Intervention de Jean-Paul Mattei

Séance en hémicycle du mercredi 13 mars 2019 à 21h30
Croissance et transformation des entreprises — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Mattei :

Le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui en nouvelle lecture incarne l'engagement de libérer les énergies entrepreneuriales que nous avions pris lors de notre campagne, en 2017.

Ce texte novateur permettra de libérer les entreprises des freins qui les entravent. Je me félicite qu'il ne concerne pas que les grandes entreprises ou le grand capital, mais aussi les TPE-PME. Sur de nombreux sujets, il va faire mouche et donner le sourire à beaucoup d'entrepreneurs, au stade de la création de l'entreprise, au cours de son existence et au moment de sa cession. L'oeuvre d'un entrepreneur est de créer, faire fonctionner et transmettre, et toutes ces étapes sont abordées par ce texte.

Je me réjouis également que ce texte contienne des éléments introduits par le groupe MODEM, notamment la simplification des apports en compte courant d'associé. Beaucoup de belles choses sont dites, beaucoup de grandes théories sur le capitalisme par exemple, mais il est très réconfortant de savoir que ce texte va aussi régler de nombreux problèmes pratiques. Parmi les apports de notre groupe, citons également l'extension du financement participatif à des entreprises dont la raison sociale comprend des objectifs sociaux ou environnementaux ; l'introduction de l'affacturage inversé de type collaboratif, qui améliorera les délais de paiement entre entreprises et représentera ainsi un levier potentiel de 12 à 14 milliards d'euros ; ou encore l'amélioration de l'accès des PME aux marchés publics de travaux.

Toutefois, bien que la simplification apportée par le projet de loi PACTE soit bienvenue pour fluidifier la vie des entreprises, il existe quelques points de vigilance que j'ai soulignés en commission.

Tout d'abord, si la volonté de faire évoluer les seuils entraînant l'obligation de recourir à un commissaire aux comptes peut être guidée par le souci de simplifier les démarches des entreprises, j'appelle votre attention, monsieur le ministre, sur le fait que les entreprises ont besoin des tiers de confiance que sont les professions du chiffre et du droit.

Les commissaires aux comptes – j'en parle librement – sont et resteront indispensables aux groupes de sociétés. Il ne faut pas négliger leur rôle déterminant dans la protection des créanciers et des associés grâce au contrôle sincère qu'ils opèrent, surtout à l'heure de la réorientation de l'épargne vers l'entreprise.

Alors que l'économie évolue avec la « blockchain », il est important de conserver dans l'entreprise le conseil humain et expert de ces tiers de confiance. Aussi, monsieur le ministre, serait-il nécessaire de différer l'entrée en vigueur des dispositions concernant les commissaires aux comptes en ne les rendant applicables que pour les exercices ouverts au 1er janvier 2019. Cela laisserait une année supplémentaire aux milliers de professionnels concernés pour réorganiser leur activité, et permettrait aux sociétés de prendre les mesures nécessaires à l'application de la loi, car il existe un problème contractuel.

Le groupe MODEM, conscient de l'importance des PME dans la croissance, considère que le texte pourrait être amélioré sur plusieurs autres points.

Les chambres consulaires doivent avoir les moyens de poursuivre leurs missions d'accompagnement des PME sur tout le territoire.

La simplification des délais de création d'entreprise devrait être encore plus poussée. Le dépôt des statuts devrait pouvoir se faire par tout acte ayant acquis date certaine et contrôlé par une profession habilitée, afin de conférer la personnalité morale à une entreprise au même titre que l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés.

Les prêts inter-entreprises devraient être autorisés quelle que soit la forme de l'entreprise et sans condition de délai, même si celui-ci a été porté de deux à trois ans par le présent texte.

La location d'actions devrait être étendue aux personnes morales pour en développer tout le potentiel. Je suis prêt à vous aider à travailler sur ce point, monsieur le ministre. Nous avions évoqué l'opportunité de mettre en place une mission sur ce type de participation.

De même, au stade de la cessation d'activité, il serait opportun d'autoriser, pour les entreprises qui ne font pas l'objet d'opérations de liquidation, la prise simultanée de deux actes de dissolution et liquidation. Ce sont des mesures simples qui accélèrent la vie des entreprises.

S'agissant de la réforme des sûretés, prévue par les articles 16, 19 et 64, il vous faudra trouver un subtil équilibre entre efficacité de la sûreté et chances de rebond de l'entreprise. Pouvez-vous nous indiquer si vous entendez consulter les professionnels concernés dans le cadre de la rédaction des ordonnances ? Certains mécanismes, sans être qualifiés de sûreté, ont également pour objet de garantir le recouvrement de la créance, comme la délégation de créance, la promesse de porte-fort ou encore la compensation. Seront-ils concernés ?

En ce qui concerne les privatisations d'ADP, de la Française des jeux ou d'Engie, nous avons été rassurés par la teneur de nos échanges et l'évolution du texte. Il ne faut pas caricaturer, ni créer d'amalgame entre ce type de privatisations et celles que nous avons connues par le passé. Nous avons confiance dans l'évolution de ce texte, même si nous serons très vigilants pour que rien ne soit oublié dans le cahier des charges qui sera établi dans le cadre de ces évolutions, en particulier le retour du patrimoine à l'État au terme des soixante-dix ans.

En conclusion, je tiens à saluer un texte ambitieux et réformateur qui, même s'il pourrait encore être amélioré à la marge, permettra de faciliter la vie de ceux qui créent la croissance et l'emploi dans notre pays. Vous pouvez compter sur notre soutien et notre adhésion à cette ambition pour les entreprises de notre pays.

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