Intervention de Marie-Ange Magne

Réunion du lundi 29 avril 2019 à 21h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Ange Magne, rapporteure pour avis :

L'incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris le 15 avril dernier a marqué tous les esprits, à Paris et dans tout le pays, mais aussi à l'étranger. Au-delà de l'émotion, l'élan de solidarité spontané et massif, qui s'est manifesté dès le soir de l'incendie, témoigne de la place particulière qu'occupe la cathédrale dans notre patrimoine historique, religieux et littéraire ainsi que dans l'imaginaire collectif, y compris au-delà de nos frontières.

Compte tenu de l'ampleur inédite et des montants des promesses de dons annoncées dès le 15 avril au soir, le Gouvernement, sous l'impulsion du Président de la République, a décidé d'instaurer une souscription nationale. C'est l'objet du projet de loi déposé le 24 avril dernier, dont nous examinons, ce soir, deux articles, la commission des affaires culturelles étant saisie au fond. Notre commission s'est formellement saisie pour avis mais nous procédons, d'un commun accord entre les présidents de nos deux commissions, à l'examen au fond des articles 4 et 5.

D'une manière générale, ces deux articles témoignent de la volonté du Gouvernement de permettre la participation de toutes et tous à la souscription nationale – particuliers, comme collectivités territoriales –, chacune et chacun selon ses moyens.

L'article 4 offre un cadre légal aux dons et versements que souhaiteraient effectuer les collectivités territoriales et leurs groupements pour la restauration et la conservation de la cathédrale, indépendamment de tout intérêt public local.

Afin que ces subventions ne pénalisent pas les objectifs et les termes des contrats conclus entre les collectivités territoriales et le représentant de l'État dans leurs territoires, dans le cadre de la maîtrise de leurs dépenses de fonctionnement, le Gouvernement a prévu que tous les versements effectués au titre de la souscription nationale seraient, à titre exceptionnel, considérés comme des subventions d'équipement et donc inscrits en section d'investissement des budgets locaux.

Cette précision fondamentale relative au traitement comptable des versements sera apportée par voie d'instruction budgétaire et comptable. Par conséquent, bien qu'elle ne figure pas expressément dans le dispositif juridique de l'article 4, elle en est bel et bien la caractéristique essentielle. Plusieurs de nos collègues ont déposé des amendements visant à inscrire dans la loi ce traitement comptable exceptionnel. Je comprends et je partage le souci de clarification dont procèdent sans doute ces amendements. La clarification est indispensable mais j'émettrai un avis défavorable à ces amendements car leur objet relève du domaine de l'instruction budgétaire et non de la loi.

L'article 5 constitue le coeur et le symbole de l'engagement de l'État aux côtés des donateurs particuliers afin de « permettre un accompagnement adéquat du mouvement de solidarité nationale » – je cite l'étude d'impact. L'importance symbolique et historique de la cathédrale Notre-Dame de Paris et « l'ampleur des dépenses de restauration occasionnées par le violent incendie [...] nécessitent d'aller au-delà du dispositif d'incitation fiscale de droit commun ».

Il s'agit d'un dispositif simple, exceptionnel et temporaire, qui a très tôt fait l'objet d'une communication. L'article 5 instaure ainsi une majoration exceptionnelle et temporaire du taux de la réduction d'impôt sur le revenu au titre des dons effectués par les particuliers ainsi qu'un plafond spécifique de 1 000 euros par foyer fiscal.

Par conséquent, les dons effectués entre le 16 avril 2019 et le 31 décembre 2019 en vue de la restauration et la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris ouvriront droit à une réduction d'impôt égale à 75 % des sommes versées, prises dans la limite de 1 000 euros. Au-delà de ce plafond, les dons ouvriront droit à la réduction d'impôt prévue par l'article 200 du code général des impôts, au taux de droit commun de 66 %.

Par ailleurs, dans un souci de sécurisation et d'encadrement de la collecte, seuls les dons effectués auprès du Trésor public, du Centre des monuments nationaux (CMN), de la Fondation de France, de la Fondation Notre-Dame et de la Fondation du patrimoine ouvriront droit à ce dispositif fiscal exceptionnel.

Le projet de loi ne modifie pas les règles applicables aux entreprises, dont les dons continueront, sauf renonciation expresse des donateurs, à ouvrir droit à un avantage fiscal. Par conséquent, je me prononcerai sur les amendements en m'en tenant aux équilibres dessinés par le Gouvernement dans son texte.

Les circonstances et le contexte dans lesquels nous examinons ce projet de loi sont – il faut le souligner – particuliers. Par ailleurs, nous devons, à ce stade, composer avec plusieurs incertitudes : des incertitudes sur l'ampleur des travaux de reconstruction, sur les choix architecturaux qui seront faits et donc, in fine, sur le coût total de la restauration ; des incertitudes sur le montant total des dons et versements ; une incertitude également sur la durée de la souscription nationale, puisque sa clôture sera prononcée par décret. Par conséquent, l'impact budgétaire et financier du présent projet de loi, en particulier celui de l'article 5, compte également parmi ces incertitudes. Nous ne pouvons pas, à ce stade, nous prononcer sur la dépense fiscale associée. Si les fondations considèrent que l'immense majorité de la collecte est à ce jour effectuée, la période d'éligibilité des dons à la majoration exceptionnelle prévue à l'article 5 court jusqu'au 31 décembre 2019, ce qui ne permet pas de se prononcer, à ce stade, sur le montant de la dépense fiscale associée.

Nous entendons çà et là plusieurs estimations des montants déjà collectés. Je peux vous communiquer les chiffres des quatre organismes habilités à recevoir les dons. Le 26 avril dernier, les dons et promesses de dons sur lesquels les donateurs ont communiqué auprès des fondations s'élevaient à plus de 400 millions d'euros.

Pour la Fondation du patrimoine, ce sont 220 000 dons émanant de particuliers, dont 17 000 provenant de donateurs étrangers, qui atteignent un montant total de 22,3 millions d'euros, dont 1,6 million d'euros en provenance de l'étranger. Le montant moyen des dons s'établit autour de 100 euros et la Fondation dénombre 163 000 dons inférieurs à 1 000 euros, pour un total de 16,4 millions d'euros. À ces montants, s'ajoutent 160 millions d'euros au titre des promesses de dons officialisées par les entreprises et 80 millions d'euros de promesses de dons à ce stade moins formalisées.

Pour la Fondation Notre-Dame, ce sont 33 000 dons émanant de particuliers qui atteignent un montant de 3,6 millions d'euros, soit un montant moyen de 110 euros par don. En prenant en compte les dons en provenance des États-Unis, des grandes entreprises et de certains pays, par exemple le Maroc et la Serbie, la fondation comptabilise 215 millions d'euros de promesses de dons.

Pour la Fondation de France, ce sont 50 000 dons émanant des particuliers qui atteignent un montant total de 25 millions d'euros.

Enfin, le CMN a récolté plus de 3 millions d'euros, provenant en majorité de particuliers, mais aussi de petites entreprises.

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