Intervention de Nicole Belloubet

Réunion du mardi 30 avril 2019 à 14h05
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Nicole Belloubet, garde des Sceaux, ministre de la Justice :

Je dirai un mot, pour commencer, de la lutte contre la surpopulation carcérale, qui est effectivement « la mère des batailles », comme Mme Untermaier l'a rappelé. Hélas, nous ne pourrons mesurer les résultats de notre politique en la matière que dans dix mois, lorsque la loi de réforme de la justice sera pleinement appliquée et que l'ensemble de la politique des peines sera entré en vigueur. Au moment où je vous parle, les travaux d'intérêt général (TIG) s'appliquent déjà et, dès le mois de juin, ce sera le cas des libérations sous contrainte aux deux tiers de la peine. Mais c'est seulement au mois de mars 2020 que l'ensemble du dispositif s'appliquera. C'est à ce moment que nous commencerons à voir, je l'espère, les effets de notre politique sur la surpopulation carcérale.

Certains d'entre vous m'ont interrogée sur les crédits de maintenance et m'ont demandé s'ils permettront de déployer des équipements de sécurité, notamment des filets anti-projection. Nous avons effectivement des crédits, et ils sont en augmentation : une somme de 1,6 milliard d'euros est destinée à la construction d'établissements pénitentiaires et 100 à 120 millions d'euros sont consacrés chaque année à la maintenance des équipements. Ces sommes nous permettent de mener un certain nombre d'actions en vue d'assurer la protection physique des personnels. La sécurisation des abords des établissements est également une question essentielle, que nous avons prise en compte dans la loi de modernisation de la justice, puisque des équipes locales de sécurité pénitentiaire pourront désormais intervenir aux abords des établissements.

S'agissant du régime de contrôle des visiteurs et des détenus, je vous rappelle que, grâce au rapport de MM. Dimitri Houbron et Xavier Breton, vous avez modifié le texte de loi concernant la fouille des détenus. Nous sommes désormais en mesure de prendre une circulaire d'application de ces nouveaux textes, que nous adresserons à l'ensemble des établissements d'ici la fin du mois de mai. Il en ira de même pour la fouille des visiteurs, qui mérite effectivement des clarifications. Il est évident, néanmoins, que nous ne pouvons pas fouiller tous les visiteurs dans tous les établissements pénitentiaires – ce n'est d'ailleurs pas, je crois, ce que vous avez demandé.

Nous pouvons envisager, pour les détenus les plus dangereux, la fouille des personnes qui leur rendent visite et le passage sous un portique à ondes millimétriques. Le directeur de l'administration pénitentiaire, ici présent, a passé un marché pour l'achat d'un dispositif équivalent, qui devrait bientôt nous être livré. Nous devons effectivement clarifier les règles en vigueur. En effet, nous avons eu quelques recours contentieux à la suite de fouilles effectuées à Condé-sur-Sarthe – le tribunal n'a pas donné raison aux requérants, qui contestaient ces fouilles.

S'agissant de la protection des agents pénitentiaires, Mme Cécile Untermaier et plusieurs d'entre vous ont évoqué les tenues qui leur sont proposées. Il faut distinguer les tenues pare-coups, du genre « RoboCop », qui ne sont utilisées que dans les quartiers particulièrement sécurisés, et les gilets pare-lames, dont n'était munie, jusqu'ici, qu'une partie des personnels des établissements pénitentiaires. Le directeur de l'administration pénitentiaire a pris l'engagement d'en munir l'ensemble des agents. Ces gilets seront livrés à Condé-sur-Sarthe à la fin du mois de mai et les 27 000 agents pénitentiaires en seront équipés d'ici à la fin de l'année civile.

Plusieurs d'entre vous ont également soulevé la question du rôle du chef d'établissement, qui est essentiel puisque c'est lui qui assure la police intérieure de l'établissement. C'est à lui qu'il revient par exemple, en fonction des caractéristiques des détenus qu'il héberge, de déterminer la nature des contrôles effectués à l'entrée de la prison. Cela fait partie de ses pouvoirs d'organisation du service, comme on dit en droit administratif, et il me semble effectivement important qu'il assume ses responsabilités.

J'aimerais, pour finir, revenir sur deux points très précis qu'a évoqués M. Xavier Breton.

S'agissant, premièrement, de la question des patios, sachez que nous sommes en train d'introduire des caméras et des oeilletons pour que les surveillants n'aient plus d'angles morts.

J'en viens, deuxièmement, à la question des UVF. Le régime des UVF a été défini par la loi pénitentiaire de 2009 : les détenus ont droit à un séjour en UVF par trimestre, mais cette règle doit naturellement être adaptée en fonction du profil des détenus et de leur comportement en détention, et c'est au chef d'établissement d'en juger.

Je le répète, il nous semble très important de clarifier les règles pour que les surveillants pénitentiaires connaissent précisément leurs capacités d'intervention.

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