Intervention de Muriel Ressiguier

Réunion du lundi 11 mars 2019 à 17h10
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMuriel Ressiguier :

Le système de santé de notre pays est aujourd'hui malade des politiques de réorganisation menées depuis quarante ans, souvent au nom de considérations budgétaires. Le projet de loi que nous examinons poursuit la même logique.

Si nous sommes plutôt favorables aux articles 1er et 2, nous pensons que le voile doit être déchiré sur la réalité de la santé publique en France. Depuis quatre ans, l'espérance de vie stagne dans notre pays : 79,4 ans pour les hommes, 85,3 ans pour les femmes. La France est par ailleurs mal classée en Europe en ce qui concerne l'espérance de vie en bonne santé. Ainsi les hommes vivaient-ils en moyenne, en 2016, dix mois de moins en bonne santé dans notre pays que dans le reste de l'Europe : 62,7 ans, contre 63,5 ans en Europe.

La répartition de l'offre de soins est inégalitaire. Le nombre de médecins généralistes a diminué de 8,4 % entre 2007 et 2016, affectant tout particulièrement le service public hospitalier. Selon les chiffres de la direction de la recherche, des études et de l'évaluation en santé (DREES), les restructurations ont conduit à ce que le nombre de sites hospitaliers publics chute de 7 % en cinq ans.

Pourtant, la préservation de l'hôpital public devait être la priorité des politiques de santé, pour éviter qu'il ne sombre pas dans des logiques marchandes. Hélas il n'en est rien, et votre projet de loi s'inscrit dans une logique favorisant l'hôpital-entreprise, qui met au second plan les conditions d'accueil des patients. Vous favorisez d'ailleurs, de manière incompréhensible, les établissements privés à but non lucratif, en leur octroyant un délai supplémentaire de trois ans pour se mettre en conformité avec le code de la santé publique, dans ses dispositions sur les dépassements d'honoraires.

Si nous nous accordons parfois sur la réalité d'un système de santé qui s'essouffle et se trouve au bord de l'explosion, les conclusions que nous en tirons sur les politiques à mener sont différentes. Vous avez ainsi l'intention, par la création d'un statut unique de praticien hospitalier, de supprimer le concours et d'accroître le recours aux contractuels dans le milieu hospitalier. Vous projetez également de redéfinir par ordonnance les missions et la gouvernance des hôpitaux de proximité : nous ne pouvons passer sous silence l'extraordinaire latitude que vous donnez ainsi au Gouvernement pour organiser cette rationalisation des hôpitaux de proximité, nouveaux avatars des anciens dispensaires, qui devrait se traduire en certains endroits par des services de moindre qualité, voire la disparition de structures, faute de médecins.

Et que dire des mesures de mutualisation incluses à l'article 10 du projet de loi, qui visent à renforcer l'intégration au sein des groupements hospitaliers de territoire ? Là encore, le service public de santé se fait plus rare et plus éloigné des populations.

Enfin, les enjeux essentiels sont délibérément occultés par votre projet de loi, mais La France insoumise les défendra lors des discussions à venir. L'épuisement des professionnels de santé lié au manque d'effectifs, en particulier dans l'hôpital public, est patent. La question des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), de la misère des professionnels et du traitement des personnes âgées, ainsi que de la concurrence effrénée des établissements, qui acte la défaite du secteur public, doit être abordée. Sans parler de la politique de prévention, qui ne peut être dissociée de l'organisation du système.

Nous resterons donc très vigilants, afin de promouvoir un système de santé conforme aux réels besoins de la population, égalitaire et accessible.

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