Intervention de Éric Woerth

Réunion du mardi 2 avril 2019 à 16h35
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Woerth, président :

Nous avions évoqué dès octobre 2017, autrement dit il y a déjà un certain temps, cette question de la fiscalité des services numériques. Vous nous aviez alors répondu, monsieur le ministre, que c'était beaucoup trop tôt, qu'il fallait tenter d'obtenir un accord européen et que vous aviez bon espoir d'y parvenir. Qu'est-ce qui n'a par marché ? Quelles sont les vraies raisons derrière les décisions d'un certain nombre d'États membres, qui ont conduit à ne pas arriver à l'unanimité sur ce sujet ?

Je pense qu'il est bon que la France montre l'exemple. Sur un certain nombre de sujets, il ne faut pas hésiter à le faire. C'est ce que nous avions dit à l'époque et nous n'avons pas changé d'avis.

Selon certaines études – c'est un domaine dans lequel beaucoup de gens s'expriment –, l'écart de taux en matière d'impôt sur les sociétés (IS) ne serait pas de 14 %, comme vous l'affirmez, mais nettement inférieur. J'aimerais avoir votre avis sur ces études. Est-ce un problème de calcul, de base, d'assiette ou de vision mondiale – peut-être faussée – de la situation ? Il faut être clair sur cette question, car c'est le point de départ quand on affirme que l'on doit bâtir une autre fiscalité : celle des entreprises essentiellement fondées sur le numérique serait inférieure – et je pense que c'est le cas – à celle des autres entreprises.

Même si l'on ne peut pas se satisfaire d'une taxe sur le chiffre d'affaires, une telle disposition est envisageable dans une perspective transitoire. Se pose néanmoins la question de la double imposition, phénomène que toutes les conventions fiscales internationales s'emploient à éviter. Avez-vous le sentiment que nous allons entrer, en créant cette taxe en France, dans un régime où l'on rendrait les doubles impositions possibles ? Un certain nombre d'entreprises qui paieront la nouvelle taxe seront déjà imposées pour les mêmes activités au titre de l'impôt sur les sociétés. La taxe sur le chiffre d'affaires ne sera pas déductible de l'IS, sinon partiellement au niveau de la base, à hauteur d'un tiers. N'avez-vous pas le sentiment de mettre les pieds sur un terrain dangereux en prenant le risque de légaliser les doubles impositions ?

Nous recevrons demain M. Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d'administration fiscales de l'OCDE, à qui nous poserons sans doute les mêmes questions qu'à vous. On doit bien sûr avancer dans le cadre de l'OCDE, mais il faut aussi que la France l'éclaire grâce à ses propres enseignements sur ce sujet.

N'y a-t-il un pas un risque global pour nous si l'on se met à considérer, tout à coup, qu'il vaut mieux taxer sur le lieu de consommation plutôt que, grosso modo, sur le lieu de production ? Je vois bien que cela peut fonctionner pour les services numériques, mais si on l'étendait à l'ensemble de l'économie, ce que voudraient probablement d'autres États, cette règle se retournerait assez largement contre notre pays, où la valeur ajoutée est bien plus importante que la consommation.

Enfin, je ne sais pas si c'est un acte manqué, vous avez parlé de l'article 1er, mais pas de l'article 2, relatif à la trajectoire de l'impôt sur les sociétés, qui serait brisée cette année. Le rapporteur général a indiqué que cette trajectoire n'était pas remise en cause. Pourriez-vous confirmer que c'est le cas, sinon pour 2019 ?

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