, aux conditions que la loi prévoit, à une vraie spécificité. Ainsi est-il de tradition de faire financer l'Autorité des marchés financiers ou l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution par les sociétés bénéficiant de la régulation.

En tout état de cause, le recours aux taxes affectées devrait être beaucoup plus restreint que ce l'on constate en pratique. Dès lors que l'on se situe en dehors de la logique de la taxe affectée, s'il y a trop d'argent, il faut baisser le niveau de la taxe ; alors que plafonner ou écrêter consiste à se servir d'une taxe qui avait un certain objectif pour servir un autre objectif qui est de financer le budget général. La raison de fond présidant à cela est que l'on n'a pas revisité sérieusement ce qui devait être maintenu comme taxe affectée et devait rester exceptionnel.

Si l'on revisite le sujet en profondeur, on n'a plus à contourner le sujet, ce qui s'est fait depuis des années, en prévoyant des modes de refinancement par le budget de l'État sur la base de taxes affectées. Le problème doit être attaqué à la racine, et pas par ce contournement qui consiste à faire financer le budget général par les taxes affectées, nonobstant les objectifs poursuivis.

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